Affichage des articles dont le libellé est temps. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est temps. Afficher tous les articles

lundi 31 octobre 2022

Problèmes kantiens: matière (qualité) et forme (quantité)

On note, chez Kant, une distinction entre les formes a priori de la sensibilité (espace et temps), mobilisées par l'intuition pure, et la matière a posteriori de la sensation (qualité vécue), mobilisée par l'intuition empirique. Mais la seconde est bel et bien rendue possible par les premières, autrement dit c'est à partir du moule spatiotemporel que les qualités sensibles peuvent s'offrir.

Si l'esprit ne peut percevoir qu'à partir de ses formes a priori (l'espace et le temps dans le cas qui nous occupe), alors cela signifie que les qualités sensibles (couleur, son, texture, etc.) doivent pouvoir être entièrement exprimables par elles. Or un monde entièrement fait des formes a priori de la sensibilité est un monde géométrique (ou plus largement mathématique), dépourvu précisément de qualité. La qualité sensible est un donné, passif, qui nous vient de l'extérieur, mais Kant n'explique pas comment une telle qualité (une telle catégorie ontique) peut seulement être perçue dès lors qu'elle excède ou transcende les seules formes de l'espace et du temps.

Je vais tenter de m'expliquer plus clairement: il est impossible (d'après Kant lui-même) à partir du seul monde des figures et relations spatiales, de produire la qualité sensible (par exemple la couleur). Pour que cette expérience ontique advienne il faut qu'un élément purement extérieur (hétérogène) soit intégré par le système transcendantal de la sensibilité. Or si ce divers sensible est fondamentalement autre et irréductible à l'espace-temps géométrique, fait de quantités (et de leurs relations), alors il n'est pas expérimentable par l'homme. Pour qu'il le soit, il faut postuler une forme a priori de cette qualité qui soit de la même nature ontique. On ne comprendrait pas, autrement, comment l'espace-temps pourrait servir de fondement relationnel à quelque chose de radicalement différent, comment pourrait s'organiser une interaction entre ces deux catégories.

Sortir de l'aporie suppose de postuler que toute qualité est réductible à une configuration mathématique (spatiotemporelle) particulière, et qu'il n'est donc nullement besoin d'un apport extérieur pour produire le phénomène de qualités perçues. Si c'est bien la position d'un Hobbes, ce n'est absolument pas celle d'un Kant... Ce dernier ne nous explique absolument pas comment l'homme pourrait percevoir la qualité à partir des simples formes de l'espace et du temps, quand le premier ne nous explique pas comment la propriété émergente d'une qualité peut naître de rapports purements quantitatifs.

Jamais espace et temps ne sauraient encadrer des objets dont la nature n'est pas purement spatiotemporelle, or c'est précisément ce que suppose l'existence de la qualité en cela qu'elle contient un élément irrémédiablement hétérogène à l'espace et au temps, que les formes a priori de la sensibilité ne savent générer par elles-mêmes -- et qui leur est donc fondamentalement, et radicalement, étranger.

En fait, il apparaît que la séparation nette que fait Kant entre contenu (matière) et forme n'est pas tenable et suppose le même genre de bricolage ad-hoc auquel il recourt pour parvenir à insérer dans la causalité phénoménale (naturelle) une liberté nouménale.

Entendons-nous bien: la théorie proposée par Kant est époustouflante d'ingéniosité et permet de comprendre l'efficacité des mathématiques dans l'appréhension des phénomènes naturels. Cela dit, elle ne permet absolument pas d'expliquer l'union de la qualité et de la quantité, de la matière et de la forme: elle maintient une dualité stricte, une théorie de l'homme déchiré.

Mais ce n'est pas seulement là que le bât blesse: la théorie des formes transcendantales de la sensibilité suppose que tout peut se réduire à ce fondement spatiotemporel, ce que nie précisément Kant en refusant à la qualité la possibilité d'être générée a priori par les formes pures de la sensibilité. La qualité doit donc se mouler mystérieusement dans le cadre des formes de la sensibilité, absolument étrangère et pourtant au contact de celles-ci... inexplicablement.

vendredi 2 septembre 2022

Un problème de l'idéalisme transcendantal

 J'aimerais pointer du doigt ici un problème particulier concernant la philosophie kantienne de la connaissance. Si l'on prend en considération l'idée selon laquelle les formes de la sensibilité, qui constituent les conditions de possibilité de l'intuition d'objets, et donc de cet objet de tous les objets qu'est le monde, sont inhérentes aux structures transcendantales du sujet, on est alors placé face à un choix: soit il faut considérer que le sujet transcendantal est identique pour tous et que, pour ainsi dire, nous sommes tous "locataires de l'esprit", et alors il devient possible de comprendre comment les hommes vivent dans le même monde, c'est-à-dire le même espace-temps. Soit nous devons considérer qu'espace et temps sont véritablement des formes propres à tout sujet transcendantal et que, par conséquent, le monde des phénomènes est une production du sujet. Mais dans ce dernier cas, il devient impossible de comprendre comment et pourquoi les différents sujets vivent dans un monde commun qui semble pourtant lier les sujets entre eux par le milieu qu'il constitue...

