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lundi 8 mars 2021

Déchirement idéaliste

 La conscience est un raffinement évolutif d'une telle dangerosité. Cette capacité à se métamorphoser si vite excède largement la temporalité biologique du vivant et, plus généralement, de tout écosystème relativement stabilisé. Elle surcharge d'idéalité le réel et emmène l'esprit par-delà les phénomènes, par-delà les lois établies, pour inventer un ailleurs toujours plus désirable. En accentuant certains signaux, tels que celui de la limite ou de la contrainte -- certainement pour un motif évolutif tout à fait louable et qui devait consister à pouvoir développer des solutions alternatives pour augmenter le champ d'action humaine --, la conscience mène assez naturellement vers deux horizons: la destruction pure et simple du corps en tant qu'entité contraignante dont il faut s'affranchir (c'est tout à fait ce qu'il se passe dans nombre de spiritualités où le corps est vu comme un obstacle qu'il faut dompter), ou bien sa transformation rapide, c'est à dire sans se plier à la temporalité lente des mutations naturelles d'une espèce (c'est précisément le cas du transhumanisme).

La conscience projette l'homme si loin au-delà de son corps, et même des corps en général, que le monde phénoménal perd sa consistance et semble ne plus pouvoir servir d'assise, de structure stable à partir de laquelle fondre son comportement. C'est au monde de s'adapter à cet esprit intrépide et illimité, qui porte ses regards bien au-delà des frontières du visible, et pour cela interroge l'état actuel des choses, le remet en cause, cherche à le transformer à son avantage, à son image surtout. On comprend aisément en quoi une telle fonction peut être utile à la survie d'un être comme l'humain, et le problème ne réside pas en sa qualité mais en sa quantité. La conscience s'érige comme fonction de rupture des équilibres, et si la marche est une telle opération répétée, il faut, pour tenir debout, savoir circonscrire le déséquilibre en d'étroites bornes.

Pourquoi tant d'artistes et plus généralement de gens à l'esprit foisonnant meurent si jeunes? On peut mourir d'impatience face au monde et à soi, mourir de déchirement idéaliste.

samedi 9 septembre 2017

L'unité





Attrape-moi, enserre-moi, conserve-moi. Détache-toi, désenlace-nous, défais tout ça. Ton souffle en moi, ta peau la mienne, tes pleurs ma peine. Dénoue le noeud, détruit le sol, troue l'édifice, croule en néant, souffle les signes, tue les racines. Ton regard mon regard, ton haleine mon haleine, ton passé mon histoire, ton amour est ma haine.

L'amour est la mort du Je et le jeu la naissance du nous, ainsi aimer serait-ce jouer à mourir?


Dessin d'Amine Felk, texte de moi-même.