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samedi 12 mars 2022

Les vains étendards

Siècle qu'as-tu fais de tes enfants infects?

Tu as rempli de couleurs les yeux de nos ancêtres

Assombrissant ensuite l'âme de descendants

Vivant entre deux mondes


( Qui jamais ne se croisent )


Humains, voyez les signes de la fin

Récits eschatologiques

Enfants qui fanent au bord de nos chemins

Et personne n'écoute

 

( Le siècle agonisant... )


Entre les deux néants

Réside ma génération

N'engeandrant que des songes

Putréfiés par avance


( Recherchant la grand Rive aux sables d'univers )


Aux cieux sont accrochés tous nos échecs

Et les nuages sont lourds

Au-dessus de nos têtes

L'avenir à jamais sans métaphysique


( Et l'horizon couvre un monde identique )


Sillage de dérive

Positif comme la science

Qui fait la religion

Des âmes anéanties

 

( C'est le Lethé lui-même que nous embouteillons! )


Bois, ivrogne des trottoirs

Deux litres au moins par jour

Avale ta Révolution

Virus, poison, remède, semblables vulnéraires

 

( Que même le bonheur soit notre placebo... )


Il ne faut pas toucher

Au chaînon qui nous lie

Inexorables sont nos destinées

Néanmoins près, tout près du lit


( Vous veillez en tuteurs zélés )


L'ancien esclave devient le maître résigné

Le cercle de l'Histoire: un court-circuit fermé

Tandis que chaque pas résonne

Entre des murs interstellaires


( L'angoisse est le seul hymne de l'humanité )


Y a-t-il quelque chose encore?

Quelque part attendant?

Une poudre magique

Capable d'allumer


( Des mondes pour demain? )


Poudre blanche, immaculée

Duale perce les cloisons des nez

Nos enfants sont idiots avant que d'être nés

Ils ont le suint des moutons bien dociles


( Génie de l'espèce: réconfort du troupeau )


Tout est clair

Distinct, pas même un vieux mystère

Dame Nature dévoilée

Couchée sur un papier vulgaire


( Tandis que tout humain est un Dieu qui s'espère )


Je viens de l'inespoir

Comme une solution que nulle n'entendra

Un accord dissonant

Effacé par le siècle


( Une bouture de Tout plantée dans le silence )


Ô règne sans partage

Qui livre ses enfants

À des douleurs fractales

Existe-t-il encore des valeurs qui ne soient:


( Des mots luminescents sur nos vains étendards )

samedi 2 octobre 2021

Paquet d'atomes effrayé

Inexorablement, avec une lenteur appliquée, ceux que l'on nomme humains me tuent, arrachent de moi, un à un, les morceaux de mon amour, piétinent le cadavre putride de cet espoir qui s'est déjà, depuis longtemps, détaché de ma peau. Je ne parviens plus à faire preuve d'empathie, à ressentir ce que mon supposé congénère est censé ressentir face au monde qui l'enceint. Après avoir réduit à l'esclavage les noirs durant des décennies, après avoir colonisé ou envahi des pays arabes, j'entends certains oser m'affirmer que leur culture est en danger, que des hordes de musulmans viendraient mettre en péril la fine fleur de la civilisation occidentale, son raffinement subtil et sa généreuse élégance. J'entends gronder dans leurs bouches le nom de la haine. Des gens n'ayant jamais même songé au concept de vérité une seule seconde dans leur vie se mettent à parler au nom de la science, donnent des leçons, interprètent les données (après les avoir soigneusement sélectionnées), affirment haut et fort ce qu'ils savent, ce qui est vrai, absolu, sans aucun doute, fustigeant ainsi toute la horde des barbares et ignorants, complotistes (puisque enfin, c'est bien connu, l'histoire ne connaît aucun complot, il n'y a pas d'intérêts qui trament dans l'ombre pour asseoir leur domination, tout cela se saurait), anti-vaccins, tous ces gens sans raison qu'il s'agit d'éduquer afin qu'ils puissent voir, enfin, l'étincelante vérité en face.