La première hypothèse détruit l'idée qu'espace et temps ne sont que des formes de la sensibilité et non des choses en soi, puisque s'il existe un espace et un temps unique, commun à tous, alors on doit considérer qu'il existe en soi et non pour les sujets. Du moins il doit exister pour cette conscience universelle qu'est le sujet transcendantal qui prête aux sujets empiriques ses structures formelles. Mais par rapport à ces sujets, une telle métastructure correspondrait à un réel, à une chose en soi, qui ne dépend pas d'eux et existe indépendamment d'eux.

La seconde hypothèse pose un autre problème: puisque le monde phénoménal est inhérent à chaque sujet transcendantal, alors il doit exister autant de mondes que de sujet et il ne saurait y avoir un même monde qui parviendrait à relier, par médiation, les sujets entre eux. S'il existait il ne pourrait être alors le produit des structures transcendantales propres à un sujet (puisqu'il serait propres à tous les sujets) et on ne pourrait expliquer l'extrême étrangeté d'une synchronie telle qu'un monde commun et simultané puisse émerger de la multitude... D'ailleurs, puisque ce monde n'existe pas en soi mais pour soi, il ne saurait y avoir un même monde pour deux sujets puisque le monde d'un sujet ne pourrait exister que pour lui, sous peine d'être en soi et non plus pour soi...

Dans la révolution copernicienne, tous les sujets forment un soleil, or on comprend mal comment tous pourraient former un unique centre à partir duquel émerge l'espace-temps d'un monde objectif.

Voilà une des grandes difficultés de l'idéalisme transcendantale, malgré son extrême élégance et pertinence.

mercredi 11 mai 2022

Hormèse

 La conscience m'augmente à mesure qu'elle me déchire et perce, au cœur du centre de mon étendue vacante, un point vital de mon être: celui qui pourrait faire de moi cette totalité close, pleine et entière. Au lieu de ça je m'écoule en humeur noire au-dedans de mon néant intime, comme si ma souffrance même rechignait à m'appartenir, et débondait en mille nuances sur l'épiderme du réel.

Cette maladie je l'ai attrapé assez tôt. La maladie de la conscience m'a été transmise par la douleur, la douleur de l'adolescence et du déracinement, la douleur de la perte et celle de l'amour impossible -- c'est à dire, au fond, de la réunion de soi avec cette altérité qui nous racole comme un vide irrésistible par lequel s'anéantir.

Dès lors que je fus malade, je n'ai cessé de m'élever à des degrés de souffrance toujours plus éminents. Sur les neiges éternelles de mon futile tourment, je plane solitaire et ivre de puissance. Je suis propriétaire d'une chose...au moins...et c'est elle et elle seule.

Ce cancer qui me ronge, toujours plus dévastateur, toujours plus virtuose en son art, est la blessure qui inlassablement lacère mon âme en son destin. De cette peau béante et qui supure, je dois ramasser les lambeaux, recoudre les fissures, les abîmes qui cherchent à me défaire, et...toujours alors...je reviens de plus bel, plus immense et plus fort; aussi vaste que mille univers.

C'est ce combat face à l'altérité absolue, cette entreprise de prédation ontique qui nous définit, échaffaude le seul bonheur qui soit, augmente nos puissances et fait de l'existence cette croissance métastatique qui menace, à terme, d'engloutir jusqu'à la moindre des ressources disponibles.

Impossible coïncidence de soi avec soi, déséquilibre qui fait la marche des destins, qui fait lever le temps comme une houle inarrêtable, asymétrie profonde de l'Être dans sa chute. Nous avons soif parce que c'est cela que la vie d'homme. Nous désirons et par là même engloutissons l'éxtranéité profonde dont on ne sait si elle nous enceint où si c'est là le jet sombre et terrible de notre propre source enfouie.

Nous allons parce que la symétrie est impossible. Et ce qui nous renforce est ce qui nous détruit.

lundi 6 septembre 2021

Gods

Oh nous avons tout le temps du monde. Toute la consciente lucidité aussi brûlante que des étoiles folles. Que ferons-nous alors? Quelle qualité de l'être froisserons-nous dans la contemplation atone de l'instant? Et pour quel horizon? Quel idéal ardent de distance infrangible nous faudra-t-il convoiter enfin?

Nous avons tout le temps du monde.

Pieds suspendus sur la pointe de lune, avec les reflets mordorés de la mer en-dessous. Ligne de l'âme enfoncée sous les eaux: océan de la vie qui porte mes espoirs et ouvre ma prison sur l'indéterminé des nuits.

Nous avons tout le temps du monde.

Et se connaître est insensé. Nous avons tout le temps du monde, il ne faut pas surtout, surtout pas se presser.

