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samedi 3 juillet 2021

Fermer les yeux

Un brouillon retrouvé, dans le grand tiroir à brouillons. Éjaculat du 19 Mars.

 

 Tu fermeras mes yeux pour moi? Lorsque la vie sera trop lourde, la volition légère? Que les forces réactives auront déchiré l'âme; en un abîme de conscience?

Le grand style... Voilà bien quelque chose qui n'est pas de ma ville. Je veux que Vérité se couche, au bout de la Raison, y dresser la maison de Conscience endormie.

Même le plus vil tyran a quand il dort l'air innocent...

Tu fermeras mes yeux pour moi? J'ai la souffrance circulaire, tout geste m'est effort...

Tu fermeras les yeux pour moi, sur la faiblesse en apparence, car au fond de leur puits gît la force du feu.

Et je souhaite, par-dessus tout, qu'ils cessent d'immoler chaque monde; violer chaque seconde.

mercredi 12 mai 2021

Dix sept Décembre quatre-vingt cinq

Dix-sept Décembre quatre-vingt cinq

Un coup d'épée dans l'eau?

Et si la Terre avait tremblée?

Et si quelque part en une grammaire constellée du ciel, s'alignait le récit d'un nouvel âge?

Pourtant, ce ne fût pas même l'actualisation d'un vain néant. Il n'y eut pas même un peu de merde pour m'oindre du saint sacrement d'exister. Je suis passé par une porte dérobée, ouverte au pied de biche. Il a fallu venir me chercher, dans mon cocon de rien; d'existence biologique; végétale; automatique; robot de la survie sans nulle vision sur rien, sans autre objet que soi; comme un en-soi de sensations; et puis... BASTA!

Dix-sept Décembre quatre-vingt cinq. Une seconde de plus que la seconde d'avant. Pas même un événement. Pas une conscience. Un germe? Tout juste... Peut-être, mais qui peut dire quand celle-ci s'éveille doucement?

Un animal sur Terre; une bouche à nourrir; une bouche à mourir aussi. Des cris, parmi tant d'autres cris dans une nurseries (cauchemar). Berceaux de blancs vêtus, alignés bien en rang. Rangée de piles pour le futur, pour le système économie. Pisse, couches, merde, placenta qu'on nettoie, odeur d'entrailles évincée par chimie.

Combien d'années ensuite? À vivre d'animalité? Sans souvenir. Pas un putain de souvenir de ce départ raté... Tant de larmes et pas un souvenir? D'autres se souviennent pour toi. D'autres ont souffert de ça, des nuits blanches, de l'incompréhension, de ces signes qui n'en sont peut-être pas, parce qu'on ignore la sémantique des choses qui n'en ont pas encore.

Puis, quelques souvenirs; étonnants. Comme une séquence vacillante produite à partir d'instantanés en nombre insuffisant. Souvenirs, êtes-vous le premier récit de l'âme? Sa première syntaxe?

Puis, toujours plus de souvenirs. Des souvenirs décorrélés, sans histoire, indépendants, et comme des mondes en totalité. Il en faudra encore beaucoup pour que le troisième œil s'ouvre. Il faudra la souffrance, il faudra le rejet, il faudra bien du temps à se réfléchir sur le monde en ombre en mouvement. Pour enfin se saisir de soi. Objet parmi d'autres objets. Jouet dans les mains d'un destin. Incompréhensible. Les destins sont tous incompréhensibles jusqu'à ce que la chute en dévoile le sens. Le sens est toujours pour les autres. Il faut rester absurde à soi-même, c'est une constante universelle.

Dix-sept Décembre quatre-vingt cinq. Un peu d'agitation, le déroulement d'une chaîne causale qui, comme toutes les chaînes, fera languir la liberté au bout de ses limites.

lundi 10 mai 2021

Aphorisme du poète en chantier

La poésie est le plus court chemin entre les mots et l'ineffable.

 

La poésie est le plus court chemin entre les mots et l'abîme.