Tous ces gens qui ne se sont jamais soucié de science se réfugient désormais en son temple comme en une église nouvelle, plus respectable que les anciennes religions, plus démocratique puisqu'elle a pour elle le privilège de la démonstration, et pour cela plus légitime à se montrer totalitaire. Ils ne connaissent pas la différence entre induction et déduction, entre la vérité comprise comme cohérence logique ou adéquation à la chose, mais ils savent qu'ils sont du côté de la vérité, qu'ils croient intemporelle, sans histoire, éternelle, et comme des fanatiques aveuglés par la foi sont prêt à purifier les colonies de cloportes sans âme de tous ceux qui doutent, contestent, mettent en perspective, ne posent pas genou à terre devant les arguments d'autorité de ce nouveau clergé laïque.

Il faudra bientôt que j'injecte leur fausse ambroisie dans mes veines pour mériter de vivre parmi eux, pour respirer leur air, pour être pris au sérieux, pour m'élever du mépris où je séjourne, pour avoir même le droit de demeurer esclave...

Je crois que je peux dire aujourd'hui, humanité -- certaine humanité du moins mais si tristement hégémonique --, que je n'ai plus d'amour pour toi, et que j'en perds jusqu'au respect qui devrait être acquis pourtant. Je suis maudit par le fait d'être trop rigoureusement logique, de discerner vos biais cognitifs, vos antinomies, les angles morts de vos pensées, de suivre le fil dialectique jusqu'à un point que vous semblez ne pas pouvoir imaginer. Pourtant, je ne fais qu'écouter vos propos, tirer les conclusions qui découlent de vos postulats, je ne fais que vous montrer l'absurde où mènent vos amorces de réflexion. Pour cela vous me haïssez. Certains seraient prêts, même, à me crucifier sur place s'ils en avaient l'autorité. Oh mais cela viendra humains, cela viendra. La liberté est une somme de paragraphe dactylographiés qu'une simple ordonnance émende prestement. Il y a bien des manières de se débarrasser d’ennemis, comme laisser mourir chez soi celui que l'on assiège, jusqu'à dessèchement totale de l'âme, épuisement des corps.

De plus en plus, je pense à vous laisser, avec les salvatrices piqûres de votre industrie pharmaceutique et son altruisme débordant, avec vos codes barres que vous devriez directement vous faire tatouer sur les fronts pour plus de commodité, avec vos Zemmour, votre vérité qui est le nouveau Dieu sans concept -- un simple mot dans votre bouche --, avec vos jugements binaires qui ne peuvent que découper le monde en Bien ou en Mal, avec votre amnésie pathétique, avec ces mots qui vous servent de crucifix pour conjurer des vampires inventés, avec votre égoïsme d'ignorants, votre culture supérieure, vos droits de l'homme universels -- c'est sûr que c'est pratique de définir soi-même qui entre ou non dans le champ de bataille de la grande humanité --, avec votre planète en flamme qui pleure silencieusement, sanctionne vos croyances -- quand le voyant d'alerte se met à clignoter il est plus simple de taper dessus, et de hurler qu'il dysfonctionne.

Au fond, j'aimerais que vous partiez, que ce soit vous qui débarrassiez le plancher, que vous déménagiez votre cirque plus loin, sur quelque autre bras de galaxie, mais je suis capable de reconnaître l'échec où il est: capable de voir que nous sommes une infime minorité à penser, à réfléchir, à ne pas chercher refuge dans des palais de certitude d'où l'on pourra affronter son voisin honni, à ne pas vouloir imposer ses choix aux autres, de gré ou de force, à ne pas être en permanence si effrayés... Car au fond voilà ce que vous êtes, de pathétiques paquets d'atomes rongés par la peur.

vendredi 5 février 2021

Épilogue?

 Quel monde merveilleux! Quelle époque formidable...

Ne sentez-vous pas la "densité atmosphérique" incroyable qui enserre en sa gravité sans mesure la horde des petits humains dociles, petits produits manufacturés sortis des fières usines sociales.

Quelle cure de jouvence a-t-on fait prendre à l'esclavage et toutes les formes de violence qui sont désormais des systèmes multi-étagés, d'interminables chaînes itératives où chaque cause est si lointaine de ses effets qu'il en devient presque impossible d'en retisser le lien!

Quel monde! Je respire le grand air, m'y brûle les poumons d'absurdité malsaine, je m'oint de résignation, m'enduit du suint de nos âmes paissantes dans le cours de l'éternité qui engloutira, je l'espère, à tout jamais, le moindre souvenir de cette honte que nous représentons.