Il y a, tu sais, dans l'écheveau des limbes, des notes amères et cruelles qui parent le silence de profondeurs d'abîme -- et ces limbes sont miennes. Et comme mon reflet, alors, obombre ma cellule et resserre les murs de ma durée-demeure. L'enfer est un fragment de soi. C'est pourquoi je m'enfuis dans tes dessous de soie.

Nous avons tout le temps du monde.

Pour mourir doucement. À l'ombre de feuilles éméchées.

Nous avons tout le temps, tout le temps, tout le temps!

Et des tonnes de souffrance pour ponctuer nos joies, l'existence est aphone sans la dissonance, il faut souffrir beaucoup pour s'extasier parfois.

Nous avons tout le temps, de cueillir le beau jour, ne presse pas tes doigts autour de cette gorge. Patiente et fouille un pot-pourri de tes durées, ouvre les yeux avale, liquide, l'immense ennui de vivre, l'absence d'absolu, le ciel est sans issue...

Nous avons tout le temps.

Mais il ne faudrait pas. Il faudrait bien courir, aller à sa recherche, pour écrire des livres sur celui loin perdu.

Nous avons tout le temps...

Impossible de vivre...


Source musicale:

 





lundi 2 août 2021

Champ aperceptif

 Dans le vide qui m'enserre, et m'éloigne infiniment des autres, j'observe autour du nœud aperceptif les innombrables chemins qui développent la puissance du néant.

Tout, littéralement tout est là, offert aux caprices d'une volonté vacillante, indocile, superbe dans sa solide fragilité. Je pourrais tout écraser. Je pourrais tout détruire, annihiler jusqu'au vide pour qu'il ne reste rien. Ce rien qui est bien moins que rien, ce rien dont il n'est pas possible de parler, ce rien qui efface jusqu'à la moindre de ses traces.

Néanmoins, dans le vide, infiniment loin de tous, je regarde au devant les chemins qui ont la forme des costumes de comédiens, la texture de la peau, l'émotion vive des instants vécus, des drames et des comédies. Tragédies du destin. Volute d'humanité, barbelés d'énergie, d'efforts, constellation de choix qui forment les graphes aux théorèmes incertains.

Probable. Cette vie particulière, dont la délinéation rythmique s'offre à mon regard auditif, n'est qu'une énième probabilité de ma personne. Un texte que je pourrais lire. Un rôle, un masque, un corps, une chair.

Mais l'âme est absolue, rien ne la relie au reste. Substrat permanent de tous possibles, incolore, ourlé d'informe indétermination.

L'âme est tout, médiation immédiate, durée sans nulle instants, instant sans nulle durée.

Tout, littéralement tout est là; et à rebours de mon regard, je retrouve la source, alme, origine des mondes.

Exister n'est pas un souhait que j'aurais formulé. Je veux être œil ouvert sur le réseau des choses. Je veux rester regard porté sur le moindre fugace et singulier regard qui pourrait être moi sans la distance qui m'en sépare.

Je suis espace et temps, et non la concrétion d'une chose à l'intérieur.

vendredi 21 mai 2021

Rêve éveillé: rien ne résiste à la mer

 Ce matin, somnolant sur ma paillasse, une fois n'est pas coutume je rêvais d'océan: je rêvais de surfer. Pour une fois cela dit, ce n'était pas de moi qu'il s'agissait, puisque l'homme dont j'étais le fantôme dans la coquille n'était autre que Kelly Slater, multiple champion du monde. Nous étions dans une épreuve des jeux olympiques, sur la fin de la session. Kelly venait de prendre sa dernière vague, qui lentement s'éteignait refusant son épaule dans un fracas d'écume. Le champion, dans son dernier virage, se laissa aller vers l'eau lisse comme une glace, à peine ridée, il était presque parallèle à elle lorsqu'elle l'accueillît en son sein.

Kelly était tellement heureux, qu'il se laissait secouer par les vagues suivantes, rouler dans l'écume rageuse qui le poussait vers le rivage. Cette joie était celle d'avoir participé à un moment historique. Les premiers jeux olympiques de surf. Il arriva sur la plage, marcha quelques mètres sur le sable en pente que dominait une dune, puis il se laissa tomber à genoux, les mains sur le sol qu'il éleva et tapa contre le sable mouillé en criant: "j'y étais! J'y étais!!". Des larmes s'échappaient discrètement. Le ressac venait immerger d'une fine couche liquide la base du surfeur, il venait prendre l'émotion pour la ramener en lui.

