dimanche 24 juillet 2016

En ton nom

- "C'est bizarrement fait la vie hein..."


- "C'est pour qu'on ait toujours quelque chose à surmonter ma fille, des raisons d'être heureux parce que ce n'est pas donné, pour que la métamorphose continue par le devoir qu'on a à toujours se changer, à toujours devenir plus et autre, cette mémoire du chemin que sont les humains.

C'est pour que la joie soit un met raffiné et prisé, pour qu'existe la distance dans laquelle se love la liberté (ce qu'on nomme ainsi du moins), pour que par le vide advienne le mouvement nécessaire à la surprise, à tous les sentiments qui sont des élans et des aspirations.

C'est pour que toi et moi puissions nous aimer dans un possible, pour qu'il existe autant de chemins que l'on peut imaginer (et bien plus encore), pour que rien ne soit définitivement ordonné, immuablement reposé en soi-même, c'est pour que les mondes se déploient en tous sens, pour que tes cheveux reprennent leur danse.

C'est une chienne pour qu'on veuille la dompter, farouche pour qu'on désire l'apprivoiser, indépendante et capricieuse pour qu'on aime la posséder, suffisamment douce pour qu'on aspire à la quitter, et puis pleine d'amour afin qu'on ait la liberté de la détester un peu, beaucoup, passionnément.

C'est pour qu'on la regarde et qu'on parle d'elle simplement...

Pour qu'on trouve des raisons à ce qui n'en a pas."

jeudi 21 juillet 2016

Ontologie relativiste

La chauve-souris qui ressent le monde en ondes acoustiques, la mouche dont la vitesse d'appréhension (et donc la perception du temps) excède largement la nôtre, la taupe aveugle, la plante dont l'interface sensitive demeure pour moi impénétrable...

Tous ces êtres, toutes ces formes transcendantales qui, reliées à une même chose, construisent pourtant un monde irréductible au nôtre, une représentation unique liée à la singularité de la relation qui les unit à un réel indéterminé, docile et protéiforme.

Et il est encore de dogmatiques histrions qui parcourent le monde en prêchant la vérité, leur vérité, comme s'ils détenaient dans la finitude de leur relation privée avec le réel, l'unification absolue, l'essence tant phantasmée de toute chose, la chose en soi.

Ce dont nous avons besoin, c'est d'une ontologie de la relation. Non je m'égare, nous n'avons nul besoin d'ontologie, peut-être simplement de "tout sentir de toutes les manières"...

Car ce qui est à chérir dans une ontologie relativiste, c'est la diversité des mondes à laquelle chaque objet participe, chaque point d'une maille sans haut ni bas.

Moi qui ne suis pas nitzschéen (ni même rien du tout d'ailleurs), je vais aller dans le sens du philosophe au marteau: j'impose en ce monde la valeur qu'est la diversité, la nécessité pour moi que toutes les réalités possibles puissent cohabiter, afin que se dérobe toujours plus loin, l'ornière de la vérité, le danger d'absolu qu'elle représente.

Arcifère sans cible

Certains s'adonnent au rhum et d'aucuns au rosée
Tandis que moi économe, j'ai peur de trop oser
Lorsqu'en tes rêves d'hommes je voudrais m'imposer

Mon âme, mon âme - quelle étendue recouvre ce concept?
S'avance là sans armes, dans ses propos ineptes
Tu seras mon grand drame, mon ivresse incorrecte

Ah poètes de déroutes, toujours à parader dehors
À crier fort le doute, à l'extérieur du corps
Quand les autres s'en foutent, et voudraient les voir morts

Tu m'as tué, étripé mutilé
Tu m'as donné ce verbe illimité
J'ai inhumé mon coeur en ton pré illuné

Les musiques qui vibrent détruisent d'anciennes formes
Me poussent à me croire libre, et par delà les normes
Dans ta mélancolédie ivre, mes illusions s'endorment

Et ça coule dans les veines, comme un alcool mauvais
L'impuissance vaine, et le remord larvé
Ça frotte et puis ça traîne, un destin énervé

Lorsque le venin arrive en haut
Quand mon chagrin monte au cerveau
Jaillit alors ma prose de tous mes caniveaux

Emonctoire souillé, ma main danse et s'agite
Mes vestiges fouillés, à tous les vents s'effritent
Le corps veut expulser, toute l'âme détruite

Tu m'as aimé, ému et remué
Tu as fait de l'enfant un homme plus complet
J'ai refusé tes voeux, pour ça je suis damné

Mon coeur est condamné, ma voix est enchaînée
Mes doigts sont ligotés, mon coeur apprivoisé
Je me vois là disposé
Sous un regard intranquille

Regarde mon existence vile
Lorgnant avide sur les merveilles
Qui gisent sous tes cils
Et tiennent en leur inétendue mon amour en éveil

Insomniaque troisième oeil
Tu enfiles les deuils
Sur le collier de la mémoire
En motifs brodés par les Moires

Un jour se penchera le soir
Et tout redeviendra noir
Comme ternissent les espoirs
Et se consume l'oeuvre d'art

Un jour se réuniront les possibles
Dans un instant indicible
Arcifère sans cible
Se rendra sous tes cils

dimanche 17 juillet 2016

En quarantaine

Eh toi! Homme sans localité, chose sans qualité: es-tu vraiment un homme d'ailleurs?