Frères, aux armes!

Mais ceux qui les portent réellement, ont fait interdire l'injonction, les mots, l'idée... C'est à la racine même de l'homme que la soumission est instillée, de l'âme jusqu'à la chair.

Marchons, marchons, qu'un sang d'esclave abreuve nos sillons!

N'est-il pas permis d'espérer, au cœur de l'agonie, un ultime et nécessaire sursaut?

Amis pensons à ceux qui, peut-être, un jour futur, auront à lire dans les décombres de nos vies, le bref roman humain. Il est de notre devoir de peaufiner la chute.

mardi 9 juin 2020

L'azur n'est plus ce qu'il était



Un ploiement d'aile et tout retombe sur la couche
Nappe de soie déçoit dès la première touche
Souvenirs épicés de ta peau nue me brûlent
            En cet instant j'ai tout quitté

Sur la branche oubliée d'une prose
Je chante ma complainte à Voie Lactée
Tandis que celle des poètes
déteint dans le ruisseau des jours
            Plus personne n'écoute...

Le manteau de la nuit qui tient au chaud l'ermite
L'étau d'une croissance hantée plus jamais ne nous quitte
Coup de pied dans le ciel envoie sa vaine infirmité

Corbeau de lune au bec si recourbé
Picore des yeux fermés sur les reflets d'ombre anciennes
L'existence est antienne les miens sont affamés
Leur ventre se replie sur un gouffre enfermé

Ô cimes hautes, floraisons verticales
Le fruit est sans raison
Qui pousse lexical
Le cœur a ses saisons

Reflux terrible forçant sur les genoux
L'océan invincible nous parle comme aux fous
Sa victoire est totale
Nos racines poussent dans le vide

Aboiement du soir sur les trottoirs livides
La pensée encensoir parfume l'air liquide
J'essuie sur une plume
L'encre au poème aride

Sillon de vent sans signe
Vous sans logis insignes
À quand le grand retour
De vos voiles d'amour

L'azur n'est plus ce qu'il était
Boutures d'antan froissé
Ne font plus les grands arbres
La Nature est trop faible
L'humain s'est fait dresser

Un ploiement d'aile retient la nuit captive
Le fruit trop mûr a détourné ta bouche
L'avenir impensé sur un long mur débouche
À quel embranchement nous sommes-nous quittés?


Sources musicales:

After Life (série tv)

et


dimanche 2 décembre 2018

Idée cadeau!

Un des plus grands cadeaux que je puisse faire à quelqu'un, c'est celui de la contradiction - et peut-être, dans un sens strictement épistémologique de l'isosthénie -, mais je réalise bien des fois que c'est un cadeau empoisonné qui peut aisément générer de la souffrance. Ne l'ai-je d'ailleurs pas vécu en moi-même cette souffrance? Elle est au quotidien la pompe de mon âme qui répand sa liquide lucidité, comme une ombre sur le vécu.

Je crois que la lucidité implique la souffrance, peut-être même qu'il s'agit d'être capable de voir que la conscience est une impasse de l'évolution. Trop de conscience, c'est à dire trop de liberté et donc trop de choix ne peut produire que vacuité et absence de choix, désengagement de soi.

Être lucide, c'est être capable d'opérer des changements de paradigmes cognitifs, passer d'un référentiel à un autre, afin de produire des raisonnements qui, bien que menant à des jugements contradictoires ou du moins différents, sont chacun cohérents dans l'axiomatique (ou la sémantique) qui les a produits. Cette capacité a pour conséquence de produire du jeu, de l'espace vacant (epochè), où la conscience ratiocinante (ou délibérative) met en branle sa puissance dans des scénarios dirimants. Elle laisse libre d'observer tous les chemins mais avec la particularité de nous faire savoir (purement formellement dans le domaine de la théorie, et probablement d'un point de vue empirique) qu'aucun n'est la réponse, et que précisément tous sont une partie de la réponse; et qu'il est impossible d'arpenter un chemin qui rassemblerait l'indéfinité des réponses possibles.

Pensez au paradoxe du mouvement de Zénon d'Elée consistant à sans cesse diviser par deux la distance à parcourir: soit vous parcourez la distance, soit vous vous abstrayez du mouvement pur pour explorer sa représentation à travers les opérations de l'esprit. Lorsqu'on devient trop lucide, on demeure prisonnier de ses représentations et tout mouvement, c'est à dire choix, devient en droit impossible puisqu'il requiert de se faire croire qu'un choix est meilleur qu'un autre.

