vendredi 30 avril 2010

Ciel en sauce

Vivre un peu ou vivre toujours, tous ces matins gris où nos âmes ruisselent contre les murs tel la pluie, tous ces matins bleus aussi, où le soleil éblouit en dévorant chaque recoin d'une chambre qui ouvre ses volets.

"Les gens sont morts!" crie cet enfant dans la rue. "La fin du monde est pour hier..." entonne cet illuminé. De toute façon on ne leur prête pas attention, de toute manière ils ont raison. Nous n'écoutons pas la raison, nous on écoute simplement la radio, on écoute la télé, c'est à dire notre conscience empruntée, notre vérité factice, tous ces mensonges qu'un jour quand même il faudra rendre.

Voir chaque jour la lumière se répandre à travers la même fenêtre, à l'intérieur d'un même cube, autour des mêmes personnes. On est sédentaire nous autres dorénavant et c'est bien cela qui nous a perdus. Combien de fois je me suis enfuit par cette fenêtre, celle de l'esprit, pour retrouver cette vie nomade, celle qui s'efface petit à petit, cette vie si humble qui n'est qu'une caresse sur le monde.

Vivre ces jours et vivre les autres, ne plus distinguer ni les couleurs, ni les humeurs, ni les messages. Vivre toujours au même endroit c'est un peu mourir, j'ai toujours pensé que la vie était mouvement, d'ailleurs le temps lui-même n'est qu'une définition, une modalité du mouvement.

Vivre cent ans ou un instant, vivre d'avenir ou d'un sourire.

De toute façon c'est l'alternance, cette différence qui réside entre le bleu et le gris, entre le mouvement et l'inertie, entre la joie profonde et la mélancolie, c'est cette différence qui donne toute sa saveur à la vie. Un jour petit et l'autre grand.

La vie pèse à mesure que nous la portons, il faut bouger, il faut souffler, la vie s'envole dans le mouvement de nos corps et danse au rythme de nos esprits d'hommes.

Je mélange ce gris et un peu de bleu, et je crée un ciel où être heureux.

lundi 26 avril 2010

Sentiments

Trois coups portés à l'univers,
Deux sous d'amour que l'on enterre,
Un joli cou pour mes yeux fous.

Partout ailleurs, un peu ici,
S'envolent mes heures que tu pétris.
L'aurore se coud sur tes habits.

Un peu paumé, voire à l'envers,
Toujours touché par tes grands airs.
Tu craches mon spleen de tout ton coeur.

De vous à moi, qu'attendez-vous,
Un coeur entier ou pas du tout?
On ne consomme pas l'homme par quartier.

Certes vous faites le monde tourner,
Mais nos actions toujours se paient...

vendredi 23 avril 2010

Aller retour

Dans un crocus, un hibiscus,
Faisant du moins un petit plus.
Dans ta présence, un grand plaisir
Et dans l'absence, de vieux souvenirs.

Mes rêves libres n'ont pas d'attaches,
Et ces vers ivres te font la manche.
Plutôt s'enfuir qu'être martyr,
Mais tes désirs me font languir.

À nous, à deux,
On s'imagine,
Toi dans mes yeux,
Moi dans ta bruine.

S'échappant fous de tes yeux feux,
Les mots s'en vont toujours par deux.
Ta voix les rend tous amoureux,
Pendant que moi, je vis en eux.

Un long sourire pour mieux s'enfuir,
Mieux vaut en rire que d'en frémir.
Je t'aime un peu, rien à redire,
Mais pas assez pour en mourir.

Toi, de loin...

La vie vous détache des choses parfois. Lentement, imperceptiblement. On se perd et l'on perd les choses qui attachent les autres au monde, on perd les gens, on est soi-même, tout seul...

Je me demande si les liens rompus peuvent un jour être renoués... Et finalement, ce que les gens aiment chez moi c'est ce détachement perpétuel, cet ailleurs qu'ils imaginent sans jamais pouvoir vraiment l'atteindre. Pourquoi changerais-je?

Les gens m'accrochent parfois, et puis ils se retirent. Alors moi je m'envole vers mes contrées, vers mon combat, vers mon quotidien, mon chemin qui est tout pour moi. Je vis ma vie d'un égoïsme impensable, je rebondis d'humains en humains, de lieux en lieux, de mélodies en symphonies.

Mais il y a son visage en surimpression sur tous mes paysages. Ses yeux qui jettent un feu sur les coins froids de mon esprit. Elle veut revenir, elle veut comprendre et je n'en sais rien.

