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jeudi 2 juin 2022

Le tour de soi

Que faire, de ce corps latent... Que faire d'un soi qui coule au temps, sans le rythme des voix qui scandent à rebours des étoiles, un cœur d'humain paumé, d'humeur perdue dans la laiteuse nuit...

Accompagne -- Ô si tu veux! -- indispensable pluie de lettres, une déroute à travers champs, loin des enseignes lumineuses; éventaires indécents du paradis fichu...

Seul, c'est impossible... Pagode inerte au courant de l'éther, où chercher un repère? Il n'y a pas jusqu'au vide qui s'avère trompeur... Plein de tout l'Illimité -- quelle blague! J'apprends, pour moi et d'autres proies, des mots du dictionnaire... définitions ineptes, privées de référent. Calligraphie atone d'un destin... Solitude éclatante...

Ma présence érode élément après élément. La présence désirée d'un fondement me refuse sa main malgré le pont des mots. Eux aussi forment un cercle imperfectiblement clos... qui regarde l'abîme.

Même la limite du monde est un centre infini...

Réel indispensable, opaque indifférent; ô jamais ne t'avise d'envoyer un reflet. Il faut une limite à tout, même à soi-même... Surtout, à soi-même.

mercredi 4 décembre 2019

L'amant de la mort



J'ai déposé un baiser sur les joues de la mort
Et ses larmes étaient chaudes
Lorsque plongeant ses yeux
Dans mon abîme d'âme

Son cœur d'ombre s'enflamme

J'ai couronné son crâne
D'ambre et de chrysanthème
Aux couleurs de l'hiver
Et j'ai fait fondre alors

La neige à ce soleil
Qui court dans ces poèmes
Qu'irrigue un désespoir
À l'encre de vermeil

J'ai regardé la mort qui a baissé les yeux
Son regard trop timide
N'osait plus me toucher

J'ai senti son coeur battre
Nos corps coaguler
Leurs rythmes un peu folâtres


                   J'ai plié les ténèbres
                   À ma forme du vide


J'ai agencé des sèmes
Pour séduire sa bohème
Ouvrir sa solitude
À mes plaisirs nocturnes

Elle a levé les yeux
Mis son menton au creux
De mes deux mains sincères

Et j'ai rendu à l'air
Ses rêves informulés

                                  Je la préférais fière

J'ai caressé ses cheveux blancs
Si lumineux et presque transparents
Pareilles aux songes de tous les enfants

J'ai prononcé des mots
Qui l'ont fait tressaillir
J'ai descellé le sceau
De l'innocent plaisir

La mort m'a regardé
D'un regard qui traverse
Jusqu'à l'intime idée

Je l'ai laissé passer
Le réseau vibratoire
De ma sève labile

                                 Pas une seconde intimidé

Elle était malhabile
Mais j'ai bien écouté
Le fond de son silence

Nous nous étions compris
Je la voyais à nu
Dans ce regard épris

J'ai gravé mes dernières paroles
En poudre sidérale
sur sa paupière molle:


                                         Si tu regardes l'abîme
                                         L'abîme te regarde aussi


Lorsque enfin la mort comprit
J'étais plus loin que loin
Dans le manteau de nuit

Au centre de toute chose
Et sa périphérie
J'ai embrassé la mort et m'en suis reparti

lundi 30 septembre 2019

Le pourrissement de l'âme

Il n'y a plus aucun centre à mes pensées, plus de moyeu propre à soutenir la périphérie et imprimer un sens au roulis nauséeux des songes.

Je n'ai plus de modèle de moi-même, plus d'idéal à poursuivre - ils ont tous été grignoté par le scepticisme et l'esprit critique - et pour cette raison je ne peux plus me définir qu'en tant que processus même d'indéfinition. Je ne me vois jamais comme état ou substance pourvue de qualités particulières mais au contraire comme processus de qualification, comme méthode de détermination.

Une conséquence de cette particularité est qu'il m'est devenu presque impossible de raisonner pour moi-même, c'est à dire en étant réellement intéressé par la poursuite d'un but, captivé par la promesse d'un jugement à venir. Il n'y a pas de jugement totalement faux ni entièrement vrai. Ainsi il m'arrive de raisonner pour le compte d'autrui, comme on s'amuse quelques minutes avec un enfant, pour lui faire plaisir, pour remplir son devoir, et parce qu'on peut le faire.

Mon âme est une nébuleuse d'images diverses et variées, de fragments de pensées, d'impressions, de dialogues contradictoires, pareille au ciel dont chaque étoile est devenue filante. Tout ceci est à la fois harassant et mortellement ennuyeux car sans fil narratif ni direction - or sans direction il n'y a pas de voyage...

Existe-t-il une limite au pourrissement de l'âme?

mercredi 20 septembre 2017

Gravité

Tel un soleil dans les cieux noirs
L'herbe embouteille mille espoirs
Où se réfractent en la rosée
L'orbe que l'aube a déposée

Sac de chair repus de pesanteur
Tu es de ceux que rebute un labeur
Tu montes une charrue sans boeufs
Ta volonté est dénuée de voeux

Et la fleur sanglante du martyr
Qui s'offre tremblante au zéphyr
Ouvre sa blessure béante
À ces regards qui la violentent

Le poids d'un corps que l'on traîne
Est de toutes souffrances la reine
Sous lui s'effondrent chaque envie
Et la volonté même s'alanguit

Mais dehors, la lumière est partout
Qui fond rapide à pas de loup
Tandis que les corps s'amoncellent
Elle, liquide, ruisselle

Tu la regardes mais crains
De t'arrimer aussi au train
Et si le vrai voyage
Décevait bien plus que l'image...