lundi 17 décembre 2012

Aphorismes

J'ai mis dans mes poèmes plus de philosophie que n'en contiennent les bibliothèques universitaires du monde.

"Il faut savoir se perdre pour un temps si l'on veut apprendre quelque chose des êtres que nous ne sommes pas nous-même." Nietzsche

"Tu es toujours un autre" Nietzsche

"Le vrai philosophe cherche partout clarté et précision" Schopenhauer

"La liberté paraît toujours pousser dans la nécessité des racines profondes." Bergson

jeudi 13 décembre 2012

L'acte moral

Kant a défini l'acte moral comme un acte de désintéressement pur dans lequel l'homme s'oublie au profit d'une loi transcendante à laquelle il se soumet temporairement comme à un commandement absolu. Cette acception qui est au fondement de la morale religieuse pose un problème tout à fait épineux puisqu'il suppose que l'humain pourrait se départir de la subjectivité qui le pousse à chercher son bonheur, au profit d'un acte qui, bien qu'il en soit l'auteur, le dessert potentiellement et peut aller à l'encontre même de sa propre existence. Est-il plausible d'envisager un désintéressement aussi absolu? Peut-on embrasser l'altérité jusqu'à remettre en cause sa propre existence que l'essence même de la subjectivité semble s'efforcer de conserver par l'accomplissement des lois naturelles de la conservation et du conatus? Il s'agit pour répondre à ces questions de replacer l'acte moral dans son contexte généalogique ainsi que d'en examiner les prolongements par lesquels l'homme, en tant qu'agent, apparaît comme une figure indissoluble.

Notons dés maintenant que la morale est une grille axiologique du monde purement artificielle dans le sens où elle est le produit d'une culture humaine qui a érigée des valeurs, absolues ou pas, dans un but d'harmonie sociale et/ou céleste. En effet, la nature, telle que la science nous la présente, semble dénuée de morale, il n'y est ainsi jamais question de Bien ou de Mal mais seulement de bon et de mauvais, pendants relativistes de ces valeurs absolues. Le bon et le mauvais se définissent par essence par le rapport qu'entretient un sujet avec une chose donnée: est bon ce qui semble souhaitable pour le bonheur, le bien-être, le conatus. À l'inverse, est mauvais tout ce qui dans une situation donnée peut mettre en péril le conatus du sujet. À ce relativisme parfois problématique, la religion, et un certaine philosophie, ont tentées d'ériger un système de valeurs inébranlables, insensibles au contexte où elles s'appliquent, propres à guider l'homme tel un phare dans l'immensité obscure qui semble parfois le perdre dans un néant délétère. La morale, qu'elle soit construite ou révélée, devient loi et veut s'incruster si profondément dans l'univers humain qu'elle en deviendrait loi naturelle, indiscutable et rassurante.

Cependant la morale ne jaillit pas de l'homme spontanément, elle est le fruit d'une éducation et par là même d'un long conditionnement propre à cristalliser dans les représentations mentales de l'homme ces valeurs clés censées le guider et orienter ses pas dans un monde parfois hostile, parfois bienveillant, mais dont l'instabilité porte au doute et au sentiment de l'absurde. C'est donc dés le plus jeune âge que la religion ou tout système philosophique morale, voire toute culture plus généralement, imprime l'idée de Bien et de Mal qui seront à même d'assurer la paix aux hommes, si ce n'est en leur apportant des réponses, au moins en leur montrant quelle voie suivre, quelles actions effectuer.

Une fois acquise, cette morale, pour être respectée, se veut exécutée dans le plus pur désintérêt: l'homme doit pouvoir s'effacer devant elle, abandonner tout intérêt privé, toute considération individualiste au profit de la loi morale qui le pousse à agir au profit du prochain, dans la morale chrétienne par exemple, quand bien même il en résulterait des effets négatifs pour sa propre personne. L'ascèse, l'abnégation et l'altruisme sont bien réels, de nombreux actes de cette nature ont été effectués par les hommes de tous temps, pour asseoir cette croyance en la possibilité d'un acte purement désintéressé.

Seulement, tout acte a des conséquences. Il est difficile de croire qu'un individu, qui par essence tente de persévérer dans son être, puisse volontairement agir au détriment de son conatus, d'autant plus si sa vie même est en jeu. En effet, s'il n'avait pas l'idée d'en retirer un bienfait, on voit mal pourquoi il se déciderait à sacrifier sa vie aveuglément, dans une obéissance irréfléchie à une loi transcendante. Il est bien plus probable d'envisager qu'une telle action est possible justement par la perspective d'un bien à venir, comme par exemple le sentiment d'être en paix, du devoir accompli, du don de soi et bien d'autres encore. En effet, comment envisager le sacrifice, sous toutes ces formes, s'il n'exaltait pas par lui-même une certaine gloire ou une certaine satisfaction chez l'individu. C'est ainsi que les nombreux martyrs sont convaincus d'agir pour la bonne cause et retirent naturellement de cette conviction un bien incommensurable puisque au-delà du relativisme individuel, un bien qui fait tendre l'homme vers un absolu qui le dépasse, et par là même lui procure la plus grande béatitude.

