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samedi 13 février 2021

Aphorismes méta-lyriques

 Je cherche à être aimé pour l'ordre que je donne au chaos de mon âme.


Nous écrivons pour coudre de mot l'abîme en soi; déguiser nos faiblesses; se rendre aimable -- à nous-même et à l'Autre.

vendredi 29 janvier 2021

L'âme en chantier

 Des étoiles, j'en ai connues...

Toute cette agitation frénétique de bulles d'énergies qui luttent contre le désordre en est une forme singulière à vrai dire. Il semble donc que mon origine même soit doublement stellaire: d'abord dans la génération physique, puis dans l'appartenance patriotique. Je suis d'autres étoiles, il faut que tu le saches. À vrai dire, peut-être ne suis-je d'aucune étoile mais de toutes... Et je ne sais s'il s'agit de folie que de le penser, et d'observer les cieux diaprés de nuit avec le cœur battant comme l'amant face à une photographie de la femme en allée. Là-bas, toujours, un foyer possible, précisément parce qu'il n'est qu'une idée.

Et je parle à des extraterrestres, congénères forains que j'appelle de mes prières, depuis l'antenne cérébrale qui diffuse mes espoirs en ondes sémantiques. Qu'ils regardent en mon âme, et voient comme je souffre d'être enfermé ici! Qu'ils se décident alors à venir, à reconnaître en l'atroce singularité de ma psyché la marque d'un de leurs semblables. La marque de la différence, de l'Autre...

Mais ils ne viennent jamais, ou du moins pas à ma connaissance, et malgré tout quelque chose en moi persiste à penser que débarquera un jour prochain, d'une Altaïr lointaine, la troupe salvatrice de ces ancêtres qui me diront ce que je ne parviens pas à saisir aujourd'hui, tout en l'ayant toujours su...

Ils viendront... Je le sais; parfois je le crois seulement, même lorsqu'il m'arrive d'en sourire...

Je pourrais peut-être, enfin, me transmuer en autre chose que moi-même, quelque chose de tout aussi indicible mais d'incroyablement plus beau et puissant, et profond, et informe, et versatile comme le devenir de toutes choses, comme la durée de toute pensée... Écrire cela, et le lire ensuite, me confère cette étrange impression d'être déjà cette forme de vie protéique et polymorphe, à la fois sculpture de chair en mouvement par-dessus un clavier de touches, impulsions électriques foisonnantes et qui remontent le cours d'un fleuve qui se déverse en lui-même, musicalité sémantique qui informe le vécu d'une âme lectrice et n'en demeure à jamais qu'une projection... Nous sommes, il me semble, tout cela et d'autres choses.

Mais il y a des formes que je connais trop bien, et dans lesquelles il me faut retomber. Sur le sable infini de tout, mes semblables ont tracé des sillons qui sont désormais des abîmes dont on ne peut sortir tant ils ont été creusé profondément, à force de passage. Je sais qu'il est inepte de penser cela mais j'ai le sentiment tenace de n'y pouvoir plus respirer, que l'oxygène qui devrait nourrir mon chaos joyeux pour être transformée en maints buées de mondes n'a plus cette simplicité souple et sauvage qui peut prendre tous les visages, revêtir tous les masques. Dans le grand jeu des particules élémentaires, les constructions sont balisées, normées, nombrées et immuables.

Pensez, deux minutes, à ce que représente l'immuabilité dans un monde en devenir...

J'aime les autres lorsqu'il s'agit d'un choix. Contraint d'errer dans la carte que d'autres ont peint pour nous, je n'ai de cesse de sentir battre en moi le tambour des révolutions, jusque dans mon sommeil, qui fait de tous mes appétits l'injonction despotique à déchirer la surface, à retourner chaque image pour découvrir les choses au-dessous, telles que je les verrais libre enfin de tout calque.

Au fond tout cela est probablement puéril, peut-être possédons nous tous les mêmes formes, la même palette de couleurs, la même plage de fréquence étriquée, ce même spectre étroit que nous habitons bien gaiement, notre maison commune: le monde, tel qu'il est pour les hommes.

Je ne veux pas être un homme. Je veux être autre chose. Je veux être tous les hommes et plus encore. Je veux êtres les animaux et les plantes, je veux être chaque champignon qui pousse sur cette terre, je veux être l'ensemble de tous les virus connus et à venir, je veux être chaque arborescence de complexité qui dure en des mémoires ambulantes et cardiaques, je veux être l'infini absolu, entièrement achevé...