Composer un poème est presque équivalent à composer de la musique: l'acte de production s'y confond quasiment avec celui de réception. L'intervalle entre la création et l'interprétation est très court. Dans le roman, ce n'est pas le cas et il faut toute la complexité de la structure narrative (et sa temporalité) pour que l'efflorescence sémantique s'y déploie. En cela, la poésie est une technique de l'être (et particulièrement de l'être langagier): elle ne produit pas l'acquisition d'un savoir-faire par lequel des artefacts reconduisent laborieusement à l'expérience; elle est une praxis, un savoir-être, par lequel l'étant s'affûte et se transforme en une modalité esthétique de l'existence.


Le poème est accessoire, il n'est que le barreau d'une échelle qu'il faut jeter après usage. L'effet de la poésie est de mener à habiter, presque immédiatement, l'espace-temps de manière esthétique: elle ourdit le regard.


Le poème n'est pas le but de la poésie.

mercredi 28 avril 2021

Les camps de la mort ou l'équation de Vérité

Petit vagabondage poétique pour faire passer le temps au purgatoire.

 

Partout je traîne poésie

Comme un wagon de déportés

La vie, la vie est une chambre à gaz

Qui fait de nous la cendre à emporter


Que contiendront de sales vers

Sur un comptoir inhabité


Ce monde est un tétraèdre sans base

Nous chutons tous et rien jamais ne se passe


Des bâtonnets sur un mur abimé

Des jours dans un calendrier

Les vaines unités

D'un temps non quantifiable


Non les humains ne sont pas fiables

Ils dansent et chantent sur les lieux d'un crime

Dorment dans les sous-sols

Et se croient sur les cimes


Voilà des jours que tu dessines

Une ombre au vide qui t'enceint

C'est l'équation de Vérité

Formule où tu t'éteins

Salle d'attente

Attendre est comme vivre:

L'instant d'un présent déporté.

Le bonheur est un livre

Qu'on oublie d'emporter.

lundi 19 avril 2021

Sur le trône immobile

 Parfois, il ne suffit pas de quelques sentiments pour faire un beau poème. Des joies rugissantes qui frayent un lit pour le passé; mais ce n'est là qu'ombre de la vérité, à vrai dire l'ombre d'une ombre.

Il ne suffit pas de quelques sentiments, surtout pas de celui, trompeur, de plénitude suprême, celui qui nous persuade que pareils à la corne d'abondance s'écoulent de notre outre d'indéfinis poèmes et des beautés en source. Le sentiment du sublime n'a rien à voir avec la chose. Il est le vide qui se comble de rien.

À un pas de la vie, et de ce monde si stable de perceptions ordonnées, gît un long précipice. Personne ne s'y rencontre. D'aucuns y  trônent fixes, tous immobiles dans l'unie chute libre.

Si toute la beauté n'était qu'un pieux mensonge? S'il n'y avait rien en ces velléités? Rien d'autre qu'une volonté sans bride et qui s'éclate en infinis reflets -- le mobilier d'un monde posé sur le vide... Un monde qui se fait croire qu'il est quelque chose non parce qu'il s'élèverait d'une idée bien réelle, mais car il se déploie depuis le simple sentiment d'une telle idée.

Un point qui se regarde de près oh si près qu'il remplit toute la surface: qu'il est la seule substance qui soit, depuis le centre aux horizons distants, du cœur de la folie à la folie du cœur.

jeudi 15 avril 2021

Derrière le verre sans tain

 Je n'ai que mes poèmes pour me tenir compagnie; et pour me tenir lieu d'achèvement. Autrement je ne possède rien: ma vie est une note de bas de page où chaque lettre ouvre sur une galaxie poétique; mais personne n'ouvre ces lettres. Personne, à juste titre, ne le fera.

J'ai de trop hautes aspirations pour exister tel que je suis et m'injecter dans la matière des formes. Comment supporterais-je la vue de mes reflets ignobles dans d'indéfinies œuvres spéculaires. On ne peut renier une œuvre, il faut accepter que c'était là, à l'époque, tout ce que l'on savait faire de mieux.

