L'homme en bleu s'est retourné sur la rue silencieuse
Ses yeux et sa conscience se confondaient avec elle
Etrangère offerte à tous les vents, impudique et vicieuse
Mais la rue était pleine et l'humain plein de vide
Sons, images et odeurs s'écoulaient en lui
Tel un supplice de Danaïdes
Il reprit sa route et se fit horizon
L'air l'emplissait d'une fraîcheur fugace
Il avait froid en toutes saisons
Sous les pas une espèce de matière résistante
Qui s'insurgeait en écho contre le choc des semelles
Imposait à son corps sa présence insistante
Quelque chose était par lequel toute sensation provenait
Un commerce entre les lignes de démarcation
De ce monde où seuls les limites semblaient exister
Chaque limite enfermant sa citadelle imprenable
Et mystérieuse comme l'inexistant
Enveloppée sur soi et sa source ineffable
Partout des formes aux contours marqués
Se heurtant les unes aux autres
Partout des frontières et nulle intériorité
La silhouette longiligne s'avançait dans un balancement
L'air effleurant son enceinte
Et ses murailles molles autour d'un coeur qui ment
L'épiderme soutenu par une cathédrale squelettique
Dans la nef: des organes
Et toujours des formes dans d'autres formes mutiques
Des poupées russes, voilà toute la création divine
Choses séparées d'autres choses
Et toujours des vitrines en face d'autres vitrines
Les passants déambulent dans la rue de tous les mystères
Chaque serrure formule son interrogation
Jamais encore les magasins n'ont ouvert
Rideaux et portes demeurent à jamais closes
Tout juste quelques devantures faméliques
Certaines au contraire plus grandioses
Autant de visages figés dans une mine racoleuse
Que le passant mange des yeux
Engorgés de ces images fabuleuses
Le vieil homme observe la parfaite géométrie des corps
La glace si lisse et
Les arêtes si droites de tous les sémaphores
Aujourd'hui encore rien n'est ouvert
On se demande quand le jour viendra
En regardant ses rêves prendre la poussière
Le monde à l'intérieur résonne de sa vacuité
Il faudra bien que l'Autre ouvre sa porte
Nous dise un jour ce que l'on est
"Le bonheur c'est pas grand chose, c'est juste du chagrin qui se repose" Léo Ferré
jeudi 21 novembre 2013
jeudi 14 novembre 2013
Le corps
Si l'on me demandait à
quoi sert l'esprit, ou plutôt l'éducation de l'esprit, la culture,
la réflexion, la logique et toute autre faculté de l'âme que nous
apprenons et entretenons, je dirais : à se rendre plus libre.
La connaissance et l'intelligence rendent rendent l'homme libre (si
l'on comprend la sagesse, aussi abstrait que soit ce concept, dans la
notion d'intelligence). Elles le rendent libre en ce sens qu'elles
lui ouvrent un choix de possibilités toujours accrues, l'esprit,
acquiert de la puissance d'agir, il se forge ses outils qui sont
autant de moyens pour l'action.
Maintenant si l'on me
demandait à quoi sert le corps, ou plutôt la culture du corps,
l'entraînement, le conditionnement et toute autre pratique physique
visant à éduquer le corps, je dirais : à se rendre plus
libre. Qu'est-ce que s'entraîner et cultiver son corps si ce n'est
augmenter sa puissance d'agir ? On pousse le corps dans ses
ultimes limites, régulièrement, selon un plan défini, afin que ce
qui était auparavant la limite devienne désormais la norme. Par cet
exercice la limite est sans cesse repoussée. Ainsi l'on se dote de
moyens nouveaux pour l'action, le mouvement est plus libre, plus
délié, des gestes auparavant impensables sont aujourd'hui
possibles, nous pouvons faire bien plus de choses et cette puissance
se ressent, actualisée ou non, elle est là, à la base de notre
être, infuse dans chaque membre, jusque dans les poumons qui nous
font désormais bien mieux respirer.