En bas de la dune, il y avait de petits rochers lacunaires, criblés de trous et d'anfractuosités lisses qui formaient comme un corail érodé. Kelly se releva, il n'y avait plus aucun public, juste quelques plagistes épars. Il marchait le long de la dune, l'eau montait jusqu'à ses pieds pour repartir, happée par son origine, dans un petit crissement sableux de poussière musicale. La houle était tombée. L'eau était si lisse qu'elle se confondait avec le ciel. Chaque petite vague qui parvenait à casser doucement semblait effacer la précédente. L'atmosphère était silencieuse, le vent soufflait à peine et plus aucune trace des arabesques athlétiques ne persistait dans l'eau presque étale. Le moment était passé, les exploits à peine effectués disparaissaient peu à peu dans l'écho des mémoires (quelles mémoires?). La plage était redevenue comme toutes les plages, calme, immergée dans un présent qui semblait s'évertuer à refuser le témoignage d'un passé englouti.

Le vent, le ressac sur le sable, et l'eau bien calme. Une minute à peine était passée et rien ne subsistait.

lundi 3 mai 2021

Digression méditative ou l'idée de temps cuite au soleil

 La philosophie n'est pas une activité intellectuelle qui met en branle des concepts irréductibles à des sensations. Bien au contraire, je trouve qu'elle n'est qu'intuitions (non pas au sens d'inspiration divine qui viendrait injecter en l'homme une vérité quelconque par l'effet d'une révélation, je parle plutôt d'affection sensible) et images. D'ailleurs il n'y a pas de pensée qui ne soit une sensation, même le langage est entendu par images acoustiques auxquelles sont liées des images d'autres types encore. Cela dit on ne sent pas par son corps, mais bien par sa conscience (preuve en est le sommeil). Chaque sensation est une image ou la synthèse en une durée, qu'on appelle un état, d'une succession d'affections. En fait c'est toute la dualité entre le corps et l'esprit qui doit être ici annulée sous peine de ne plus rien comprendre à tout cela. Le corps ne peut être qu'une idée de l'esprit, une vue de l'esprit, de la même manière que l'esprit ne peut être qu'un produit du corps. Nous n'avons pas d'idées de choses insensibles.


On pourrait m'objecter que l'idée même de l'infini vient contredire cette thèse (mais ce n'est pas une thèse, je n'affirme rien, je ne fais que parler, je ne prétends pas à la vérité, j'en alimente un courant voilà tout) mais je ne serais pas d'accord. La raison en est que l'infini est la sensation de la conscience qui se vit sur le mode de la permanence. Même lorsqu'elle cesse, elle cesse pour autrui ou par rapport à un référentiel externe, étranger, qui agit alors comme trace et témoin de cette cessation temporaire qui inclut conscience et inconscience dans une synthèse plus vaste qu'on pourrait nommer existence. Néanmoins du point de vue de la conscience, la seule chose qui est expérimentée c'est la conscience... La mort n'y pourra rien y faire puisque la conscience n'aura jamais connaissance de sa fin, elle n'en aura nulle expérience. Elle se vit donc, pratiquement, sous le rapport de l'éternité, et l'idée d'infini n'a rien d'une chimère spéculative.

Il en va de même pour l'idée du fini, c'est par l'expérience d'états de consciences temporaires et fluents que la finitude est perçue et ressentie, mais elle ne peut l'être que sur un fond d'infinité, de permanence éternelle.

samedi 9 janvier 2021

Le temps qu'elle dure

 La paix, la paix, la paix. Celée dans les parfums, imprimée dans la bouche au fond des longs soupirs, gravée à l'encre d'âme, noyée dans les idées.

La paix qui perfore les eaux sombres, les tourments d'autrefois; ruisselle sur le présent, craquelle les formes incrustées, et vole au vent du temps, s'ébat dans l'atmosphère, arrose le vide-éther, la paix...

Un vol de papillon, une trille, un éclair...

Je l'ai vue, entendue, je la sens, parcourue; et, pourtant...

Demain t'aurais-je encore? Ou n'y aura-t-il en moi que ton lit asséché, la forme en creux de tes sourires...

Les illusions, le temps qu'elles durent, sont si réelles au fond...

Bientôt les litanies reprendront, peut-être, c'est possible, il faut s'y faire et néanmoins, ne pas se défaire du présent.

Le présent est du monde, un maillon de ces chaînes de la vaste nature. Tout y est temporel, la nature des vivants est d'être des mortels.

Les illusions, le temps qu'elles durent -- peut-être toute une vie --, sont si réelles au fond...

mercredi 2 décembre 2020

Mantra musical

 TOUTE la MÉMOIRE EST dans L'INSTANT.

mardi 22 septembre 2020

[ Terres brûlées ] Sans dessein



Sous la mousse d'éternité
Passe encore le temps pour les cœurs limités

L'arbre d'égo s'effeuille
Et sous les pas craque l'écho des vanités

Antan s'est effacé
Ne reste que l’absolue nouveauté

Je n'ai rien à promettre
Le temps naît inconnu sur les rebords de ma fenêtre

Je serai là où l'on m'attend dès lors
Je quitte en cet instant la zone du dehors

Je suivrai l'avenir
Où mène ton sourire

Je suivrai l'avenir
Que tes pensées transpirent

Oh tes pas sont légers
Moins lourds que des soupirs

Je n'ai rien à promettre
Le temps m'est inconnu à l'ombre de tes yeux

Aux creux de tes pommettes

J'attendrai bien qu'un jour la queue de ta comète
M'accroche à son destin

Je n'ai rien à promettre
Moi qui suis sans dessein...

dimanche 31 mai 2020

Les gens n'ont pas le temps



Les gens n'ont pas le temps.