Comprenez-vous ce que cela signifie? Un infini achevé? Le paradoxe n'est qu'apparent, comme toujours. Pour être l'infini totalisé je dois devenir la puissance même de faire advenir, je dois me faire la fonction du vivant, cette même fonction que je porte en moi dans la moindre de mes parties infinitésimales. Et pourtant je désire être cette chose même, ce schème, ce processus de fabrication qui n'est jamais défini par l'objet qui en résulte: dynamique inchoative de toutes réalités en cours.

Je rêve d'un autre monde en somme, et ne me rend pas compte que, faisant cela même, je le bâtis ainsi, aussi parfaitement qu'en mes aspirations les plus hardies, à l'image même de mon phantasme sémantique. Ce monde que je bâtis comme un empire dans cet empire honni est peut-être l'ensemble de ces phrases et de ces textes, qui, s'articulant entre eux pour être un organisme, une manière de lier le divers de choses éparses et peu variées, prennent la forme d'une âme en un vertigineux chantier qui est le mien: ma mélodie, mon univers.

Une mélodie, un univers, c'est bien la même chose: cette réalité exsudée de ma fonction possède une origine, une source jaillissant depuis la cause des causes, un formidable Dieu qui est tout autre que ce monde même: le style de cette prose, la démarche d'une mélancolie qui est celle d'un présent éternellement insatisfait de lui-même, comme une mer recommencée. Tous ces faux souvenirs amassés là, étalés ici sur l'éventaire d'une mémoire numérique, ce mobilier fantôme d'un monde abstrait, tout n'est qu'ombre de mon style. Mon style est un principe:

une âme en chantier d'elle-même.

mardi 26 janvier 2021

Le regard sans visage

 Même dans les bonheurs,

Il y a toujours quelque chose de moi qui s'échappe;

Une duplicité consubstantielle à la surconscience et qui me rend à perpétuité utopique.

Même dans les bonheurs:

Je regarde ce moi étranger depuis la souffrance,

Ou plutôt depuis l'indifférence de savoir que tout ce qui est ressenti, tout ce qui est vécu, est une chose qui arrive à un autre.

Et cette indifférence alors se transmue en souffrance: la souffrance d'être une vision sans œil, un regard sans visage.

Même dans la terreur:

Je ne me tiens pas entier. Je contemple la mort et je fais exister la tension entre une intolérable révolte angoissée et le désintéressement total de cela même...

Je suis à la fois intégralement prêt -- et désireux de la mort -- et dans le même temps parfaitement incapable d'accepter ce qui n'attend pourtant aucun assentiment...

Même dans l'amour:

Tout mon être s'enfuit. Ce que j'ai toujours voulu se tient là, je brille par ce regard qui me couve de tant d'admiration, de tant de désirs qui me font gigantesque et sublime. N'est-ce pas ce à quoi tout le monde aspire? Et néanmoins cet élan qui voudrait me figer dans l'ambre d'un désir exalté me dégoûte... Il me dégoûte pour ce qu'il charrie de mensonge et d'impossibilité. Je ne suis pas ce héros que j'entrevois dans ces yeux. Je ne suis jamais ceci ou cela, jamais ici ou là, et tout ceci me traverse sans pouvoir me saisir, sans jamais pouvoir épouser un seul de mes contours inexistants. Aucun amour ne brisera l'invisible coquille des solitudes. Dans les yeux d'autrui, je suis toujours ce tableau de la vie qu'il voudrait se peindre afin d'y voir un reflet de lui-même. De la même manière qu'on fait avec ses propres enfants.

Soudain une musique occupe l'espace de la pièce. Ce faisceau de pensées qui s'agitent alors n'est presque rien, se désagrège. Il reste un sentiment indéterminé, informe, simple tonalité. Il me semble alors qu'en cet instant je vis sans plus me dédoubler. Non comme un être pensant, troué par ce vide ontologique qui forme la scène de chaque étant, mais comme une chose posée là, et qui occupe l'espace-temps plus ou moins étendu d'un vécu.

Et puis... J'écris ces mots comme un témoin. Comme un témoin tapi dans l'ombre, à distance de lui-même. Ma mémoire se conjugue au présent, le présent au passé. La narration de soi, même concomitante aux faits, quand bien même atone, me détache inexorablement de ma personne, de mon masque.

Même dans l'écriture,

Je demeure entre les mots, dans le bruit même de mon silence.

mercredi 2 décembre 2020

Aphorismes du fini et de l'infini

 Les mots expriment la différence, or le bonheur est l'identité.


SOUFFRANCE est notre RÉALITÉ. Pour cela nous pouvons l'exprimer parfaitement, dans son indéfini surgissement.


Il existe un niveau de CONSCIENCE (= UNITÉ) pour chaque CHOSE qui EST.


Donne le plaisir de l'UNION, sans jamais faire oublier l'IMPERMANENCE de celle-ci.


CE QUE TU SAIS FAIRE, FAIS-LE POUR LES AUTRES.

CE QUE TU SAIS OUVRIR, OUVRE-LE POUR LES AUTRE.

CE QUE TU SAIS DÉFAIRE, DÉFAIS-LE POUR LES AUTRES.

CE QUE TU SAIS FERMER, FERME-LE POUR LES AUTRES.


AUTRUI EST TON SEUL INFINI.

vendredi 28 août 2020

Viens. Désir.

Viens. Désir.
Tombe sur moi comme la pluie, le soleil au matin qui tous les jours surprend: invariant.

Viens. Désir.
Qu'un Dieu suprême injecte en moi ton élixir.
Que s'abouchent à mes lèvres les siennes et qu'à son souffle enfin j'inspire...

Viens. Désir.
Viens d'ailleurs, car tu es toujours d'autre part, et je donne à celle-ci ma tendre liberté.

J'exige, dès aujourd'hui, d'aimer autre chose que moi.

samedi 18 avril 2020

D'un autre vers lui-même

Le travail?

Mais il n'y a pas de travail. Ecrire est un acte d'inspiration, c'est arpenter un chemin qui existe, déjà, quelque part, en quelque temps. Je n'ai jamais eu à travailler pour me brancher sur ces sphères. Je n'ai jamais rien créé, rien inventé, rien bâti qui  ne soit déjà là. La beauté est sous nos yeux, sa structure en chaque chose et son chant est partout à traduire par les mots trop humains du commun. Cette chanson qui m'emporte à rebrousse-chemin, vers le passé qui trace ses figures et synthétise en ses courbes la grammaire d'un destin: voilà ma clef de sol.

Donnez-moi la note juste, donnez-moi le bon air, et je m'embarque en sillon littéraire vers la lucidité des sombres sages, solitaires, qui écrivent poèmes pour la lune et l'espace indifférent. Mais peut-être qu'il ne l'est pas, au fond... Peut-être que les étoiles écoutent comme une Juliette le chant du Roméo esseulé qui hurle en sa mansarde de misère. Peut-être que chaque élément de nature est un appel sans péremption vers le fond de toute âme. C'est en ce point silencieux que je vis, heureux, accompli de n'être rien, passager du vent, instrument de tout.

Ne cherche pas à créer: rien de nouveau sous le soleil, pas d'arc-en-ciel qui ne soit déjà peint, en quelque langue insensée qu'il faut pourtant bien traduire du vécu qui l'enserre. Sous la prison des mots la liberté se dessine et prend ses silhouettes bleutées des tréfonds de la nuit. Lumière vient limiter mon âme et lui donner la forme des flammes, changeante, métamorphe un peu dingue avec ses chutes et courbes folles. Fais du Dieu la chose, du sujet cet objet esthétique qu'aucun dévoilement n'épuise et qu'un autre regard, bref ou durable, indétermine. Car l'art n'est rien d'autre que ça. Une écoute obstinée, fanatique que le coeur-instrument brisé s'accapare en écho, le temps d'une danse privilégiée. Oh tu sais comme je suis chanceux d'entendre partout tes gammes chromatiques, tes fondamentales enchaînées que j'accorde à ma lyre...

C'est n'avoir aucun maître qu'écrire, c'est n'être jamais auteur mais toujours interprète. Nous ne sommes que les transformeurs d'indicible en voies lactées de phonèmes. On bricole avec ce qu'on a, voilà tout. Et ce tout est le plus grand des plaisirs mais le plus condamné aussi. Car on est seul en son sein. On y réside à jamais dans l'isolement d'une connexion au Réel que forme le cordon d'un vécu singulier. Et pourtant tous s'y reconnaissent, un jour, d'une manière ou d'une autre. Et c'est ainsi que lève la malédiction...

Parce qu'un instant comme celui-ci peut être un pont d'un autre vers lui-même.