La culture physique n'est
pas cette absurdité vaniteuse dont quelques envieux n'ayant pas la
volonté nécessaire la qualifient. Ce sont ces mêmes gens qui vont
passer leur temps à faire l'éloge de l'éducation spirituel, de la
culture, de l'entretien de la mémoire et j'en passe, et qui sont
incapables de s'apercevoir qu'ils sont aussi un corps, que peut-être
l'esprit lui-même est une émanation de ce corps, allez savoir... C'est de
toute façon par leur corps qu'ils nourrissent leur esprit, rien ne
vient à l'esprit qui ne soit passé par le corps. C'est donc
l'expérience qui délimite le champ de la pensée et plus l'étendue
de l'expérience est vaste, plus la pensée peut se nourrir de mets
différents et ainsi croître en proportion. Entretenir son corps
c'est donc rendre possible des expériences qui n'étaient auparavant
pas possibles.
La culture physique en
tant qu'expérience nourrit l'esprit, et l'esprit peut à son tour
nourrir l'expérience en la guidant. Il est fascinant de voir comme
après des années d'un même mouvement, on se met d'un coup à
comprendre quelque chose, comprendre la douleur que l'on ne reliait à
aucune cause et qui maintenant s'explique. On se familiarise avec son
corps et l'on apprend à se servir de ses capacités de manière
optimale. On apprend aussi à optimiser ses capacités en les
développant. Cela s'appelle se rendre plus libre. Car le corps en
tant que véhicule du mouvement est structuré selon un certain
schéma, il comporte des principes à respecter, et ce n'est qu'avec
une longue pratique réfléchie que l'on peut les intégrer et ainsi
augmenter la symbiose de l'âme et du corps. Nous apprenons à mieux
nous habiter nous-même.
Le corps entier est un
langage mais combien l'oublient ou ne l'ont jamais su ? Comment
peut-on reprocher à quelqu'un son amour pour une langue ou bien le
temps qu'il passe à s'y exercer ? Comment peut-on mépriser le
résultat d'un tel effort, visible dans la grâce, dans la précision,
dans l'efficacité accrue ? Il y a une manière d'utiliser son
corps et celui qui se vante de rester ignorant sur ce point, parce
que ses bribes de connaissances instinctives lui permettent
suffisamment de choses, se ment à lui-même. Pourquoi irait-il dans
ce cas se fatiguer à lire aussi souvent, à retenir des choses
inutiles, à se poser des questions ? Parce qu'être libre c'est
savoir dans un premier temps s'habiter, et qu'ensuite, s'habiter
permet d'habiter le monde. Nos corps parlent et nous ne les écoutons
pas. Apprenons leur langue et dialoguons autant avec l'esprit qu'avec
le corps, nous avons, me semble-t-il, tout à y gagner.
L'âme en chantier
Ecrire un journal ce
n'est pas raconter qui l'on est, ce n'est pas se peindre par les mots
et offrir une identité bien formée à d'éventuels lecteurs. Ecrire
un journal n'est rien d'autre que raconter ce qu'est l'homme qui
écrit ce journal. L'écriture diarique n'est pas une
autobiographie, elle nous plie à sa forme, et c'est cette adaptation
de nous-même à ce moule qui se dévoile alors dans les phrases
rédigées. Ce que vous lisez là n'est pas le reflet de mon âme
pure, telle qu'elle existe en son essence fantasmée, libre de toute
relation, de tout pâtir. Cette âme n'a jamais existé d'ailleurs,
du moins je ne la connais pas, et je ne sais s'il est quelque part une
telle chose. L'identité se forme par un jeu de relations, dans un
système de forces dont nous sommes le centre, modelés par ces
pressions qui nous taillent un être, une forme à habiter. Nous ne
sommes qu'un, et vous n'êtes que la place que tout l'univers vous a
laissé. Changez l'univers et votre place changera aussi. Chaque
action, chaque culture que l'on acquiert, chaque communauté ou
réseau dans lequel on s'insère et dont on se nourrit, fait de nous
quelque chose de déterminé. Finalement nous sommes peut-être la
somme ou plutôt le produit de toutes les déterminations qui nous
définissent. Nous sommes le produit de toutes ces relations
systématiques et de leur influence. Nous sommes au fond la manière
dont le monde s'adapte à nous et réciproquement. Quant à savoir ce
qui est à la base de tout cela, le sujet métaphysique qui est à
l'extrémité intime de ces échanges, tout au bout de nous même,
peut-être que cela excède notre connaissance. Non pas parce que nous
n'aurions pas les moyens de découvrir ce qu'il est, mais simplement
car c'est là la fin de notre être, notre limite intangible. Nous
sommes durée et distance à la fois, nous sommes mouvement et temps.