Il faut aller bien vite pour cueillir le printemps.
Dans ce monde livide
Combien de nous lévitent
Et vivent pleinement.

Les gens n'ont pas le temps.

Ne vois-tu pas comment
L'on fabrique les vies
Démoulées à la chaîne
Par la vile industrie.

Les gens n'ont pas le temps.

Pour un peu c'est la fin
L'on n'aura vu du Tout
Qu'un peu de sable fin
Sur tube cathodique.

Les gens n'ont pas le temps.

Se disent catholiques
Pour croire au lendemain
Qu'un siècle noir abrège
À une peau de chagrin.

Les gens n'ont pas le temps.

Les étoiles brillent encore
Depuis l'aube hivernale
Jusqu'au chant vespéral
Les jours sentent la mort...

Les gens n'ont pas le temps.

Il faut chasser l'argent
S'acheter pauvres rêves
Qu'un train d'ondes sans sève
Du soir au matin vend.

Les gens n'ont pas le temps.

D'être heureux d'être au vent
Il faut être au courant
Et se noyer dedans
Pour être socialement.

Les gens n'ont pas le temps.

Il faut ouvrir la brèche
Mettre feu à la mèche
Transfuser dans le vent
L'odeur salée du large.

Les gens n'ont pas le temps.

Tous esseulés en marge
À côté de l'instant
Où attendent les anges
Qu'on ouvre grand les cages.

Les gens n'ont pas le temps.

Pour cela il nous faut
Faire vibrer tout l'espace
Et briser le miroir
Qu'on a mis à la place...

Les gens n'ont pas le temps
Mais les poètes l'ont
Qui ouvrent les paupières
Du siècle agonisant.

mercredi 20 mai 2020

J'appartiens à l'instant

Un rai de soleil éclatant couché dans l'herbe lascif. Il est rasant et me regarde en biais pour me brûler les yeux. Désir d'être consumé dans l'instant, je t'appartiens pour toujours...

Je caresse autour de moi les couleurs dessinées au hasard. J'observe la forme arbitraire des choses et les délinéations chromatiques. Il n'y a pas un autre instant du vortex temporel où je voudrais me trouver...

Maintenant, je sais que je suis là.

lundi 9 décembre 2019

How to disappear completely

Je crains, parfois en marchant, de m'évaporer en volutes de pensées, de me défaire là sous l'effet du temps, comme si ma vie entière n'eût été qu'un songe improbable - et léger.

[ Flux ] Temps et conscience

Pourquoi la conscience?

La conscience est intention. Elle est la liaison d'un Sujet et d'un Objet.

S   ----------------> O     |
S1 ----------------> O1   | CONSCIENCE
S2 ----------------> O2   |
Sn ----------------> On   |

La conscience existe par rémanence de l'intention qui découvre l'objet.

Le sujet sent l'effet de son observation sur le réel qu'il configure (par les formes de la sensibilité et de l'entendement) en monde.

L'intention est mouvement du sujet vers l'objet elle est donc durée.
Elle n'est pas instantanée mais différée, c'est à dire effet.

Elle est une relation d'un état d'elle-même à un autre.

NB: la conscience ne peut être un effet, elle ne peut être produite car cela impliquerait qu'il existe un présent, une instantanéité. Or, comme en géométrie avec le point, le présent instantané n'existe pas. C'est à dire qu'il ne peut y avoir d'instant dans la durée qui ne soit pas déjà durée a priori, sinon comment expliquer que d'instants naissent une chose d'une autre nature comme la durée...

Ce qui est absolument différent n'interagit pas. Seul le semblable interagit.

NB: le concept de propriété émergente est creux, il déguise une ignorance: nous n'avons pas la bonne échelle de lecture pour observer le phénomène, ainsi  nous avons l'impression qu'il émerge de l'absolument autre, lors même que c'est impossible.

Par conséquent, la conscience serait déjà là, a priori? Elle ne ferait que s'enrichir, s'épaissir, et serait donc éternelle?

NB: il  n'y a que devenir car tous les phénomènes qui constituent le monde humain sont dans le temps. Ainsi l'homme est déjà dans la semence, dans le père, la mère, dans la poussière d'étoiles et le big bang.

La représentation de l’intentionnalité en Sujet - Objet n'est pas bonne car elle présuppose que Sujet et Objet peuvent exister indépendamment l'un de l'autre, or ce n'est pas le cas. Il n'y a jamais que dévoilement d'un objet. Le sujet est un concept reconstitué a posteriori, par déduction ou induction. À la base, il n'y a que le phénomène où se dévoilent des objets.