Peux-tu me dire ce que sont ces sensations qui roulent et grincent dans le fond de mes entrailles, font de mes expériences du sable avec lequel je m'acharne à construire des châteaux que tous les vents balayent? Nul autre lieu d'existence que l'écoulement du présent où rien ne dure, rien ne demeure. J'habite dans l'impermanence du devenir qui arrache un à un mes membres et mes engouements, dissout dans l'écho des souffles expirés chacun de mes élans. Aspirer à l'éternité, toujours, comme la vie aspire à la mort. Mais pourquoi? Et pourquoi la question du pourquoi?

Curieux humain qui bâtit sa sérénité sur une éternité immuable et contre-nature, que tout dément à chaque instant. Unités inexistantes dans lesquelles nous aimerions habiter comme si nous pouvions les délimiter, et les figer hors du cours fluent du chuintement du temps. Dès la maternelle nous devrions apprendre à vivre dans les eaux tumultueuses où se défont les choses, où un objet n'a pas la place d'exister, où seules tintent les notes fondues des sensations qui nous acheminent jusqu'au bout de nous-même. Pourquoi ne nous avez-vous pas appris à être heureux dans le cours fluide des sillons de vie, pourquoi ne pas nous avoir appris à chérir le deuil autant que la naissance, la destruction autant que la construction (si tant est qu'on méprise suffisamment le relativisme pour ne pas confondre les deux choses)?

Que serait un enfant qui apprendrait à vivre en acceptant le désaisissement qu'effectue le temps sur chaque chose? Je me prends parfois à rêver accoucher d'un tel monstre de beauté... Moi qui ait préféré la stérilité des concepts abstraits, au ventre chaud et grouillant d'une femme, la fractale des questionnements (motivée par l'illusion des réponses bien déterminées) au tournoiement délicats de tes cheveux frisés...

Aujourd'hui je me trouve idiot et usé par toutes ces errances, seul, avec autant de réponses qu'une algèbre sans chiffres, dépourvu de l’oxygène de ta peau et de la quiétude aphasique des moments pleinement vécus.

Haha! Qu'il est beau le héros tragique, même pas héros mais simplement handicapé par son ego, cette boursouflure de l'être qu'il faut souffrir pour le simple plaisir de la voir un jour mutilée et de goûter enfin la légèreté d'être au monde s'en s'embarrasser d'un soi trop pesant; d'un soi qui aspire le regard devant chaque reflet, d'un soi qui projette en avant de lui un avenir, anticipe ses effets, et toujours, jette un oeil anxieux et mélancolique sur les traces pourtant intangibles de son passage. Merci Aurore, merci d'avoir détruit cette ombre démesurée, ce prédateur de toute existence unifiée.

Mais je vais encore aujourd'hui, avec une béance à l'âme, sentant comme un membre fantôme cette entité enfuie qui se débat encore dans ses moignons et m'empêche par ses cris, de goûter pleinement le repos illettré.

Je reconnais aujourd'hui ce grincement pour ce qu'il est: la carriole rouillée où se tiennent enfermées, mes questions de toujours, elles que j'ai mis en quarantaine mais qui continuent de peser sur mon destin comme le rocher d'un Sisyphe.

JE VOUS LIBERE, JE VOUS LIBERE

Et toute les libertés commencent par des revendications, par des mots et des cris, puis se réalisent enfin dans le silence des gestes déliés, dans l’étincellement mutique des sensations, dans le courant du temps sans raisons.

lundi 11 juillet 2016

Aller viens donc!

Comme une sentence de mort aux essences d'opiacés, sur ma peau j'ai senti passer
Tes cheveux longs qui m'ont frôlés, et ton sanglot qui m'a blessé.

On a beau souhaiter oublier, rien de tout ça jamais ne disparaît:
Les rires qu'on a partagés, et les fêlures qu'on a rangées.

J'ai beau frapper l'air de mes poings
Mon adversaire est déjà loin,

Dans les débris d'amours fânés,
Dans les mélodies essoufflées.

Dis moi ce que le temps veut bien épargner
Dis-moi si ton désir d'antan n'a pas été rongé.

Comme un voyage qui m'emmène au loin
Je vois le monde en passager;

Embarqué dans ce curieux train
Nulle bataille je n'ai gagné.

Aller viens donc,
Viens dans mes songes me rejoindre!

Aller viens donc,
Dans mes mensonges au goût de cendres!

