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jeudi 7 décembre 2023

[ Terres brûlées ] Nécrosynthèse

Être une station d'épuration dans le monde pestilentiel d'aujourd'hui. Embourbé dans la glaise purulente du siècle, tout au fond des eaux usées, parmi les particules d'antibiotiques, de métaux lourds et de micro-plastiques. Attendre dans les eaux croupies, parmi les odeurs injurieuses, brasser le sang souillé la sanie flavescente, infusion de toxines à vous brésiller l'âme: ô poison psychotrope...

Être stercoraire jusqu'à vous rendre nauséeux, que s'accroche à votre peau l'odeur méphitique des coprolites infâmes que vomissent les âmes stationnaires et qui marinent dans le temps perdu, le temps déçu, qui n'ouvre sur nul avenir.

Je prends plus que ma part de la souillure environnante et pareil au jasmin, je filtre un philtre excrémentiel pour en exsuder le dosage subtil qui donne à mes écrits ces senteurs si florales. La poésie n'est rien d'autre que ça, fouiller dans les décombres, se nourrir de la mort et de la pourriture, produire les chants fertiles où poussent coquelicots et muguets, où croît l'épi tout blond des blés -- et se décline en maints bouquets l'œuvre alme d'un projet.

Projet pancaliste s'il en est, la vie n'a d'autre but que produire des formes qui, toutes, rendent un hommage singulier à l'ordre du cosmos.

Être propre, toujours sourire, afficher au-dehors des façades polies, optimisme béat qui ravie les idiots, s'habiller de velours et de froufrous prisés, exhaler le parfum de chimies hygiénistes, paraître, paraître, toujours paraître n'avoir rien en soi d'inavouable ou de sombre, aucune opacité pour voiler le teint clair de face immaculée. Bien porter tout en devanture, sans arrière-boutique déguisée, sans porte dérobée... Techniciens de nos propres surfaces, il faut être étincelant et beau sous le jour scyalitique qui s'effraie de la nuit.

Poète porte en toi la ténèbre honnie, avale un crépuscule à chaque aube qui luit, mâche, digère, intègre les obscurités liquides qui s'écoulent dans nos caniveaux, râcle les égoûts, cloaque des nations, sois celui qu'on fuit, celui qu'on trop médit, celui qui détone par trop dans les salons fleuris de tons artificiels. Absorbe la critique et tous ses adjectifs saturés de crainte qui se plantent en ton cœur et veulent te coudre peau neuve. Laisse faire le monde, laisse le viol avoir lieu, sacrifie ce moi mondain qui n'est rien, rien d'autre qu'un pantin agité par les moires, semblable à tous les autres dans la fourmilière excitée de survivre.

Par une porte dérobée, sous le mur en trompe-l'œil fais tourner l'atelier de tes broderies scripturaires. Que chaque organe tisse la mélopée tragique et que s'opère alors la nécrosynthèse fabuleuse par laquelle sourdent du venin en toi les fleurs intemporelles.

Encore un peu plus de souffrance, le monde aura besoin de toi pour se remémorer l'antique savoir aujourd'hui malmené: l'humain n'est rien d'autre qu'humus enraciné dans le tourment.

mercredi 11 mai 2022

Hormèse

 La conscience m'augmente à mesure qu'elle me déchire et perce, au cœur du centre de mon étendue vacante, un point vital de mon être: celui qui pourrait faire de moi cette totalité close, pleine et entière. Au lieu de ça je m'écoule en humeur noire au-dedans de mon néant intime, comme si ma souffrance même rechignait à m'appartenir, et débondait en mille nuances sur l'épiderme du réel.

Cette maladie je l'ai attrapé assez tôt. La maladie de la conscience m'a été transmise par la douleur, la douleur de l'adolescence et du déracinement, la douleur de la perte et celle de l'amour impossible -- c'est à dire, au fond, de la réunion de soi avec cette altérité qui nous racole comme un vide irrésistible par lequel s'anéantir.

Dès lors que je fus malade, je n'ai cessé de m'élever à des degrés de souffrance toujours plus éminents. Sur les neiges éternelles de mon futile tourment, je plane solitaire et ivre de puissance. Je suis propriétaire d'une chose...au moins...et c'est elle et elle seule.