Je ne fais rien. Je me contente d'être sublimement affecté par les actions des autres. Je coule interminablement dans l'océan versicolore de la beauté environnante. J'y étouffe la flamme de mes velléités; étrangle mon égo. Produire de la beauté ce n'est pas la même chose que de l'éprouver. J'éprouve en mon purgatoire privé le parfait équilibre des abîmes les plus noirs et de cimes acméiques. Je vis dans ce parfait vertige de chutes ascensionnelles.

Personne ne saura ni ne goûtera l'absolue singularité de mes délices. Ni non plus celle, terrible, de mes angoisses. Il n'y a pas de signes pour cela, je n'ai pas les moyens d'en dessiner les routes, d'ouvrir une fenêtre sur mon désunivers. Je reste prisonnier, à perpétuité, derrière le verre sans tain de l'odieux solipsisme.

mardi 30 mars 2021

Stupide éternité

S'il pouvait pleuvoir en plein soleil, sans l'apparition d'un seul nuage, tomberaient alors de fines gouttes de liberté que je capturerais sur ma langue étirée, la bouche grande ouverte. Qu'il me serait doux alors de n'avoir plus de maîtres, pour une poignée de secondes, avant que cette liberté se transforme en poison, avant qu'elle ne m'étouffe et me noie par son débit continu.

Et si, me disciplinant moi-même, jour après jour, je parvenais à ne récolter de ce précieux nectar, que la seule quantité congrue, juste ce qu'il faut pour trouver l'équilibre de la pure autonomie?

Mais cela n'est qu'une idée... Dans cinq minutes je devrai prendre la route pour me rendre à mon "travail". Payer moi-même l'essence nécessaire à l'effectuation du trajet qui sépare ma liberté relative de l'enfermement. Et je me dis alors, dans un éclair de lucidité, que ce sont mes larmes que l'on met en bouteille et qu'on finit par vendre, moi qui les ai pleurées pour trois fois rien.

S'il pouvait pleuvoir en plein ciel bleu dénué de nuages, horizon azuré sans porte de sortie, je me tiendrais tout nu sous le radieux déluge, jusqu'à ce que pluie et larmes recouvrent mon visage et bouchent l'orifice par où j'inspire l'air qui reconstitue malgré moi la force de travail que je suis, pour le restant de ma stupide éternité.

S'habituer

En savourant la liberté présente, je pense aux heures qui suivent, à la captivité en ces murs où se construit pourtant ce que l'on ose encore nommer la vie humaine, son œuvre et l'épanouissement.

Dehors le soleil printanier s'accroche aux façades des immeubles, à la peinture des tôles, à toute cette modernité qui sait faire de l'architecture urbaine un hétéroclisme fonctionnel sans souci esthétique. Tout cela est-il bien fonctionnel? En quoi ces enseignes criardes, qui hurlent en grosse lettres leur dépendance à l'argent contribuent-elles à lubrifier mon quotidien, à rendre la vie plus aisée?

Le soleil est là, couvant de sa main ferme l'ensemble des outils humains comme une possession qu'on enserre et pourrait étouffer. En cet instant j'aimerais... Que le soleil resserre sa prise sur ces stériles érections, au sein desquelles les âmes comme une semence contenue s'étiolent sans sortie.

Tout ce printemps sexué appelle à lui les êtres, les corps animés, le conatus de chaque entité afin que se déverse en lui l'énergie de notre intention de vivre, tout ce débordement du présent qui se déverse en futur.

Mais beaucoup seront, comme moi, contenus dans les murs de la "réalité", l'unique possibilité laborieuse de nos destins. Je pense à ces gens qui, là-bas, participent de cette humiliation quotidienne, se croisent et se détestent, s'adressent à peine la parole dans un tremblement de leurs nerfs qui fait de leur métabolisme une bombe à retardement qui chaque soir implose dans le ressentiment.