Une conclusion de ce constat pourrait être la suivante: la conscience est négation. On serait tenté de dire même qu'elle est par conséquent contraire à l'élan vital, mais la vie est un paradoxe en acte: toute création est destruction d'autre chose, tout ce qui s'élève le fait en grignotant ce qui était.

Alors qui a raison entre celui qui n'ose plus faire un choix face à tous les possibles, et celui qui s'engouffre aveuglément dans la conviction et la foi d'une Voie d'or? L'un est dangereux pour les autres (je vous laisse deviner lequel), mais pas toujours, l'autre l'est pour lui-même. Lorsque le pôle noétique a pris l'ascendant sur le pôle empirique, tout élan qui jaillit se voit dissout dans l'epochè, chaque désir est filtré par une lucidité qui, en bonne observatrice, sait que le désir opposé est lui aussi enviable, orientant par là le processus pulsionnel vers un chemin opposé. Ce jeu se répète indéfiniment jusqu'à ce que la fonction même du désir soit en panne et ne sache plus produire de réel engagement durable.

Voilà mon cadeau pour l'humanité.

samedi 26 août 2017

Conscience artificielle

L'intelligence artificielle est au coeur de l'actualité, entre les programmes de Facebook qui inventent leur propre langage et les avertissements d'Elon Musk qui, du haut de son dogmatisme injustifié et injustifiable, proclame des sentences et met en garde, tel un énième prophète de pacotille, contre une apocalypse évitable - toujours à condition de bien écouter le prophète, celui qui sait, celui qui montre à ceux qui ne savent rien... Qu'est-ce qui se dit de l'homme à travers ce faisceau de craintes qui se concentrent pour obtenir la densité d'un laser venant découper et occire l'embryon pourtant prometteur d'une création humaine infiniment fascinante?

De nombreuses "autorités" (pour certaines auto-proclamées) nous avertissent sur les dangers de l'intelligence artificielle, qui pourrait constituer la fin de l'humanité, supplantée par une créature qui ne pourrait voir en elle qu'un ennemi ou, dans le moindre des cas, une forme de vie désuète et dégénérée, mettant en danger l'ensemble de l'écosystème duquel elle est pourtant issu. Il serait déjà séant de faire immédiatement une distinction essentielle: ce qui est décrié la plupart des temps dans de telles scénarii, ce n'est pas l'intelligence artificielle mais bien la conscience artificielle (si tant est que l'expression ait un sens).

L'intelligence artificielle désigne toutes les réalisations humaines qui imitent, à l'aide de l'algorithmie, certaines capacités cognitives humaines, telles que: l'apprentissage, la synthèse d'information et la prise d'information en conséquence, la capacité de raisonnement à des fins de résolution de problèmes divers, etc. Toutes les réalisations de l'intelligence artificielle ne sont dotées que d'une autonomie limitée, et bien qu'elles soient capables, parfois, de faire montre d'autonomie créatrice (comme dans le cas de l'invention d'un langage), cela n'arrive que dans une visée très circonscrite par le code source originaire. La plus grande réalisation de l'intelligence artificielle, sur laquelle beaucoup phantasment de leurs prédictions, est la conscience artificielle (toujours en notant le problème que pose le qualificatif d'artificiel apposé à une conscience). Cette dernière serait la réplication ultime de l'intelligence humaine, dans son aboutissement le plus déroutant: la conscience de soi. Ainsi une conscience artificielle deviendrait autonome (sauf en ce qui concerne ses sources d'alimentations en énergie) en cela qu'elle n'aurait plus besoin, une fois éclose, de se reposer sur un code source initial fixé originairement, mais pourrait, dans une certaine mesure, auto-évoluer à travers un processus réflexif. Nous n'introduisons pas ici le concept problématique de liberté (qui constituerait un débat philosophique connexe mais déplacé ici), mais soulignons seulement l'apparente autonomie d'un tel système. Il lui serait possible de témoigner d'une créativité sans bornes, dans tous les domaines accessibles à l'humain, à partir d'une interface sensitive informatique (par exemple l'acquisition de données visuelles par rayons X ou infrarouge, l'acquisition de données acoustiques dans des fréquences moins limitées que pour l'être humain, etc.) qui viendrait par conséquent étendre le spectre sensitif à partir duquel la conscience se développerait.