Ce cancer qui me ronge, toujours plus dévastateur, toujours plus virtuose en son art, est la blessure qui inlassablement lacère mon âme en son destin. De cette peau béante et qui supure, je dois ramasser les lambeaux, recoudre les fissures, les abîmes qui cherchent à me défaire, et...toujours alors...je reviens de plus bel, plus immense et plus fort; aussi vaste que mille univers.

C'est ce combat face à l'altérité absolue, cette entreprise de prédation ontique qui nous définit, échaffaude le seul bonheur qui soit, augmente nos puissances et fait de l'existence cette croissance métastatique qui menace, à terme, d'engloutir jusqu'à la moindre des ressources disponibles.

Impossible coïncidence de soi avec soi, déséquilibre qui fait la marche des destins, qui fait lever le temps comme une houle inarrêtable, asymétrie profonde de l'Être dans sa chute. Nous avons soif parce que c'est cela que la vie d'homme. Nous désirons et par là même engloutissons l'éxtranéité profonde dont on ne sait si elle nous enceint où si c'est là le jet sombre et terrible de notre propre source enfouie.

Nous allons parce que la symétrie est impossible. Et ce qui nous renforce est ce qui nous détruit.

jeudi 16 décembre 2021

Endurer

 J'ai atteint, à un lieu de ma vie, le point d'entropie maximale. Je suis allé toucher la mort, à la lisière de l'existence; tutoyer le Néant au bout de la liberté vaine.

Et je suis revenu. Avec la même tristesse au fond de mes entrailles. Vivant, mais calciné de l'intérieur, comme une lune poussiéreuse et grise. Et j'éclaire d'ombres tout ce que je manifeste: Géhenne soliptique qui me tient lieu de monde. Ô combien il me faut -- sais-tu? -- retenir là mes feux pour ne point te brûler...

Je porte en moi le tourment des lucides, la conscience acérée de ce lien rompu, délaissement d'un quelque chose qui installe à jamais "le silence déraisonnable du monde".

Et peut-être qu'en chaque relation, que j'entretiens avec une portion de l'Être, s'interpose un silence suffisamment profond pour entailler la foi.

Il n'y a pas de foi, je ne sais croire en rien... Il n'y a pas de valeur qui ne soit ramenée à mon inconsistance, pas une transcendance qui ne puisse passer avec succès l'examen du doute.

Défendre des valeurs? Pour quoi faire...? Se rassurer? Justifier le peu de plaisir qu'un accord tacite avec le Réel sait parfois procurer? Et pourquoi ce lien serait-t-il bon pour autrui?

Laisser le monde vous écraser, les autres décorer l'indétermination aux couleurs de leurs peurs... S'ils en ont tant besoin c'est probablement qu'ils ont plus peur encore que nous. Nous qui savons aimer la souffrance dans cette étreinte enflammée qui consume en douceur la substance de nos cœurs.

Nous pouvons supporter le doute pour les autres; et endurer leurs certitudes -- exclusives.

Nous savons faire tout ça: suffoquer lentement, pour que d'autres que nous respirent à plein-poumons.

lundi 21 décembre 2020

[ Terres brûlées ] Mange un crépuscule


 
 
Il reste en mon jardin quelque fleur azurée qu'aucun coeur n'a ravi.
Il faut vite vivre, alors viens respirer
Le parfum d'impossible que j'y fais pousser

La nuit est toute proche, avant après, partout, autour
Il faut bien vivre ma jolie, vient abreuver ton jour
Et mange un crépuscule.

J'avance en l'océan sur un sillon mortel
Une lame de fond la forme du destin
Sur mon cœur l'eau ruisselle
Et scelle mon armure d'airain.

Tends la main et ressens
Comme une vie est éphémère
Il faut cueillir bien mûrs
Les fruits qui vite sont amers
Ce visage serein s'encadre de cheveux
Qui bientôt seront gris
Imprègne t'en les yeux
Prends-le dans tes artères.

Tout le monde peut être preux
En son coeur jeune d'amoureux
Après, l'ardeur est moins candide
Son cœur moins chatoyant
Et les humains qui brillent
Ne sont pas plus vaillants...