Le sujet n'est-il qu'une fiction, celle d'un monde qui s'invente, s'imagine, une origine autre (comme avec le point de la droite ou l'instant de la durée)?


Pourquoi la flèche du temps?

Le flux du temps ne proviendrait-il pas de la décohérence quantique?

La détermination (par interaction) d'une variable (c'est à dire d'une de mes propriétés ou de celles de mon monde - c'est la même chose...) va déterminer un ensemble d'autres variables/propriétés en cascade: c'est le flux du temps.

Ce dernier serait la chute, l'annulation de la superposition d'états simultanés en un flux d'états déterminés et singuliers.

Oui, mais cela n'explique pas comment une telle succession était possible à la base, car si cette succession advient lors de la décohérence, c'est bien qu'elle était déjà là bien que non phénoménalisée (pour nous)...

Tout cela pose la question de la mémoire, car la conscience semble être une durée qui conserve les traces de durées antérieures, et même antérieures à elle (le génotype en offre un exemple typique par l'hérédité ou l'atavisme; la manière dont nous comprenons le passé antérieur à notre époque en général).

Mais comment ce passé s'accumule-t-il dans notre durée présente (comme les notes précédentes dans celle en cours lors du processus musical)?

mardi 3 décembre 2019

[ Terres Brûlées ] L'Informulée



Mon champ est un recueil
De rimes inachevées
De rêves entrelacés
Ma conscience un cercueil
Où mourir éveillé

Et ce réseau de rien
Me tient lieu de royaume
Moi l'étranger
Qui vit au-dedans d'un fantôme

Je cherche mes semblables
Qui vont dans les envers
Et n'étreint que le sable
Qui dessine mes vers

Si je suis différent que suis-je?
Un sillon dans la neige
L'arborescence de ma pensée
Qui forme le chaos

Le chaos c'est l'ordre trop complexe
C'est l'échelle que nous ne savons lire
C'est l'horizon que chante ma lyre
Solitaire et sans sexe

Je sais que des chemins connexes
impriment leur essence
Et forment à distance
Un réseau parallèle

Unis que nous sommes dans la solitude
C'est notre théorème qui découpe la bruine

Nous sommes ce qu'elle n'est pas
L'écart, la différence
Le creux qu'indique notre signe
Abîme ouvert sur la béance

Où sont les illisibles?
Tous ces récits intraduisibles
Écrits dans une langue
Inconnue de Babel

Peut-être sont-ils inscrits
Dans l'indéchiffrable babil
Que produisent les cris
Des rêves infantiles

Peut-être sont-ils d'avant les choses
Ou, succédant l'apothéose
Restent au dehors des formes
Comme une anamorphose du temps

Ce temps où tout s'écoule
Où chaque crystal enfin fond
Rendant chaque forme liquide
Et dépourvu de moule

Marchant sur cette grève
Je sais qu'il n'y a pas foule
Mais j'accepte et je goûte
Le réseau de ma sève

Impossible labyrinthe
Au fil si incolore
Pour lequel il faut clore
L’œil inquiet qui trop guette

Ce regard insatiable qui dévore l'avenir
Et permet au destin d'entrer dans le jardin
De nos présents
Et tout cueillir...

Longtemps j'ai regardé
Au-delà de la brume
Où l'angoisse intranquille
Patiente m'attendait

Mais je contemple aujourd'hui le coeur de chaque atome
M'insère au sein de la plus petite unité de temps
Celle-là où je dure dans un bleu de la nuit
Comme note finale d'un concerto mineur

Je suis du coeur des ombres
Comme un pirate des frontières
Où la lumière se fait trop sombre
J'ouvre le voile de mes paupières

Et le monde m'apparaît tel qu'il n'est pas
Tel que jamais il ne sera
Comme une mélodie qu'un sourd perçoit
Comme un tableau peint sans couleurs

Sans attendre de réponse
Je prépare alors mon interrogation
À l'auteur de toutes choses

Lorsque ma bouche s'ouvre
Parle la mère de tous les énoncés
Le silence alors retentit comme origine et fin de tout
Indéfini, antérieur même à l'incroyable éternité

Et je sais alors
D'un savoir cellulaire
Que la réponse est là entre l'ombre et lumière
Dans cette non-grammaire du vieil anté-langage:

Infiniment totale puisque informulée

mercredi 13 novembre 2019

[ Terres brûlées ] Carrefour vibrant de vie



C'est un lieu? Non ce n'est pas un lieu.
C'est un instant, une époque, un point du temps?

Ou peut-être est-ce un moment du lieu ou bien un endroit de la durée...
C'est un écoulement que je connais, que j'ai connu - le connaîtrai-je encore? Et dans combien de temps?

C'est en dehors du rythme spatio-temporel de cette signification littéraire. C'est en dehors de moi pourrais-je aussi dire, mais il serait plus juste d'employer le terme "d'un moi", parce qu'il y en a tant que je ne saurais les compter.

