lundi 8 février 2010

Ce qu'on gomme

Je ne gomme plus désormais les petits écarts que l'on fait en écrivant.

Les hésitations, les moments d'inattention, les culs de sac. Je dessine à main levée sans jamais lever la main. Un seul coup de crayon, le même pour commencer et achever.

Alors ainsi seulement je me contemple, je me regarde dans mon sillage irrégulier. Dans mes détours je met à jour ce chaos régissant la conscience.

Le cerveau c'est des milliards de mains, toutes craquant une allumette dont la flamme est une pensée. Simultanées, elles embrasent l'esprit et réclament toutes un chemin jusqu'à la conscience, un traitement de faveur par rapport à leurs soeurs.

Si l'on pouvait seulement se décaler de quelques centimètres par rapport à la réalité, quelques centimètres vers le noir, je suis sûr que l'on verrait sur les cerveaux, se peindre les sillons de ces milles lueurs formant un chemin mouvant sur le cerveau. On verrait Dieu en train de peindre son doux chaos sur nos âmes.

Finalement, ces derniers temps c'est l'écriture automatique qui m'attire. C'est une phase, je le sais bien... Je dois explorer cette technique et en apprendre le résultat.

Chaque action dans la vie est une manière particulière de cartographier son âme.

Les cartes changent et les légendes aussi, offrant ainsi une mise en relief, une compréhension toujours plus profonde, créant le doute. Le doute ne quitte jamais la progression. Il est le frère de la connaissance.

Peut-être qu'à force d'écrire les pensées qui jaillissent, à force de spontanéité, je saisirais un peu de la logique du chaos?

J'ai un crayon et cette gomme est là si obsolète. Le crayon parle mais la gomme muette jamais n'écoute. Pendant que moi, je remonte de ce claquement de fouet que fait la pensée qui éclate, tout au long des sinuosités de son sillon, jusqu'à l'instant initial, l'illusion totale, préparée depuis un infini passé qui j'en suis sûr par essence nous échappe, celui qui la fait naître.

Y a-t-il un instant T d'où jaillit la pensée? Ou bien n'est-elle que l'étape logique préparée par le temps, depuis l'origine de toute chose, le tronçon d'un processus insaisissable parce que méta-humain.

Si l'on efface ce qu'on ignore, autant raturer sa substance, autant se détricotter de l'univers. Je laisse mes ratures partout sur mon cahier et sur vos yeux. À vous de les interpréter ou de les mettre de côté. Je m'en fiche, je veux éclairer mon passage si profondément dans le vide que j'imagine, si fort, comme un trou noir d'ou finalement la lumière la plus intense vient basculer dans un envers bien mystérieux.

À quoi ça sert, je n'en sais rien, mais tant pis, mais tant mieux...

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