Ta bonté aux chevilles
Tu répands dans les cendres
Ta chaude humanité
Par un monde endeuillé

Ton style est celui des poupées
Que garde dans sa chambre
La femme autrefois jeune fille

Sa teinte giroflée
Suffit à faire plier
L'adulte trop docile.

Ce que tu donnes
Je ne pourrai le rendre
Je me demande encore
Pourquoi ton bel espoir
Souffle sur ma blessure.

Ce que tu donnes de toi
Sans aucune rature
C'est ce que, je le sais,
Du fond de mon abîme
J'admire incessamment

Et je suis bien indigne
Moi dont l'âme-tourment
Ne tient que dans les yeux
Et fane dès qu'on la prend.

mardi 23 octobre 2018

Ussel



Ne plus s'arrêter
Pour regarder les routes mourir aux quatre coins du monde
Décider l'horizon qu'on poursuivra le reste des secondes

A-t-on vraiment le choix?
On m'avait marié de force lorsque j'ai débarqué chez toi
De mon pays lointain et ses autres coutumes

Mon âme et ses foraines lois
Enfilai ton costume et fit une prière:
C'était un bref adieu à mon passé posthume

J'avalais goulûment ton amnésie liquide
Faisant de ma mémoire un vase Danaïde
Toi ville que je bus comme un magma brûlant
Où je forgeai mon cœur au-dessous du volcan

Dans ta sagesse hurlante j'ai retrempé mon âme
Je suis sorti tout neuf d'impardonnables flammes
À mon destin s'accrochaient deux sésames:
Un don de comédien et la couleur du drame

Grâce au premier je m'intégrai si bien
Je devins l'un des tiens
La douleur sur tes murs
D'un tourment déjà mûr

Tu m'offris une scène où répéter mon rôle
Jouer sans discontinuer à faire mourir l'enfance
Mais le bougre résiste, il faut tant de violence
Qu'alors enfin, tout ça n'est plus vraiment si drôle

Il faut être cruel pour devenir adulte
Et prendre pour la chance ce qui n'est qu'une insulte...

Débarqué dans le monde des Hommes
Encore tout titubant
Il faut apprendre à vivre
Et rire tout en doutant
Je n'ai pas su je crois
J'étais trop débutant
Mes pensées furent des poids
Qui trouèrent chaque instant

À chaque crépuscule
Que de ratures alors
Et la course au trésor
Dans d'imbuvables bulles

Mais que je me rassure
J'ai mis bien du génie
À tanguer d'un pas sûr
Sous le néon des nuits

Pour quelques sous
le sang devient liqueur
La ville sans dessous
Susurre à notre coeur
Des mots tantôt si doux
Qui bientôt vous écoeurent

Pique, érafle de tes ronces
La peau si vierge et par trop tendre
Trace sur les jeunes coeurs
Les plaies que le temps implacable ponce

Au fond du sombre abîme
Petit homme se glisse
Comme en l'habit de brume
Qui couvre les yeux tristes

Depuis tes rues de neige
Ussel j'ai tant marché
Mes pas font un cortège
Qui viennent entacher
Le wagon de l'enfance
Qu'on ne peut détacher

Moi qui croyais pourtant
Que ma vie au complet
N'avait été que fuite
Je contemple étonné
Le grappin des couplets
Qui jettent tant de ponts
Vers un passé sans suite
Qui malgré tout répond

Déçu, peut-être
Au fond qui sait
Si les chemins abandonnés
Ne sont pas là pour ça
Fenêtres qui éclairent
Les possibles reniés
Perspective éphémère
Sur nos éternités

Ussel...
Curieux comme ce nom sonne lointain
Évoque la musique de royaumes anciens
J'ai traversé tes glaces comme un déporté
Mais d'aucuns de tes fils m'ont appris à t'aimer

Je languis par moments
Le reflet de tes cieux
Que récoltaient antan
L'escarcelle des yeux

Assis dans le présent sans âge
De ce train pour Limoges
Tout contre la fenêtre
Et comme un lourd présage
Je rêvais d'exister
Sans plus avoir à être

Je me désaisissais de moi
Comme d'un lourd bagage
J'étais heureux je crois
D'être passager clandestin
De mon propre voyage

Oh je pouvais enfin
Contempler le mirage
D'un temps que rien n'atteint
Et qui nous dévisage

En moi je souffle alors
L'haleine attendrie de ces songes
Dessine sur l'oblong hublot
Qui ouvre sur l'aurore
Ce petit mot précis
Qu'encore j'interroge:

Ussel


_____________ ALTERNATIVE _________________

Ne plus s'arrêter
Pour regarder les routes mourir aux quatre coins du monde
Décider l'horizon qu'on poursuivra le reste des secondes

A-t-on vraiment le choix?
On m'avait marié de force lorsque j'ai débarqué chez toi
De mon pays lointain et ses autres coutumes

Mon âme alors régie par de foraines lois
Enfila ton costume et fit de lourds adieux:
C'était une prière pour un passé posthume

J'avalais goulûment ton amnésie liquide
Faisant de ma mémoire un vase Danaïde
Toi ville que je bus comme un magma brûlant
Où je forgeai mon coeur au-dessous du volcan

Dans ta sagesse hurlante j'ai retrempé mon âme
Je suis sorti tout neuf d'impardonnables flammes
À mon destin s'accrochaient deux sésames:
Un don de comédien et la couleur du drame

Grâce au premier je m'intégrai si bien
Tu fis de moi l'ado semblable à tous les tiens
Malgré la forme étrange imprimée sur tes murs
De mon ombre aux couleurs de tourment déjà mûr

Tu m'offris une scène où répéter mon rôle
Jouer sans plus cesser à faire mourir l'enfance
Mais le bougre résiste, il faut tant de violence
Qu'alors enfin, tout ça n'est plus vraiment si drôle

Il faut être cruel pour devenir adulte
Et prendre pour la chance ce qui n'est qu'une insulte...

Débarqué dans le monde des Hommes
Encore tout titubant
Il faut apprendre à vivre
Et rire tout en doutant
Je n'ai pas su je crois
J'étais trop débutant
Mes pensées furent des poids
Qui trouèrent chaque instant

À chaque crépuscule
Que de ratures alors
Et la course au trésor
Dans d'imbuvables bulles

Mais que je me rassure
J'ai mis bien du génie
À tanguer d'un pas sûr
Sous le néon des nuits

Pour quelques sous
le sang devient liqueur
La ville sans dessous
Susurre à notre coeur
Des mots tantôt si doux
Qui bientôt vous écoeurent

Pique, érafle de tes ronces
La peau si vierge et par trop tendre
Trace sur les jeunes coeurs
Les plaies que le temps implacable ponce

Au fond du sombre abîme
Petit homme se glisse
Comme en l'habit de brume
Qui couvre les yeux tristes

Depuis tes rues de neige
Ussel j'ai tant marché
Mes pas font un cortège
Qui viennent entacher
Le wagon de l'enfance
Qu'on ne peut détacher

Moi qui croyais pourtant
Que ma vie au complet
N'avait été que fuite
Je contemple étonné
Le grappin des couplets
Qui jettent tant de ponts
Vers un passé sans suite
Qui malgré tout répond

Déçu? Peut-être
Au fond qui sait
Si les chemins abandonnés
Ne sont pas là pour ça
Fenêtres qui éclairent
Les possibles reniés
Perspective éphémère
Sur nos éternités

Ussel...
Curieux comme ce nom sonne lointain
Évoque la musique de royaumes anciens
J'ai traversé tes glaces comme un déporté
Mais d'aucuns de tes fils m'ont appris à t'aimer

Je languis par moments
Le reflet de tes cieux
Que récoltaient antan
L'escarcelle des yeux

Assis dans le présent sans âge
De ce train pour Limoges
Tout contre la fenêtre
Et comme un lourd présage
Je rêvais d'exister
Sans plus avoir à être

Je me désaisissais de moi
Comme d'un lourd bagage
J'étais heureux je crois
D'être passager clandestin
De mon propre voyage

Oh je pouvais enfin
Contempler le mirage
D'un temps que rien n'atteint
Et qui nous dévisage

En moi je souffle alors
L'haleine attendrie de ces songes
Dessine sur l'oblong hublot
Qui ouvre sur l'aurore
Ce petit mot précis
Qu'encore j'interroge:

Ussel

lundi 11 septembre 2017

Courage!