En outre, cet effet, par son anticipation peut être rétroactif: l'homme qui sait qu'il va accomplir une acte moral qui mettra son existence en péril, en plus d'une légitime peur, ressentira le vertige et l'ataraxie du juste, cette récompense du croyant qui le gratifie du bonheur profond que l'on peut ressentir en plaçant sa propre individualité en accord avec une chose qui la dépasse, quelque chose d'éternel et d'immuable auquel l'homme  aspire tant depuis l'antiquité philosophique.

On nous objectera, que le vrai acte moral est celui qui s'exécute hors de toute considération individualiste, et qui se joue dans un moment d'oubli de soi, hors de tout calcul, qui pour ainsi dire s'empare de l'individu pour le désincarner. Certes, une telle chose est possible lorsqu'on extirpe l'acte lui-même de tout son contexte, de toute sa genèse et de toutes les conséquences qui en découleront. Pris en lui-même, l'acte moral est pure action, mouvement vers l'altérité, don de soi. Mais comment ne pas interroger la légitimité d'un tel procédé qui consiste à examiner une chose en occultant ses causes et ses conséquences, c'est à dire précisément tout ce qui pourrait l'expliquer, en constituer sa connaissance? L'acte lui-même n'aurait pas été possible sans l'éducation qui a en quelque sorte matérialisée l'arbitraire en absolue vérité dans l'esprit de l'homme moral. Il ne serait probablement pas plus possible si l'on en élaguait toutes les conséquences rétroactives ou futures. D'ailleurs un tel acte, s'il pouvait être perpétré par un individu, comment pourrait-il être autrement que désincarné ou bien amoral? En effet, si un homme était capable d'agir hors de toute considération individualiste à propos de ses actions propres, comment pourrait-il seulement distinguer le Bien du Mal? Si les actions lui étaient à ce point indifférentes, il ne distinguerait pas plus le Bien du Mal car la notion de Bien renvoie toujours à un devoir individuel, et porte en sa définition même la notion du 'positif'', jugement qui rejaillit sans cesse sur l'homme qui la contemple, plus encore sur celui qui la rejoint. Pour savoir que l'on fait le Bien, il faut avoir conscience du Bien et donc conscience de son individualité agissante. Or avoir conscience du Bien n'est rien d'autre que croire au Bien et donc en une valeur positive, valeur qui, par essence, colore l'individu de sa positivité, le porte, lui donne une raison d'être et d'agir. Abolissez toute conscience individuelle et vous n'aurez ni bien ni Mal, l'acte moral absolu se confondant alors purement et simplement avec l'acte amoral, acte pur qui se joue "par delà bien et mal".

Ainsi donc, l'individu en tant qu'agent actif, ne peut à aucun moment s'ignorer et agir moralement sans retirer un quelconque plaisir, une quelconque félicité de la considération de son acte accompli ou à venir. Il ne saurait le faire sans abolir la morale et sans devenir un être désincarné amoral. Le désir de persévérer dans son être semble tellement profondément ancré dans la nature humaine qu'il doit s'exprimer par tous les moyens. Ainsi l'acte moral "désintéressé", qui pourrait aller à l'encontre de l'existence individuelle, n'est permis que par la croyance en une plus grande félicité spirituelle, autrement dit par la croyance en l'augmentation de la puissance d'un être (à travers la reconnaissance, la paix intérieure ou n'importe quel effet positif s'exerçant sur l'individu croyant) résultant d'un acte accompli ou à venir et qui légitime par là même la destruction prématurée et volontaire du conatus. C'est donc, en quelque sorte, pour vivre plus 'intensément', pour briller plus que l'homme moral se décide à agir contre son existence, se fondant ainsi dans un absolu que son individualité seule n'aurait jamais pu lui faire atteindre.

jeudi 6 décembre 2012

Force du temps

Une pensée pour toi
Les roses peuvent mourir
Je cueille ton sourire
Et refleurit déjà

Ta rosée pour ma bouche
Tous les matins du monde peuvent bien se rhabiller
À ta fraîcheur farouche
Le troupeau de mes songes préfère s'abreuver

Depuis que j'ai connu l'Aurore
Je n'aime plus l'éternité
Toutes ses merveilles et ses horreurs
Font pâle figure à ses côtés

Encore la mort! Viens! Frappe fort!
Je suis serein, j'ai en moi ce que rien ne saurait altérer