Affichage des articles dont le libellé est sommeil. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est sommeil. Afficher tous les articles

vendredi 19 novembre 2021

Cadavre de ma vie

 Il y a trois jours, j'ai eu en m'endormant, une idée littéraire. C'était à ce moment où la conscience se relâche enfin et laisse s'écouler de sa synthèse tous les instants de vie qu'elle contracte autrement. C'est toujours en ces moments que me viennent les plus belles phrases, les plus beaux vers, les idées les plus vraies, comme tomberaient de soi les écailles les plus intimes et sincères.

Combien de fois est-ce arrivé... Malgré la fatigue, l'idée s'empare de l'esprit, l'esprit la fait tourner, la pétrit un peu, mais point trop -- le joyau brut semble déjà poli. La phrase, musicale, résonne dans la tête entière et semble animée d'une vie qui trépigne d'être enfermée, prisonnière d'une vacuité intime qui mâche et digère dans l'oubli tout ce qui pourrait pourtant être.

Combien de fois ai-je réitéré ce choix de ne pas me lever, d'entendre cette vie en moi bruisser de tant d'ardeur, peu à peu étouffée par l'indifférence du temps qui se referme sur l'avènement d'autre chose.

À vrai dire, cela fait bien longtemps que je ne me suis plus levé pour ma vie d'écrivain... Me lèverai-je un jour? Ou faudra-t-il que je noie moi-même encore et encore, par inertie dévastatrice, ces portées de chatons dont les échos fantômes hantent mon âme aujourd'hui? Combien d'hypogées mon cœur abritera-t-il en sa crypte funèbre?

Mais surtout: est-ce qu'un jour viendra où les Muses ne chanteront plus dans mon âme, pour me punir de ne m'être pas levé pour ma vie, mon destin?

Et la nuit sera sombre et silencieuse, ô combien je pourrai dormir alors, dans le cadavre de ma vie.

vendredi 5 février 2021

Le fond diffus de soi

 Je me suis immergé dans le bruit ces derniers temps. Le bruit, c'est liquide, c'est dense et c'est profond; et parfois tellement lourd que ça vous noie sous la pression. L'océan noir de sons est une broderie diaprée où tout phonème ouvre la porte vers d'indéfinis récits que l'on s'invite à suivre, un chant de sirènes qui peut endormir son humain jusqu'au bout du grand sablier, jusqu'à son dernier grain.

Je me réveille aujourd'hui, de plus en plus souvent; les paupières lourdes, hagard et ensuqué d'être resté si longtemps en suspens, dans le sommeil cryogénique de spectacles extatiques. Sortir du néant, du silence assourdissant d'exister...

Mais je me réveille... J'y reviens dans ce lac étal de mon identité, avec son fond fuyant et son eau qui ressemble à de l'air, cet air si lourd qu'une seule inspiration vous noie comme cent goulées de sable.

J'y reviens, j'y reviens... Et ramasse en mes sables de nuit de bien étranges étoiles aux formes si exquises qu'elles ressemblent à ces motifs que l'effort vital sait imprimer à la matière rétive -- au bout de millénaires entiers. Des objets millénaires... Dans mes sables à moi... Mes sables trentenaires... À quelle vitesse s'écoule donc le temps dans le manteau céleste de mes profondeurs?

Quelles étranges astres... Poudroyant de lueurs irisées, cascades de teintes obscures et d'ombres de couleurs antiques... Et tout cela danse en rythme, émerge de ces sables en des constellations orphiques tissant une grammaire indéchiffrable pour l'entendement et simplement sensibles.

Il faut sentir les pensées, semblent-elles dire à l'âme atone et perplexe. Il faut tremper la pointe en ce réseau de signes, exhumer de ces souterrains l'ineffable surface du fond diffus de soi.

mercredi 24 janvier 2018

Chu d'un songe



À l'aube oublié dans un ourlet de nuit
Je m'obombre et recule devant aujourd'hui
Dormeur sans sommeil que les rêves émerveillent
Mon destin se suspend entre chaque réveil

Jour me voilà tel que je suis
Insensible à tes cieux que tous mes yeux essuient
En mes oreilles bourdonnent la mesure du silence
Et le chant sidéral d'une atone élégance

Dis quand reviendra l'ombre qui émousse un peu
Cette arête aiguisée des faces diurnes du réel
Qui se plait à lancer sur mes plaies comme un sel
Ce rayon qui dissout l'image d'un monde où peut

S'exprimer sans limite l'âme immatérielle