Il n'y a rien à chercher au-delà de tous ces moi empiriques, de
toutes ces représentations de nous-même déjà enfuies dans le
passé : le présent lui-même est une représentation qui vient
de s'enfuir. Mais il n'y a rien au-delà, nous advenons voilà tout,
nous advenons... Nous ne sommes rien de plus que ces sensations qui
sont les nôtres, ces images, ces sons, ces sentiments, ces pensées
qui créent le temps en liant l'espace. Nous ne sommes rien d'autre
que ce corps à différents instants, rien d'autre que la mémoire de
tout ça et ce qui advient est le fruit d'un système causal infini,
ou bien tellement immense que nous sommes, dieu merci, prémunis,
probablement pour toujours, d'en connaître tous les éléments. Si
les hommes passent leur temps à se chercher ailleurs, à courir
après ce moi transcendantal qui les hante autant, rien de plus
normal, c'est la preuve qu'ils sont vivants, pensants, qu'ils sont à
la fois cause et effet du temps qui les différencie sans cesse. Nous
ne sommes pas des éternités, nous sommes le temps qui passe, efface
puis crée de nouveau ; totalités successives. L'éternité
c'est la mort, c'est le néant dont nous avons fait notre religion.
Nous croyons en notre négation. Tant mieux, cela veut dire que nous
croyons en l'autre, donc en nous-même, en notre propre principe
temporel, en notre devenir. L'éternel c'est la fin du vide, le Tout
plein de lui-même, partout, et ainsi sans mouvement. Nous sommes
fascinés par lui car il est notre limite, il est ce que jamais nous
n'expérimenterons, alors nous y plaçons tous nos fantasmes.
L'éternel est une limite qui voudrait nous contenir et l'homme est
comme les papillons, prêt à mourir pour abreuver son désir.
L'éternel c'est tous les désirs comblés, plus aucun vide, plus
aucun espace pour se mouvoir, c'est l'esprit repu qui s'est mis au
repos, à la mort, l'esprit qui devient ce qu'il ne peut pas être ;
l'éternel c'est un fantasme, celui de l'impossible. En effet,
l'homme à qui tout est possible ne rêve que de trouver
l'impossible, c'est à dire ce qui n'est pas. Alors il perfore la
réalité, fait advenir l'impossible qui, devenu possible, n'est plus
impossible. Il a ainsi déplacé l'impossible qui est toujours là,
quelque part, dans un autre instant à venir. Il faut chercher,
continuer, creuser l'existence comme des mineurs infatigables.
L'impossible c'est la seconde à venir et nous l'adorons car elle
maintient le mouvement du monde, elle nous maintient en vie, sur la
cadence effrénée de l'existence.