Comme un glas qui annonce les trépassés, mon chant résonne et viens tinter
Dans mes oreilles aux échos glacés, dans mes tentatives mes décès.

J'ai soulevé bien des étoiles des cieux lointains aux couleurs diaprées
Je n'ai récolté que des voiles, et des linceuls de vérité.

Est-ce que tu entends de ton jardin
Les coups de marteaux de mon chagrin?

Est-ce que tu pleures un peu pour moi
Est-ce que tu meures un peu de moi?

Aller viens donc,
Nourrir la mort avec tes idées!

Aller viens donc,
Ouvrir ta porte à l'éternité!

J'ai combattu les évidences, à coups d'illusions un peu rances
J'ai rebroussé tous les chemins, je m'achemine vers ma naissance.

À force de ne plus vouloir, j'ai peur de ne plus jamais pouvoir
Choisir un possible destin, prendre un chemin juste pour voir.

Est-ce que t'entends mes cris la nuit, ceux qui perforent les cieux noirs
Et si j'ai fait tout ça pour rien, je m'en remets aux Moires

En attendant je siphonne le doux poison de ma mémoire
Je m'y enivre jusqu'au soir, je m'y abreuve pour t'y voir

Tant pis si elle est triste cette histoire
Moi j'y naufrage tous mes espoirs

Aller viens donc,
Mordre ma chair et boire mon sang!

Aller viens donc,
Inhaler mon air et devenir le temps!

À l'heure où les gens pleurent chez eux, et qu'ils appellent leurs amis
Moi je demeure avec mes yeux, la solitude est mon abri.

Depuis que ta voix est partie, les directions se sont enfuies
Il n'y a plus que des longues nuits, et ce brasier qui rugit,

Qui m'enferme dans des images et me fait vivre en des mirages
Obstrue mon coeur et m'ensauvage, me fait traverser toutes les cages.

Aller viens donc,
Crever la nuit de tes longs soupirs!

Aller viens donc,
Ressusciter en moi le plaisir!

mardi 5 juillet 2016

En paix?

Ahhhh, relachement, beauté du désaisissement, repos, paix, équilibre mérité.

Toutes mes questions se sont brisées, comme une écume stellaire qui vient s'essouffler sur des grèves galactiques. Sur Betelgeuse et Altaïr les deux parts de mon coeur. D'aucuns ont vu mon âme dans les traits de Cassiopée.

Ballotté vers de lointains rêves, lumières aux noms exotiques, je m'accompagne de mes pensées solitaires et belles, enveloppé de souvenirs de toi qui tous répondent en écho au chant omniprésent du cosmos.

Je suis soulagé de tout ma chérie. Soulagé de ne plus penser aussi gravement qu'avant, sans avoir un sourire de dérision sur la face. Soulagé de ne plus chercher de réponse. Un temps pour le tourment, un temps pour le repos.

Pourtant, il y a toujours dans mes sourires une souffrance à la base, et dans chaque tourment, un plaisir détaché qui reluit.

Connais-tu Alpha Persei? Moi non plus, mais je contemple le mot, comme s'il contenait en lui les étoiles de mille univers, que je siroterais distraitement.

Il y a, dans le vide entre un noyau et ses électrons, la place pour combien de mondes? Combien d'univers contenus à l'intérieur d'un proton, combien d'espaces dans un fragment d'espace?

Sirius est là, je la vois qui chute, mais nous ne sentons rien puisque nous chutons tous. Dans quelle déclinaison t'ai-je perdu...

J'accepte l'ironie du destin. Il faut bien de l'ironie pour rire un peu. Je peux bien rire de moi, cette histoire est tortueuse et captivante, malgré toutes ses longueurs.

Je suis bien tu sais, parfois, dans la chute de mes questionnements, dans le vertige du néant qui m'aspire vers la plénitude de l'instant aphasique. Je suis bien tu sais lorsque je perds mon langage.

Je suis une galaxie qui perd ses secondes en ton puits béant. Ma lumière te revient depuis longtemps, puissent mes regards ne jamais plus me parvenir en retour.

J'abandonne mes désirs vers ton sable étoilé, vers tes promesses et tes désirs de vie.

Peut-on se désaisir de soi? Parfois, je me demande, lorsque je ne suis plus pour moi qu'un lointain objet de curiosité passagère.

Je sais que tu ne penses plus à moi, ou je feins de le savoir. Oublions-moi, laissons là cette écume sur les plages sidérales, laissons la matière de cette âme et de tout cet amour, voyager vers l'ailleurs, là d'où elle provient, et où elle tend naturellement à fuir.

Je suis paisible. Mais ô combien ce genre de phrases a plus d'un sens inévident.

Tu es intelligente et as toujours su me comprendre avant moi.

Vega, Deneb, Aldébarran, puissé-je filer là-bas.

Il n'y a nul endroit en l'univers ou tes rayons ne parviennent...