Marcher, de nuit comme de jour, passer à travers le temps, c'est ma seule tâche, celle que j'ai choisi, et si l'on suit alors peut-être qu'une fois au moins, une fois encore, je dirais oui.

dimanche 11 avril 2010

Notre corps

Notre corps est notre meilleur allié, avec l'esprit, pour parvenir au bonheur. Pas dans le sens conformiste du terme où notre corps doit devenir le reflet d'un canon esthétique bombardé à longueur de journée par la publicité et les manigances du monde économique. Non dans le sens que notre corps est notre identité au même titre que l'esprit.

Beaucoup de gens rêvent de n'être que pur esprit, de s'abandonner à la pure réflexion, la pure conscience. Je vois plusieurs objections à cela.

En premier lieu, il est légitime de s'interroger sur la possibilité d'une conscience sans perception. Or, d'où proviennent nos perceptions? De nos sens. D'où proviennent les sens? De notre corps recevant les stimulii extérieurs et du cerveau les traitant pour alimenter la conscience. Peut-il y avoir une conscience sans ces stimulii, peut-il même y avoir une pensée? La question reste ouverte.

Ensuite, il me semble totalement illusoire et voué à l'échec, de courir après un bonheur qui aurait pour condition d'existence, le reniement d'une partie de nous-même. En effet, jusqu'à preuve du contraire, l'Homme est fait d'un corps et d'un esprit (le problème de savoir jusqu'à quel point ces 2 entités sont séparées ou bien ne forment les 2 faces d'une même entité reste à débattre). On aura beau vouloir se débarasser du corps toute notre vie, il n'en disparaîtra pas pour autant. En outre il agira même directement sur l'esprit, le mental (et inversement) d'une manière aussi certaine et complexe que le soleil agit sur la Terre.

Au regard de ces 2 arguments (et particulièrement du second), il me semble évident qu'il faut apprendre à vivre avec son corps, à le connaître et à le faire évoluer afin qu'il offre le moins de résistance possible à l'esprit et inversement. Nous vivrons toute notre vie avec notre corps, nous n'y pouvons rien, il est nous, alors apprenons à nous connaître, à nous aimer et ainsi à progresser, ce qui constitue, selon moi, le seul moyen d'atteindre le 'vrai' bonheur.

Dans cette quête d'un corps 'ami', comme pour l'esprit, le temps s'avère être un allié précieux, une sorte de levure qui fera monter la pâte petit à petit. La patience est un maître mot et l'appropriation de son corps est un projet de tout une vie. Les erreurs passées sont rarement irrattrapables et chaque situation nous délivre potentiellement un message que nous devons apprendre à déchiffrer. Même dans la blessure il y a matière à progresser.

Faire travailler son corps requiert un savant dosage entre l'effort progressif et l'effort brutal. Cette maîtrise grandit au fur et à mesure de l'expérience et la diversité de l'entrainement est un ingrédient indispensable à la réussite d'une telle entreprise.

Aimer son corps et l'entretenir est un devoir qui devient rapidement un plaisir pour qui se respecte. Aimer son corps passe par la performance que celui-ci (en conjonction avec l'esprit) nous permet de réaliser mais aussi par l'esthétique. Il ne s'agit pas de tomber dans le travers du corps réifié, du corps 'en série', objet désincarné de fantasme de masse (c'est à dire de fantasme pour tout le monde mais surtout pour personne...). Avoir un corps que l'on trouve beau est un jugement purement subjectif dont les critères peuvent varier du tout au tout d'un individu à l'autre. Aimer son corps d'un point de vue esthétique n'est pas une honte et ne fait pas de vous un individu superficiel. Tout comme il est indispensable de se respecter et de s'aimer (psychologiquement parlant), cela l'est tout autant d'un point de vue physionomique. Sachez travailler votre corps avec amour et raison, sachez aussi accepter ces particularités et sachez rester maître de celui-ci.

Comme dans tout exercice, dans toute progression, des moments de stagnation sont inévitables, voire des moments de découragement et de fatigue. Il est impératif de savoir être à l'écoute de son corps. Prendre du repos n'est pas une honte, n'est pas un échec et n'est pas un retard que l'on devra rattraper par la suite. Savoir se reposer est le meilleur moyen de franchir un palier, de reprendre courage et détermination, de revenir plus fort. Le repos est le moment où le corps se construit. Il faut savoir gérer ces périodes de 'jachère'. Attention toutefois, ceci ne veut en aucun cas dire qu'il faut sans cesse s'écouter, que le message provienne du corps (fatigue, douleur) ou de l'esprit (peur, abandon), il est nécessaire de savoir quand pousser son corps et quand dépasser ses limites. Il existe des douleurs qui sont 'bonnes' et que l'on ne doit pas éviter.