Tous les jours, se tenir dans le champ de l'hostilité, sentir les regards mauvais qui éraflent la nuque, arrondir le dos pour que la moindre once de pouvoir puisse vous passer dessus sans trop garder séquelle, sans qu'explose la tension contenue et que le corps exsude, d'une manière ou d'une autre, les soirs et les week-ends.

Je pense à tout cela et par contraste avec ce soleil au grand ciel bleu, symbole de l'évasion et de la liberté, quelque chose se noue à l'intérieur de moi qui fige une circulation de ma gorge à mes tripes. Ce n'est pas qu'un mauvais moment à passer, c'est la condition de chaque jour, de chaque semaine, des années à venir.

Sourire saluer, souffrir s'abaisser, s'habituer, panser les plaies le soir, l'alcool est fait pour ça, ne pas devenir fou, ne pas blesser les autres, ne pas penser, avaler son café, ça remplace le sommeil, sourire saluer, souffrir s'habituer, s'habituer, s'habituer, s'habituer, s'habituer, s'habituer, s'habituer, s'habituer,    s'habituer,              s'habituer,                               s'habituer,                                  s'habituer,                                                            s'habituer,                                                                               s'habituer,                                                                                                          s'habituer,                                                                                                                  s'habituer,                                                                                                                    ...

lundi 29 mars 2021

Ceux de l'utopie

T'es tu bien fait les dents?

Cela soulage tant

De mordre dans une âme?

Juste pour la détruire

Réduire

En miettes

En poudre d'escampette

L'étincelle mutine

Qui démarre le feu

Allonge sur le bûcher

Ton corps qui tremble au froid des autres

Odieuse altérité

Qu'il faut brûler

Allons...

Qu'il faut brusquer

Pas de dialogue possible

Pas avec ces gens là

La réalité c'est cela

Mais surtout pas ceci

Enfin...

Ces gens de l'utopie

Qui parlent pour rien dire

De qui se moquent-ils?

À prendre chaque mot par la racine

À définir nos si belles notions

Et qu'il n'en reste rien

Rien qu'une horrible confusion

On ne peut pas parler avec ces gens là

Ils ne sont rien

Un bourdonnement gênant

Idéalistes utopistes fumistes

...

C'est bien, tout doux Ho là Hooo...

Je t'écoute

J'accueille tout ton monde

Comme s'il n'y en pouvait avoir d'autres

Comme si ce qui est un beau jour

Sera de toute éternité

Ne crains donc pas la vilaine utopie

Elle n'a nulle place où exister

Que dans les faux discours

Des ratiocinateurs

Et tous ces gens qui analysent

L'évidence même du bon sens

Nihilistes grossiers

Pédants outranciers

Qui font comme si l'on ne sait rien

Comme si plus rien n'allait de soi

Même la vraie réalité...

N'aie crainte mais

Un jour

Rappelle-toi

Que ton présent d'aujourd'hui

D'hier n'était que l'utopie.

vendredi 19 mars 2021

Vendredi après-midi

 Le ciel a les couleurs de ces toits auvergnats de mon enfance: ardoise grise aux vieux tons de cimetière. C'est la couleur de mon ennui, de ma fatigue d'être qui poursuit des buts invariablement étrangers, fixés par d'autres, tandis que je demeure incapable de m'en choisir un par moi-même. Et si je le faisais, qu'est-ce que cela changerait? Le sens d'une vie est toujours décidé par les autres, ce sont eux qui fixent les valeurs, décident de ce qui est désirable, des jalons obligés qui forment les destins. Le reste... Miettes de vie que les pigeons voraces de l'oubli dévorent en rien de temps. Les vies étroites ont pour elles d'être écologiques, bien vite recyclées.

Des yeux se fixent sur mon corps, assis, qui attend l'heure de liberté. Ces yeux couleur ardoise me tissent un gris linceul et m'insèrent dans l'ensemble anonyme des choses ennuyeuses. Ces yeux défont mon nom, ils me cousent de qualités, écheveau terne et froid que nul ne veut porter.