L'âme en chantier
Il y a plusieurs
mensonges que j'aimerais me faire croire à moi-même et qui, je
pense, pourraient me rendre heureux. D'abord que je ne suis pas un
simple imitateur, que mon talent ne réside pas dans la seule
synthèse de ce que d'autres ont crée. Ensuite, j'aimerais penser
qu'un jour, viendra le bon moment, le moment où je me mettrais à
agir enfin, où je n'aurais plus peur que la création soit toujours
un train en retard de ma personne; elle le sera forcément, et tant
pis. J'aimerais aussi croire, que quelque part se trouvent
enregistrées, dans une énième dimension de la réalité, toutes
nos pensées ainsi que tous nos sentiments; tout ce bouillonnement de
la vie intérieure qui reste en-dedans, caché, privé de l'espace et
de l'existence. Sans cela, pour tout vous dire, ma vie restera un
échec. L'échec de celui qui restait à jamais prisonnier de
lui-même, englouti sous ses trésors personnels et privés, et qui
peut-être, ne lui appartiennent même pas. Je suis enfermé dans
cette imagination sublime, dans
ce monde où je me joue les plus belles musiques jamais entendues,
ce monde où ma puissance n'a nulle limite, et dans lequel toute
création est instantanée, et ne s’embarrasse d'aucune
construction préalable, d'aucune autre matière que les dociles
idées. Je suis maître des idées dans ma tête et je suis un
démiurge inspiré. Mais peut-être suis-je une impasse de la vie; la
vie qui à force de s'être retranchée derrière les murailles de
l'esprit ne sait plus avancer dans le monde, se scinde peu à peu en
deux entités qui n'ont plus rien à voir. Et l'homme est au milieu,
qui cherche à maintenir le tout en équilibre, mais le monde
matériel n'offre parfois que peu d'attraits comparée au
bouillonnement ininterrompu de l'imagination qui le modèle à son
gré, sous la forme d'images sublimes. Les artistes ne sont pas des
hommes de l'esprit, ce sont des hommes de la matière, et les vrais
génies sont ceux qui ont eu la patience de rassembler les deux
mondes en un, les seuls à avoir réalisé le mariage de l'âme et du
corps dans un acte créateur qui s'étire de l'immatériel fantasme à
l'étendue réalité. Mais peut-être leur mérite n'est-il pas si
grand, peut-être qu'enfermer en soi tant de trésors sans pouvoir
les partager, sans pouvoir les enregistrer dans les dimensions du
temps et de l'espace, est un supplice que nul humain ne peut endurer
bien longtemps. Tel est mon supplice aujourd'hui. La nécessité de
jeter dans la matière ces idées exquises est devenu vital car je me
ronge de l'intérieur; mais le temps ne cesse de filer, et les
excuses de s'accumuler. Je suis un consommateur, dans tous les sens
du terme, je consomme même ma propre puissance créatrice, jusqu’à
à l'étouffer dans l'oeuf. À peine un embryon d'oeuvre a-t-il
jailli que je suis rivé sur ce spectacle interne, les yeux dans le
vague, muré dans la passivité la plus totale, maintenant juste
assez de force pour que se projette en moi cette fiction
cinématographique de ma vie pensée. Je ne suis dès lors plus bon à
rien, je n'ai de cesse de pourchasser ce sentiment, tout en sachant
que toute tentative de le susciter de nouveau sera un échec :
le premier jet est le plus fort, celui qui vous emporte avec le plus
de vigueur. Circulez, il n'y a plus rien à chercher ici, le tour
s'est joué, le spectateur que je suis est pour un temps repu, repu
de ses propres talents, de sa propre beauté; a-t-elle seulement
existé pourtant?
J'aurais beau raconter
tout cela avec ce journal, comment pourrais-je rendre ces musiques
qui m'emportent tout au long de la journée, qui s'emparent même de
mes rêves et me font croire que mes propres créations sont celles
des autres. Je cherche au réveil l'auteur de ces paroles que j'ai
entendu chantées durant mon sommeil, mais ces paroles n'existent
pas. Jamais je ne pourrai entendre cette musique de nouveau, sauf en
la rejouant moi-même intérieurement, mais là seulement, l'esprit
est excédé par la puissance de la matière; cette matière qui est
de la même étoffe que lui, une énergie en somme, mais
cristallisée, concentrée à tel point qu'elle prend forme et
s'incruste dans l'espace des phénomènes. Je peux assourdir autant
que je veux mon âme par cette musique, jamais je ne ressentirai
autant de choses que lorsque je l'entends réellement, s'infiltrer
par mes oreilles, résonner dans mon corps qui transmet alors
l'énergie en vagues immenses à mon esprit drogué. Il y a bien des
choses que je ne peux vous rendre ; je dis bien rendre car il
s'agit de remettre dans le monde ce qu'il vous a permis de créer.