Enfin tout comme l'Homme au complet (corps et esprit) ne forme qu'une seule entité complexe, le corps lui-même ne forme qu'une seule et même entité et son entrainement doit se faire comme tel. Se concentrer sur une partie du corps n'est pas tout le temps mauvais en soi, tant que cette attention spéciale vise à combler un déséquilibre ou à pallier une déficience.

Créativité, patience, curiosité et personnalité sont les maîtres mots d'un entrainement réussi. Sachez être un individu complet afin que la partie n'altère pas le tout.

samedi 10 avril 2010

Le combat

Le combat, c'est quelque chose que les gens veulent comprendre.
Pourquoi tu fais ça? Qu'est-ce que tu en retires? N'est-ce pas complètement régressif?

Bien sûr il existe un côté animal dans le combat mais c'est aussi une sublimation de cette animalité, la victoire de l'Homme sur son instinct, sur ses peurs, sur l'animal qui est en lui. Une victoire ou plutôt une alliance.

Dans le combat il y a d'abord ces moments de tensions où l'on ne perçoit plus que l'échéance, le moment où tout va se jouer, où la violence va exploser. On se demande si on sera à la hauteur, si on ne laissera pas sa petite entité s'effriter face à l'autre, l'univers nous engloutir et faire que l'on n'existe plus. On a peur dans ces moments là. Une peur brève et intense qui vient du fond mais qui ne dure pas. Ca c'est les semaines, les jours qui précèdent l'affrontement.

On se laisse aussi galvaniser par des images que l'on observe, des symboles que l'on s'approprie et l'on se sent grandir, une aura de puissance émane de nous, on sent le corps et tous les muscles prêt à exploser, on se sent prêt...

Ces deux états d'esprit se passent le relai, lentement on se prépare, dans la tête, à aller provoquer cette violence qui fait tant peur.

Etre un homme je crois, c'est entre autre être libre d'être à tout moment, ne pas laisser autrui vous écraser.

Lorsqu'on entre dans la salle où se déroulera le combat, on voit les gens qui sont là en spectateurs, eux qui viennent nous voir nous, combattre un autre homme. Et c'est la crainte de ne pas être à la hauteur, la crainte de sa propre réaction face à l'adversité, l'angoisse de ne pas être bon, photogénique, propre, efficace.

Ensuite il faut s' échauffer un peu et là monte un sentiment de puissance, de rage. Plus rien ne peut arrêter ce qui a été enclenché, l'envie d'en finir se fait plus intense, on brûle de monter sur le ring, d'échanger les premiers coups, et de libérer cette force que l'on sent dormir en soi.

C'est le moment, les juges appellent mon nom, je monte sur le ring et salue le public, les juges. Je suis chez moi! Ce ring est à moi! On a plus aucune peur alors, il faut simplement contenir ce déchainement qui se fraie un chemin à travers nous, le contenir quelques secondes de plus, jusqu'au moment où la cloche va retentir.

L'adversaire monte à présent sur le ring, on se regarde, on se toise, on se présente. Maintenant.

Je me sens vivre alors j'avance directement sur l'adversaire et place les premiers coups, violents mais pas trop, il faut jauger l'autre, sentir directement la douleur qu'il peut vous infliger. Je ramasse mes premières frappes et sais à présent que je vais gagner le combat. Si les premiers coups ne m'ébranlent pas, tout est fini.

Là où d'aucuns ne voient que barbarie, je vois au contraire l'Homme qui vient au monde, la conscience et la volonté qui prennent le pas sur l'instinct de survie. Combattre c'est être plus fort que l'instinct animal. Combattre ce n'est pas détruire l'autre, l'autre n'existe pas dans un combat, il n'est qu'une image de soi. On lutte contre sa propre peur et l'adversaire n'est que le moyen d'y parvenir, de matérialiser cette peur.

Le combat, c'est deux hommes qui le deviennent réellement, qui affirment leur humanité par un acte de violence, un acte extrême qui les unit pour un temps, qui les rend complices.

Le combat c'est tout ce qu'il y a de beau en l'homme: l'abnégation, le courage, la détermination, le partage, l'amour.

Seul l'humain peut faire d'une telle chose un art aussi sublime, sublime lorsqu'enfin, on sait lire ce langage que notre monde moderne, petit à petit, tend à effacer...