Dehors, la brise inconfortable ébouriffe les branches, les arbres sont nus et se détachent ineptes sur le fond du ciel. Je suis pareil à eux, inepte sur fond de jeunesse heureuse qui me range au rebut. La fraîcheur et l'ennui, contraints dans ces hauts murs, tandis que l'émeraude glacée des prairies au-dehors égaye la campagne qu'un vilain ciel toise de son bien mauvais œil.

Qu'y aurait-il à dire de soi, sans un regard qui parle à notre place?

Autobiosodie

 J'ai perdu un cheval, des ailes et quelques poils.

La clef de l'immense malle où battait mon étoile.

J'ai jeté tout cela dans le passage des choses.

Il reste un souvenir tenace de gestes ajustés: mémoire crépusculaire de façons d'exister.

Qu'ai-je bien pu enfermer dans le coffre scellé? Une autobiosodie sur fragments pétrifiés...

Le monde est sans limite au fond du coffre clôt.

Chaque âme est une clef.

Dans la mine si sombre, le réseau de mes veines

En forêts sémantiques d'atomes intriqués.

lundi 22 février 2021

Origine néant

Exercice de sécurité, brouillon d'ennui, tentative de digestion... C'est un texte comme les autres: un simple assaut technique, avant le vrai combat

 

Crevure

Éraflure d'elfe des cités / cicatrice orbe / empaquetée de chair

Vitupère insigne / Barbelés molotov / Cage aux barreaux durs / déglingue

Épars / démarre pour un futur

 

Étoile cassée / souillée / givrée / de larmes insipides

Radicelles limpides / Ancrée au champ du ciel

Terrain de jeu / de rut / de rêves écrasés / D'amours / en reconditionné


Flèche tendu de temps / impétrant qui recule / les choix ça soigne

De trop de liberté / racoler un destin / partir avec rien

Pas grave / le pire que soi existe / on continue / on continue

 

Battre le pavé / suite royale / pas maintenant / brelan / pourquoi pas

C'est mieux que rien / mieux qu'un soi se branlant

Mieux qu'un vieux lit d'hôtel / en la gare inconnue


Toute nue / de force / aveugle et transparente / violence exquise

Esquisse et trop latente / j'attends / le haut / en bas

J'attends / le vieux Godot / j'attends le vieux Godot


Dans des godasses / concrétion de pétrole / mains fines

Jeunesse d'usine / c'est beau la Chine / ça fait des vocations


Kafka dans les menottes / Départ / radeau / pour nuitée en cascades

Corde / nœud / et coule la rivière / du sang / artère

Du sang / mais sens inverse / perverse / essence


Frondaison chevelue / point de départ / origine / néant

dimanche 21 février 2021

Du centre de la Terre aux banlieues étoilées

 Je ne veux pas ma poésie actuelle, je ne la veux pas contemporaine ou à la mode d'aujourd'hui; je la veux éternelle et que l'esprit du temps s'y profile congrûment, bien en rang dans la file des ères.

J'ai la prétention large, à la mesure de mes doutes; et pour cela la chute ou bien s'extirpera du monde, ou crèvera le ciel d'un tout nouveau soleil.

Du centre de la Terre aux banlieues étoilées: mon fleuve-encre de prose.

samedi 20 février 2021

Souffrons lucides

J'ai découvert aujourd'hui une forme de poésie sur laquelle je ne suis pas porté mais dont, toutefois, j'admets l'originalité. Comme toujours, je digère. Verra bien ce qui en adviendra dans l'immense chantier.

 

 Le réel

Des mots pour le dire

Oxymores, anaphores

Y a-t-il seulement deux contraires en ce monde?

Deux choses identiques?