C'est vous qui donnez à mon imagination, à ma conscience, la
matière qu'elle va pétrir de ses formes. Je vous dois tout mais
jamais ne rend rien; tout juste ces quelques lignes, indignes et
impropres à reproduire en vous l'explosion mirifique d'harmonie
merveilleuse qui fait valser mon âme. Il est de mon devoir de vous
rendre quelque chose, un jour, d'une manière ou d'une autre. Il y a
des lignes, quelques phrases, par mes mains écrites, qui, lorsque je
les lit, me procurent à nouveau, avec force intensité, le sentiment
qui les a vu naître; mais je crois savoir qu'une même cause ne
produit par sur tous les mêmes effets, et mes vers comme ma prose
sont autant de coups d'épée dans l'eau, autant de ponts vers ma
féerie intime qui ne supportent pas vos pas. Nous restons
irrémédiablement l'un en face de l'autre, moi avec mes prétentions
au sublime, et vous avec votre seule croyance ou plutôt vos doutes
et votre réalisme. Et vous avez raison. Je n'accorderai ma confiance
à quelqu'un qui prétendrais les mêmes absurdités suffisantes que
parce que je sais ce qu'il en coûte d'être prisonnier de l'esprit.
Alors je l'écouterais, et je saurais que j'ai un frère, et que nous
sommes d'autres à demeurer demi-génies, complets néants, par
manque de volonté, par absence de courage et par flemme. Nous
sommes plusieurs à se consommer de l'intérieur, enfants du siècle
à l'esprit obèse, gras de spectacles, d'oeuvres en tous genres,
gavés d'images et de constructions humaines, rivés sur le siège de
la conscience, réduit à n'être plus qu'un oeil immense, des
oreilles, un nez ainsi que des membres, surexcités, à fleur de
peau, camés à toute sensation que nous transformons en un sentiment
que nous suçons jusqu'à la moelle, que nous consumons jusqu'au
bout, faisant brûler la vie comme des cheminées d'où nulle fumée ne s'échappe. Après ça il ne
reste que des cendres que nous gémissons dans vos oreilles en autant
de plaintes et de promesses de grandeur, dont la seule trace que vous
pouvez peut-être saisir, réside dans la chaleur de nos propos, dans
l'intensité de notre souffrance et dans le chaos qui nous habite et
nous dévaste en-dedans. Ces mots sont la musique qui s'échappe de
ma cellule intime, ils sont comme une petite mélodie que
laisseraient filtrer les murs de l'esprit, vous en saisissez quelques
notes mais elles sont tellement faibles que vous n'êtes pas vraiment
sûrs. Qu'entend-on? Est-ce beau? On ne saurait dire, c'est trop
lointain... Comme si la musique venait de chaque recoin de la cellule
pour se concentrer en son centre au lieu de s'échapper tout autour.
Voilà ce qu'est l'esprit de ma génération, un trou noir se
nourrissant de tout et surtout de lui-même. Peu à peu, se
concentrer en soi en un point de plus en plus infime, s'échapper
sans cesse vers l'infini, c'est devenir plus rien, c'est tendre vers
le vide. Je suis un précipice, un abysse, voilà pourquoi j'ai le
vertige, car chaque abîme est comme un point qui me ramène à moi,
qui m'appelle et m'ordonne de retourner là d'où je viens, de ces
trous sans fond que savent être les consciences d'aujourd'hui.
Comprenez-vous maintenant
pourquoi il me faut écrire? Car si l'un d'entre vous saisit mes mots
et parvient à reconstruire son propre reflet avec ceux-ci, alors
cela signifiera que je ne suis plus seul, qu'il y a un fond à mon
gouffre et que vous existez en-haut, pas aussi loin que je ne l'aurais
pensé. J'aimerais tellement que vous soyez là et que vous me
tendiez la main. Je me suis même mis sur mon trente et un pour vous:
je suis vêtu de mes plus belles paroles.
Inscription à :
Articles (Atom)