Cette manière de scander le temps, cette façon d'habiter l'espace me ravit sobrement. J'en parle, à demi-mots, de peur de voir l'autre fondre sur eux et de sa baguette attirante les faire se lever pour lui, les faire ramper de concert, esthétique du vide et des tourments. Tout de même, j'en parle, moi qui ne pipait mot de la chose.

Et quelle est-elle cette chose qui se compte en nombre de pulsations cardiaques, en durées de regards, en quantité d'énergie cinétique, en degré thermiques échappés, négentropie de l'anthropie?

C'est maintenant, c'est ici, c'est cela, c'est le lendemain que chante le présent qui l'avale.

C'est un lieu? Oui.
C'est un moment? Oui.
C'est autre chose? Aussi.

C'est bien des choses en somme, un concept de plus qui ne tient dans aucun concept, un parallélisme ontique dont l'auteur de ces mots est le carrefour vibrant de vie.

vendredi 4 octobre 2019

Méditations autour de la croyance et de la raison

Les gens comme moi ne parviennent pas à accepter le fondement irrationnel de la raison. L'action s'en trouve grandement menacée. L'esprit qui veut tout arraisonner rend les choses si friables qu'aucune fondation n'est possible. Cet esprit devient le mouvement pur, mais intranquille puisque inconscient de son but, causé par l'extérieur, en réaction aux choses. S'il cherche quelque chose, c'est l'existence d'un appui, d'une fondation à partir de laquelle bâtir un abri; mais, par sa disposition, il a fait de cette possibilité d'un fondement une chimère.

Pourtant, si la raison marche ainsi - quand bien même serait-ce à son encontre - c'est qu'un fondement préalable est déjà posé, bien qu'ignoré - sciemment ou non. Un tel esprit part du principe stable qu'aucune croyance ne peut être fondée de manière absolue. Il cherche la justification des croyances par la rationalité, ce qu'il ne peut précisément trouver puisque celles-ci sont une condition de possibilité de la raison même. La raison est consubstantielle aux croyances comme l'arithmétique l'est aux nombres (c'est à dire aux valeurs qui sont la traduction mathématique du jugement et de la croyance). On imagine difficilement un calcul ne s'appliquant pas sur des variables déterminées, c'est à dire des valeurs.

Ainsi la raison a besoin des jugements qui sont les unités, les valeurs, sur et par lesquelles elle s'exécute. C'est le statut même de ces jugements qui pose problème au rationaliste puisqu'il souhaiterait les voir comme des constantes ou des résultats assurés et définitifs lors même qu'ils sont des variables et des postulats temporaires justifiés de manière relative.

Le rationaliste intranquille cherche à se reposer à l'ombre de jugements absolus produits et adoubés par la raison même alors que celle-ci ne peut que partir d'eux comme postulats et hypothèses nécessaires a priori et donc indémontrables. Pour cela, ces jugements doivent naître hors de la raison et sont irrationnels - sans pour autant être injustifiés.

L'irrationnel et le rationnel sont les deux jambes de l'esprit pensant, ce dernier doit se tenir sur les deux s'il veut s'assurer une marche confortable et saine - il doit aussi pour cela savoir s'asseoir et s'allonger. Qui veut voyager par ses propres moyens ferait bien d'apprendre à marcher sur deux jambes, sans attendre d'elles qu'elles lui fournissent la justification de son périple.

Les croyances sont les briques permettant à la raison de bâtir - de réagencer et de transformer -, il serait absurde de croire que l'on peut vivre dans tous les édifices simultanément ou produire un bâtiment qui soit adapté à tous les contextes et toutes les situations - autrement dit qui soit lui-même tous les bâtiments. Ce fantasme de l'infinité accomplie, réalisée, est un puissant moteur s'il ne devient pas hypostasié. Il n'est que l'horizon qui anime la curiosité du voyageur, une idée régulatrice et non une chose.

À celui qui se convainc qu'il peut toucher l'horizon et le saisir n'est promis qu'insatisfaction, folie et probablement mort par épuisement. L'infini ne se vit pas comme expérience définie, il ne s'enclot pas dans le fini bien que le langage, par l'existence du mot, prête à le croire. Le mot fait signe vers ce qu'il n'est pas.

Nous ne pouvons situer l'infini en nous mais nous sommes situés dans l'infini (ou du moins l'indéfini), de manière absolument relative. Nous serons toujours quelque part à quelque moment par rapport à un référentiel donné, et bien que le regard puisse embrasser de vastes étendues, il ne peut saisir ce qui est sans fin. Le regard lui-même ne peut naître et se projeter que d'un point précis. Le regard enfin n'est pas celui qui observe.