Répétition de la répétition

L'idée de notre idée

Tas de lemmes mit bout à bout

Des sèmes ne font pas un caillou

Les mots les choses

L'abîme entre eux -- les deux

L'alcool: un feu

Images phantasmatiques du monde

Du monde qui demeure une image

Jamais donné, toujours absent

Derrière les signes

Et sensations

Seul absolu des sensations

Sol absolu des sens, action

Des nerfs sur le cerveau

Image sur l'écran noir de songes

La toile, un film qui s'écoule

Dégueulé du labo

Crânien jusqu'à l'atome

Et puis voilà, c'est tout

Des cages

Dégage

Toute forme est une mirage

Nos sèmes un mensonge

Et ceux qui s'aiment rongent

Un os inexistant

Trop dur d'être poreux

Idée trop pure pour eux

S'y cassent les dents d'ivoire

Six as pour voir

Au fond du jeu

Au fond tout ça, n'est pas sérieux

La chose en soi rigole

Quand prose dégringole

On ne sort pas de soi

On s'y calfeutre à perpétuité

Feutre ou crayon de bois

On s'y dessine réalité

Souffrons lucides:

Le réel? Une idée!

samedi 13 février 2021

Aphorismes méta-lyriques

 Je cherche à être aimé pour l'ordre que je donne au chaos de mon âme.


Nous écrivons pour coudre de mot l'abîme en soi; déguiser nos faiblesses; se rendre aimable -- à nous-même et à l'Autre.

vendredi 12 février 2021

Marathon

 J'espère vivre longtemps. Non parce que la vie me serait une balade agréable en un environnement bucolique, oh non, mais bien plutôt parce que je dois écrire longtemps. Je dois écrire longtemps parce que mon style évolue, il grandit et s’affûte, il s'approche inexorablement de l'idée qui lui sert d'horizon -- bien qu'il en restera irrémédiablement éloigné, par un infini absolu.

Je ne sais si ce que j'écris vaut quelque chose pour quelqu'un qui aurait des critères de jugement à cet égard, peu ou prou similaires aux miens -- car après tout c'est cela qui compte, ne nous voilons pas la face: les autres ne comptent pas, leur opinion est inepte. Je ne saurai probablement jamais ce que tout cela vaut pour un double imaginaire. Après tout, n'est-ce pas là que réside la valeur et l'authenticité de l’œuvre: dans l'acharnement pathologique qui pousse un individu à poursuivre l'achèvement d'un songe infini, sans jamais savoir si la forme concrète est apte à rendre une fraction de l'éclat du rêve, et -- ce qui est pire -- sans jamais savoir si ce rêve possède aux yeux d'autres que lui ce même attribut de beauté sublime qui l'attire à s'en dissoudre.

Ce sont ces destins absurdes et humiliés, ces marathons ignorés dans le sprint des vies, qui me sont chers: parce qu'au bout de cet élan inéluctablement brisé par la finitude s'élève la figure des héros tragiques.

Ainsi, lorsque mes phrases seront devenues des plaies sur l'épiderme du temps qu'elles ont coupé, alors mon œuvre sera accomplie. C'est pourquoi je dois affûter longtemps mon style: pour qu'il tranche l'Être lui-même, de sa transcendantale vérité.

dimanche 7 février 2021

Enseigne du néant

Tentative peu-heureuse (peureuse?) d'écrire pour tuer le temps et de combler la médiocrité poétique par une mise en forme novice probablement inapte à remplir sa fonction de cache-misère... Pourquoi publier alors? Mais pourquoi diable ne pas publier un énième brouillon, un énième exercice d'entraînement? Tout ici n'est que brouillon appelant l'apothéose d'une défection totale de l'être dans l'entité de lettres...