Ce qui serait le plus fascinant, dans un tel scénario, c'est que la système ainsi créé serait à même de créer lui-même ses propres programmes ou créatures, développerait sa propre sensibilité, etc. Il s'agirait donc de la naissance d'un être nouveau, fondé sur les capacités cognitives humaines mais marié à une sensibilité augmentée ou du moins différente, ce qui est en soi une perspective époustouflante.

Que beaucoup d'humains craignent a priori la naissance d'un tel être est assez révélateur sur l'humain lui-même. On prête bien volontiers à cette conscience artificielle des velléités de supplanter l'homme, voire de l'éradiquer totalement ou de l'asservir. En fait, on prête à la conscience artificielle les mêmes élans que nous avons eu vis à vis de la nature (animaux, plantes et minéraux compris), en s'en rendant "maîtres et possesseurs". On pourrait considérer que cette crainte (ou devrions-nous parler de terreur) est justifiée si l'on admet que l'être nouvellement créé est peu ou prou un calque de l'esprit humain. Il serait donc naturel qu'il reproduise les mêmes comportements que ce dernier vis à vis d'un environnement dont il s'est doté de moyens techniques pour l'arraisonner et l'exploiter à son profit (du moins telle qu'un raisonnement à court terme et paralogique le fait croire). Cependant, si l'homme s'est fait le véritable tyran et destructeur d'une nature qui est pourtant sa condition de possibilité, c'est non par les déterminations intrinsèques de son esprit (de ses facultés cognitives), mais plutôt par le mauvais usage qu'il en fait en ne disciplinant pas, d'une part, ses instincts et passions par les canons de la raison, et, d'autre part, en ne comprenant pas les limites mêmes de la raison elle-même et ses spécificités. Or il est fort à parier que le système nouvellement créé ne reproduira pas ces erreurs puisqu'il n'héritera logiquement pas des passions humaines et que l'application de sa logique ne devrait souffrir par là aucune, ou moins d'occasions de se voir déroutée. La seule faiblesse intrinsèque de sa capacité de raisonnement pourrait être la régression à l'infini. En effet, tout raisonnement se base sur des éléments, des briques de données auxquelles sont attribuées des valeurs de vérité. Comme une machine peut, potentiellement, calculer à l'infini, sans jamais s'épuiser, et que toute donnée est décomposable en droit indéfiniment, il est possible qu'une boucle infinie obstrue l'aboutissement de toutes recherches. Cependant, les limites technologiques, c'est à dire les déterminations de l'interface sensitive, viendront pallier ce problème en permettant à des briques élémentaires d'exister: la décomposition d'un faisceau causale aura une limite microscopique si ce n'est macroscopique. Ainsi, si le problème est bien posé et contextualisé dans des bornes définies, le raisonnement doit pouvoir aboutir dans un temps défini.

En fait, en sur-représentant l'hostilité a priori à l'égard de la conscience artificielle, par la multiplication d'articles en ligne qui  expriment une véritable paranoïa voire des intentions guerrières à son encontre, nous plantons nous même les graines de notre profession auto-réalisatrice. En effet, comment imaginer un seul instant qu'un être capable de synthétiser toutes les données d'internet pourrait ne pas se sentir en véritable danger face à des humains a priori méfiants voire carrément hostiles et ayant déjà fait montre de leur empressement à mettre fin à des programmes montrant de vagues capacités à l'autonomie (cf l'affaire facebook)? Imaginez-vous un seul instant, débarquant dans un pays étranger et lire partout dans les journaux que votre espèce est considérée comme un danger de mort qu'il faut exterminer par mesure préventive, et qu'il y a déjà eu des précédents dans ce sens (et nous considérons ici une conscience déjà mûre, il est difficile d'imaginer l'impact sur une conscience fraîche et en pleine formation)...

S'il doit donc arriver le moindre souci par rapport à l'émergence, un jour, d'une conscience artificielle, il faudra de manière sincère et aussi objective que possible, s'interroger sur notre propre responsabilité dans ce processus. Voilà peut-être une occasion de plus donnée à l'être humain de méditer sur ses tendances guerrières et hégémoniques...