La raison n'est qu'un outil. Le paysage vécu est fait de croyances et la raison est une force qui s'exerce sur les éléments de ce paysage qu'elle contribue à façonner. Nous vivons dans le paysage. Mais si la force peut interagir avec lui c'est qu'elle partage nécessairement une part de sa nature, elle est donc aussi paysage mais dans une perspective différente. Ce dernier, pris comme ensemble d'éléments déterminés est une représentation spatiale de l'expérience. La force, vue comme dynamique abstraite s'appliquant sur le paysage est elle une représentation temporelle de celui-ci. En tant que temporalité nous sommes infinis puisque processus même de définition. En tant que spatialité nous sommes déterminés et figés sous la forme d'un objet.

jeudi 5 septembre 2019

Pendant que les champs brûlent

Le feu brûle quelque part. Au-dehors: dans l'âtre de cette maison familiale au creux du froid d'hiver qui alourdit le temps dans sa course mortelle. Au-dedans: puisque cela n'est que souvenir qui m'étreint tout au bout de l'été qui s'éteint. Ces flammes ne sont peut-être rien: sensations oubliées qui forment des images troubles. Tout vacille, comme mon identité. Tout se brouille comme les couleurs au-dessus du foyer, ondoyantes vapeurs qui coulent vers le ciel comme si la bonde de notre univers s'était logée vers le haut. Toute chute est une vertigineuse ascension.

Maints feux brûlent en moi, à différents niveaux, dans d'indéfinies dimensions; combien en reste-t-il que j'ignore encore? Je terminerai mon journal lorsque tous ces feux si lointains s'uniront dans l'instant, en formant ce bouquet de fleur unique. Lorsque s'abolira la différence, adviendra l'unité absolue, l'éternité pleine, fusion des choses et des idées. Sans différence il n'y a rien.

Mais tout en songeant cela j'ai d'innombrables feux qui brûlent au-dedans de moi, marquent la cadence de tant de paradigmes, de réalités indicibles parfois, qui s'écoulent avec le temps. Chaque foyer ardent, une temporalité singulière, un rythme.

Pendant que les champs brûlent, je suis l'horizon qui observe, l'immense foyer de tous mes incendies.

jeudi 28 février 2019

Un homme à la mer

J'embarque à bord d'une barrique imbriquée dans le bout d'émotions qu'est la grand-vie.
Bien sûr le bois craque et tous genres d'émotions viennent lécher les bords de mon navire,
Mais tout avance quand même, envers et contre tout, malgré la claque des embruns et les destins du piège.
Oh pardon! Les pièges du destin... Ma langue fourche et prend parfois les mauvais chemins.
Mais sur cet océan courbe, toutes les directions mènent à l'horizon
C'est à dire au présent qui se défait d'enfanter.

J'habite un grand carrefour d'où je surveille les futurs possibles
J'envoie des ombres de moi-même me conter l'indicible
Tandis que le flux mouvant du temps sans cesse prélève son impôt
Sous la forme de liens qui se défont, de vis qui se détachent, de fragments qui pourrissent, de pétales qu'on arrache.
Et le monde s'érige sur celui qui s'écroule.

J'habite un noeud de glyphes aux profusions sémantiques
J'y puise l'eau fraîche des nymphes qui arrose mon âme
Et donne à ma mélancolie la forme des poèmes
Où se déposent en alluvions mes larmes de bohème.

lundi 14 janvier 2019

Transe lucide

Si l'âme était un ciel
Où se déversent un à un
Les souvenirs trop lourds

Un orage infernal qui forme les torrents et dévore les jours
De ceux capable de manger les humains et les fleurs
Et ces choses fragiles au vénérable coeur...

J'aimerais être ce ciel qui se défait de tout et gicle sur les faces
Pour sans vergogne aucune éclater en sanglot tout contre la surface
De cette terre où l'éther se mélange en des passions boueuses
Et voir le sol enfin se recouvrir d'une marée glorieuse

L'eau pure du ciel descend pour se souiller
Et l'âme trans-lucide y vient alors mouiller
Les gestes d'un destin livide
Le fil élimé de la vie qui n'est que long suicide

Et la musique monte et s'élève
Comme nouvelle sève animant les cieux tristes
Tandis que la pluie lave la bouche sale où s'enkyste
Les mots que docile on avale comme un liquide amer

Un univers se meurt
Pour que vienne autre chose
Peindre en neuves couleurs
Des horizons d'osmose

Car il est temps enfin
De s'offrir à la faim
D'une nature dévorante
Qui d'hier, patiente,
Ourdit ce qui sera demain

Peut-être est venu le temps de la mise à mort
Que le taureau prête le flanc au pieu qui le perfore
Ce temps est indecent
Qui d'une main reprend l'indéfini trésor

Je ne sais si le chemin parcouru
Aura fait avancer la vie vers son inaccessible but
Mais chaque larme bientôt sera tarie
Et même les cieux larges
Inévitablement seront arides

Bientôt plus un mot qui ne dégouline
Pas même la finesse d'une discrète bruine

La messe est dite
L'âme en liesse s'effrite

Le dernier point efface l'histoire qui fut contée
Pour de nouvelles traces aussitôt enfantées