 

 Sonne le glas sous la grêle

Demain nouvelle tentative pour mieux s'annihiler

Depuis les six fenêtres,

Ombre et lumière

      Emplissent

                        tout

                                mon

                                        vide ( . )


Il est terrible ce vide neuf

Car il n'est plus de toi

Mais bien plutôt de moi,

De lui-même et de TOUT ( ... )


Sonne le glas sous la grêle

Éclate les fenêtres

Ouvre au vent voltigeur

L'espace ici vacant ( | .|. | )

 

Ci-gît: le désir, l'absent

Qu'est la présence honnie

De ce qui se dérobe

Et peut-être déborde ( )


Quelque gouttes d'encre

En sanie du présent

Lentement je m'échancre

                                            

     Enseigne du ant (  )    

                                            

mardi 19 janvier 2021

Missi dominici


 

 

Mêlons, allons! le sang impur

Qui va tambour battant par les tempes d'azur

Versons le lait velours carmin

La pureté, déjà, s'éteint...

 

Voyez les vers au firmament

Que contingentes alluvions

Sur leurs pattes dressées

Adressent au froid néant


Et tout cela pour rien ma reine

Le froid déjà partout éteint


La braise qui crépite

Les flammes qui s'élèvent

Le foyer sans lueur

Qu'a fui le Dieu menteur


Mais c'est tout autre chose que je voulais te dire

Un message innocent, parfum de mon bouquet

Dont la rose écimée a du mal à s'ouvrir

Tant pis j'appuie ma pulpe sur l'épine

Et ouvre le passage

À ma mémoire coupée:

 

C'était, je crois, le pli de ton sourire

Le sillon de tes reins

L'ombre sous tes paupières

Un récit familier

Le rayon de lumière

Qui donne un centre au vide.


Mais d'un coup tout revient

Je suis le messager honni

Au verbe hideux d'airain

Tout enrobé de miel

 

Le conte vespéral

Qu'on tisse au coin du lit

Pour coudre les enfants

Au tissu sidéral

 

Au bout de chaque chose

Une mort aurorale

Qui vient de ses doigts roses

Cueillir le dernier râle

 

Au bout de chaque dose

Un songe sépulcral

Qui pèse dans les roses

Le poids des pierres tombales


Et tout cela roule au bas des collines

Que des bras empressés portent aux cimes

Icare, Sisyphe, portraits de finitude

Il faut bien affronter l'ultime turpitude


Se fondre en la durée

Dissoudre les caillots de temps

Que fige Éternité

Se farder de printemps

S'offrir, souffrir

Et tout haut affirmer

Ce rêve d'exister


Que savons-nous au fond du reste

À part nos quelques hypothèses

De vains fantasmes et le doux zeste

D'espoirs faisant prothèse


Presse ton ombre sous le ciel

Et danse à t'en rendre vertige

L'âme est si belle sous le déluge

Qui la refait tout immortelle


Efface l'ombre au bout du ciel

Et masque cet anxieux visage

Ton drame est une comédie

Le monde ton sublime autel

vendredi 15 janvier 2021

Be-come


 

 

 J'écume.

J'écume au froid d'être soudain hier et j'aime à en vomir des êtres de poussière:

effroi.

Être: hier...

Demain pourtant déboule à l'autre bout du temps

Et dans la gueule où roucoulent les vents s'ébroue le bel oiseau, sa robe chamarrée, d'ambre et de pourpre au cou si rassuré.

Dans les yeux qui dégouttent d'orbes irisés, je contemple un manteau tissé de mes idées.

Pourtant... Rien n'est plus hiver que l'été de mes songes.

Et lorsque, convaincu, je m'allonge, en croulement charnel dans l'herbe qui déborde:

Tout coïncide avec le néant plein de l'être, immobile et parfait dans son immonde complétude.

Dieu que me dégoûtent ces chiens qui s'enroulent au sol et cuisent aux feux célestes, immobiles gondoles.

Le vide s'échappe en sourdine, et c'est toute la farandole du possible et le grouillement des destins, l'informe gémissement des choses qui part au loin mourir.

Rien ne peut exister dans l'être plein de soi.

Ce rêve de tout un chacun ne semble vivre là que pour nous rendre aimable une idée de la fin.

Vivre: pour mourir. Désêtre là, pour naître ailleurs, et n'être, d'ailleurs, jamais ici, c'est tout cela que devenir.