lundi 28 janvier 2013

La voix du coeur



J'fais mon p'tit art dans mon coin peinard
Tranquille dans mon appart', avec un verre de pinard
Quand j'vois pas vos gueules j'me sens tel'ment veinard

Je scribouille deux trois traits sur un tableau blanc
Moi qu'ai toujours pensé qu'écrire c'était chiant
Me v'la pas en train, peu à peu d'changer d'camp

J'y comprends rien moi à leurs destins en carton
Faudrait qu'chaque jour soit la même chanson
Tu pointes au boulot et tu rentres aussi con

J'ai entendu dire qu'avait des mecs qui branlaient rien
Pis qu'y gagnaient tout de même d'quoi s'acheter le pain
L'art qu'y appelaient ça, décidément j'y comprends rien

Pi un jour, j'en avais tel'ment gros sur l'coeur
D'avoir connu que du labeur
Issu d'vos rêves qui font si peur

Qu'j'ai cherché un stylo dans ma piaule
J'me souviens en avoir trouvé un sous l'chat qui miaule
L'a bien fallu qu'j'y mette un coup d'épaule

J'me suis calé relax sur le fauteuil
Sur le bureau j'ai étalé une feuille
J'avais l'coeur, j'saurais pas dire, en deuil

Moi c'que j'voulais c'était m'exprimer
Au lieu d'ça j'suis resté bloqué
À croire que j'suis bon qu'à trimer

Mon destin j'lai pas voulu moi
À l'école on m'a pas donné l'choix
De toute façon j'crois qu'on m'aimait pas trop là-bas

M'enfin me voilà aujourd'hui
Au bout de l'impasse, au bout d'la nuit
À m'êt' toujours senti trop p'tit

J'profite d'être blessé pour occuper mon temps
Just' passer un bon moment
Moi qui sait pas vivre dignement

V'zaviez qu'à pas m'apprendre à trop survivre
Ça j'sais faire, pour sûr, j'en suis ivre
Sauf que voilà, on m'a jamais appris à vivre

J'sais pas c'qui m'a pris d'raconter tout ça
J'sais bien qu'un homme ça pleure pas
J'crois bien qu'au fond j'suis un peu las

Pi aujourd'hui j'avais pas l'coeur à picoler
À faire sombrer mon âme dans l'bordelais
Nous autres on s'acharne trop à oublier

Au lieu d'ça j'ai voulu faire le fier
Prendre la plume et changer d'air
Vous dire à quoi ça sert...

Nous on est l'coeur d'cette société
Caché dans vos usines à blé
Enfoui avec c'qu'est trop laid pour être montré

Pi un coeur ça a pas d'bouche pour parler
Alors qui pourrait bien m'écouter
Ecouter le fruit d'éducation ratée

Mais bon, j'ai toujours été têtu
J'ai en moi l'rêve d'être entendu
Tant pis si on dit qu'j'ai la berlue

J'me fais pas d'illusions vous savez
Ma vie c'est trop tard elle est gâchée
Maint'nant l'combat c'est pour ceux qui viendront après

Pass'que vous, là, dans votre canapé
Avec vos livres et vot' télé
Vos p'tites vacances et vos objets dorés

Vous êtes aussi responsable de tout ça...

Responsables de tout' ces vies englouties dans les usines ou derrière les caisses de supermarchés
C'est vous qui nous poussez là-bas, à mourir pour vot' confort, à nourrir vos désirs de grandeur
Vous couperez pas la langue à mes enfants comme vous m'l'avez coupée
Eux aussi y ont l'droit à une éducation, à c'qu'on les abandonne pas au malheur

Si j'ai jamais eu d'voix que pour crier, j'vous jure que nos gamins auront la leur
Avec laquelle ils parleront, s'construiront des rêves, une vie, des jours meilleurs...

Y faudra bien que quelqu'un parle...

J'ai pas vot' talent pour la parlote, j'srais jamais un zola, just' un vilain
J'me suis p'tet pas bien exprimé mais j'aurais essayé, c'est déjà ça au moins
Un jour... J'espère... Quelqu'un saura vous dire mieux qu'moi, qu'on est tous des humains...

Aucun commentaire: