mercredi 12 mai 2021

Dix sept Décembre quatre-vingt cinq

Dix-sept Décembre quatre-vingt cinq

Un coup d'épée dans l'eau?

Et si la Terre avait tremblée?

Et si quelque part en une grammaire constellée du ciel, s'alignait le récit d'un nouvel âge?

Pourtant, ce ne fût pas même l'actualisation d'un vain néant. Il n'y eut pas même un peu de merde pour m'oindre du saint sacrement d'exister. Je suis passé par une porte dérobée, ouverte au pied de biche. Il a fallu venir me chercher, dans mon cocon de rien; d'existence biologique; végétale; automatique; robot de la survie sans nulle vision sur rien, sans autre objet que soi; comme un en-soi de sensations; et puis... BASTA!

Dix-sept Décembre quatre-vingt cinq. Une seconde de plus que la seconde d'avant. Pas même un événement. Pas une conscience. Un germe? Tout juste... Peut-être, mais qui peut dire quand celle-ci s'éveille doucement?

Un animal sur Terre; une bouche à nourrir; une bouche à mourir aussi. Des cris, parmi tant d'autres cris dans une nurseries (cauchemar). Berceaux de blancs vêtus, alignés bien en rang. Rangée de piles pour le futur, pour le système économie. Pisse, couches, merde, placenta qu'on nettoie, odeur d'entrailles évincée par chimie.

Combien d'années ensuite? À vivre d'animalité? Sans souvenir. Pas un putain de souvenir de ce départ raté... Tant de larmes et pas un souvenir? D'autres se souviennent pour toi. D'autres ont souffert de ça, des nuits blanches, de l'incompréhension, de ces signes qui n'en sont peut-être pas, parce qu'on ignore la sémantique des choses qui n'en ont pas encore.

Puis, quelques souvenirs; étonnants. Comme une séquence vacillante produite à partir d'instantanés en nombre insuffisant. Souvenirs, êtes-vous le premier récit de l'âme? Sa première syntaxe?

Puis, toujours plus de souvenirs. Des souvenirs décorrélés, sans histoire, indépendants, et comme des mondes en totalité. Il en faudra encore beaucoup pour que le troisième œil s'ouvre. Il faudra la souffrance, il faudra le rejet, il faudra bien du temps à se réfléchir sur le monde en ombre en mouvement. Pour enfin se saisir de soi. Objet parmi d'autres objets. Jouet dans les mains d'un destin. Incompréhensible. Les destins sont tous incompréhensibles jusqu'à ce que la chute en dévoile le sens. Le sens est toujours pour les autres. Il faut rester absurde à soi-même, c'est une constante universelle.

Dix-sept Décembre quatre-vingt cinq. Un peu d'agitation, le déroulement d'une chaîne causale qui, comme toutes les chaînes, fera languir la liberté au bout de ses limites.

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