Courage! Souquez matelots!

Fendez les flots de cette vie!
Même la tempête s'alanguit.

Souquez frères stellaires des confins!
Ramez vers l'enfer et sa fin!


Courage! Coeurs débridés!

Frêle esquif à travers les flots
Coeur de suif mordu par les crocs.


Courage!

Derrière chaque nuage, un soleil qui rugit
L'envers de chaque orage, un rayon qui surgit.


Courage mes amis!

Affrontez les passions qui font trembler vos nuits
Un merveilleux silence vient pour panser le bruit.


Force mes amours!

Nul chemin ne s'emprunte sans détours
Aucun matin qui ne devienne un jour.


Bandez les muscles!

Chaque éclair une énergie en moins
Pour les coups de tonnerre qui vont mourir au loin.


Courage, humains!

À travers les brumes incolores
Perce la promesse d'un chamarré trésor.

Voyez déjà, comme le tumulte retombe
La force de vos bras valait bien mille bombes.


Encore, amis!

Derrière le tourment délétère
Par delà les souffrances de la terre
S'en vient l'onguent d'un repos éphémère.


Courage sisyphes!

Cette vie à une fin, comme vos douleurs enfin
Une chute indolore qui transforme en destin.


Courage!

Regardez comme chute Héméra
Dans sa gloire nimbée
Fait de tous tumultes un beau drap
Que l'aurore ôterait...

Souque! Rame! Frappe! Hurle!
Traverse la tourmente
D'un regard incendiaire!

Souffre, saigne, rage, tend
Vers le prochain instant!

Nous sommes tous les bruyants enfants
D'un trop juste parent
Chacun de nous son fragment
Dans le long cours du temps


Et dans l'infernale valse qui les malmenait, les petits êtres pouvaient entendre - étaient-ce alors les vents qui chantaient? -:

"Un soleil est le coeur d'un ami, et cet astre a sauvé bien des vies!
 Une étoile est l'amour d'un ami, et son souffle a crevé bien des nuits!"


Sur un dessin d'Amine Felk, texte de moi-même.

vendredi 28 juillet 2017

Ordalie

Où sont fleurs et grands arbres
Et ces sourires qui vous désarment
Je n'ai qu'un pré gris et macabre
À iriser de mille larmes

Le quotidien s'avance vite parmi les champs ébouriffés
La mort est si subite et le monde imparfait

Ciel mes secondes! Me les a-t-on volées?
Cette joie qui abonde où s'en est-elle allée?
Sur mon feuillet d'horaires mon esprit succombe
Chaque jour un enfer qui dessine ma tombe

Mes poèmes sont des arbres en automne
Qui s'effeuillent et s'assèchent du train-train monotone

Et ma jeunesse qui voudrait s'enfuir
Au sein de mon passé pour enfin resurgir
Si tu t'en vas que me reste-t-il?
Seule l'odieuse angoisse de ces gestes futiles?

Revenez éclats de tendresse et volonté naïve
C'est à vos côtés que je veux ma dérive

Hélas nécessité tient tout cela dans la creux de sa main
Si féroce et si ferme qu'elle a dompté demain
Sur le tableau du temps effacé les chemins
Pour que résonne en elle ma complainte d'humain

Malheurs et pleurs, tout venin ton nectar
Et tu fais de mes peurs, ton sublime étendard

Mais peut-être qu'un jour je pourrais te chanter
Un bel ode à l'amour, d'autres tonalités
Si tu dévies ton cours et me rend mes possibles
Je me ferais velours et te rendrais sensible

Je vois bien que Destin n'acceptera jamais
De quitter tragédie qui l'a si bien charmé

Je suis vaincu, je renonce à changer
Ce que les Moires ont de leurs mains tissé
Au fond c'est bien vrai, y a-t-il plus sublime
Que les sursauts tragiques d'un destin qui s'abîme