Affichage des articles dont le libellé est paysage. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est paysage. Afficher tous les articles

samedi 2 mai 2020

Spectralidé

Il regardait les étoiles, comme il avait tant de fois fait, et ne voyait plus là matière à voyager. Ce qui étonne un jour, déçoit le lendemain. On se désintéresse de tout, comme de son propre bonheur...

Ne jamais se fixer d'objectif, s'était-il répété tant de fois. Que reste-t-il à faire une fois qu'on les atteint...

Pourtant, il se souvient de l'effet sidérant qu'offrait l'interstellar dans ses plongées nocturnes vers l'abyssal espace. Il contemple en lui le souvenir chaleureux et cherche à y entrer comme en une masure que le temps a ruiné.

Faut-il qu'il en aille ainsi pour chaque chose? Faut-il que tout s'érode et laisse un monde désolé? Car même volonté s'amenuise, et le regard qui bâtissait, ourdissait en silence les mondes à venir, n'est plus que rémanence d'anciens sourires heureux. Le passé bientôt se surimpose, impose sa stature déchirée sur chaque paysage. Paysage est une contraction de deux mots: pays et visage. Il se demande alors comment se reconnaître jour après jour, lorsqu'il ne reste d'identité qu'un dérisoire concept abstrait.

Il regardait les étoiles et désormais ne le fait plus.

Le spectre des gloires consumées glace jusqu'au coeur de l'âme la plus trempée.

La plupart de mes textes sont inspirés d'instants vécus en tant que moment artistique. Certains sont véritablement le développement d'une œuvre ayant produit son effet en moi et n'en sont qu'une efflorescence spontanée. C'est là le résultat d'une idiosyncrasie gouvernée en majeure partie par le syndrome de Stendhal. Je regrette de n'avoir pas mentionné dès la publication des textes nés d’œuvres d'art réelles leur source originaire, afin que le lecteur puisse s'abreuver lui aussi à leur inspiration. Je pallie cet oubli à partir d'aujourd'hui et souhaite sincèrement parvenir à m'astreindre à cette habitude vertueuse à l'avenir (libre à vous d'en déterminer la valeur et le sens).

Ce texte est né de la chanson suivante:   

vendredi 4 octobre 2019

Méditations autour de la croyance et de la raison

Les gens comme moi ne parviennent pas à accepter le fondement irrationnel de la raison. L'action s'en trouve grandement menacée. L'esprit qui veut tout arraisonner rend les choses si friables qu'aucune fondation n'est possible. Cet esprit devient le mouvement pur, mais intranquille puisque inconscient de son but, causé par l'extérieur, en réaction aux choses. S'il cherche quelque chose, c'est l'existence d'un appui, d'une fondation à partir de laquelle bâtir un abri; mais, par sa disposition, il a fait de cette possibilité d'un fondement une chimère.

Pourtant, si la raison marche ainsi - quand bien même serait-ce à son encontre - c'est qu'un fondement préalable est déjà posé, bien qu'ignoré - sciemment ou non. Un tel esprit part du principe stable qu'aucune croyance ne peut être fondée de manière absolue. Il cherche la justification des croyances par la rationalité, ce qu'il ne peut précisément trouver puisque celles-ci sont une condition de possibilité de la raison même. La raison est consubstantielle aux croyances comme l'arithmétique l'est aux nombres (c'est à dire aux valeurs qui sont la traduction mathématique du jugement et de la croyance). On imagine difficilement un calcul ne s'appliquant pas sur des variables déterminées, c'est à dire des valeurs.

Ainsi la raison a besoin des jugements qui sont les unités, les valeurs, sur et par lesquelles elle s'exécute. C'est le statut même de ces jugements qui pose problème au rationaliste puisqu'il souhaiterait les voir comme des constantes ou des résultats assurés et définitifs lors même qu'ils sont des variables et des postulats temporaires justifiés de manière relative.

Le rationaliste intranquille cherche à se reposer à l'ombre de jugements absolus produits et adoubés par la raison même alors que celle-ci ne peut que partir d'eux comme postulats et hypothèses nécessaires a priori et donc indémontrables. Pour cela, ces jugements doivent naître hors de la raison et sont irrationnels - sans pour autant être injustifiés.

L'irrationnel et le rationnel sont les deux jambes de l'esprit pensant, ce dernier doit se tenir sur les deux s'il veut s'assurer une marche confortable et saine - il doit aussi pour cela savoir s'asseoir et s'allonger. Qui veut voyager par ses propres moyens ferait bien d'apprendre à marcher sur deux jambes, sans attendre d'elles qu'elles lui fournissent la justification de son périple.

Les croyances sont les briques permettant à la raison de bâtir - de réagencer et de transformer -, il serait absurde de croire que l'on peut vivre dans tous les édifices simultanément ou produire un bâtiment qui soit adapté à tous les contextes et toutes les situations - autrement dit qui soit lui-même tous les bâtiments. Ce fantasme de l'infinité accomplie, réalisée, est un puissant moteur s'il ne devient pas hypostasié. Il n'est que l'horizon qui anime la curiosité du voyageur, une idée régulatrice et non une chose.

À celui qui se convainc qu'il peut toucher l'horizon et le saisir n'est promis qu'insatisfaction, folie et probablement mort par épuisement. L'infini ne se vit pas comme expérience définie, il ne s'enclot pas dans le fini bien que le langage, par l'existence du mot, prête à le croire. Le mot fait signe vers ce qu'il n'est pas.

Nous ne pouvons situer l'infini en nous mais nous sommes situés dans l'infini (ou du moins l'indéfini), de manière absolument relative. Nous serons toujours quelque part à quelque moment par rapport à un référentiel donné, et bien que le regard puisse embrasser de vastes étendues, il ne peut saisir ce qui est sans fin. Le regard lui-même ne peut naître et se projeter que d'un point précis. Le regard enfin n'est pas celui qui observe.

La raison n'est qu'un outil. Le paysage vécu est fait de croyances et la raison est une force qui s'exerce sur les éléments de ce paysage qu'elle contribue à façonner. Nous vivons dans le paysage. Mais si la force peut interagir avec lui c'est qu'elle partage nécessairement une part de sa nature, elle est donc aussi paysage mais dans une perspective différente. Ce dernier, pris comme ensemble d'éléments déterminés est une représentation spatiale de l'expérience. La force, vue comme dynamique abstraite s'appliquant sur le paysage est elle une représentation temporelle de celui-ci. En tant que temporalité nous sommes infinis puisque processus même de définition. En tant que spatialité nous sommes déterminés et figés sous la forme d'un objet.

mardi 5 mars 2019

[ Terres brûlées ] Terres brûlées

Il s'agit là du tout premier poème d'un recueil en cours de rédaction. Il s'intitulera Terres brûlées, je vous laisse libre d'imaginer les interprétations qui vous conviennent. Je le dédie à mes parents, ce sont, en grande partie, les terres qu'ils m'ont léguées, et qui encrent mes veines.



Terres brûlées
Consumées, ravalées
Terres d'un autre temps
Tombeau de nos printemps

Terres anciennes
Commune antienne
Abri poreux des graines
Où git soyeux le rêve

C'est une vaste étendue
Terre battue
Fouettée par le vent

Écorce d'eucalyptus
Et poudre d'hibiscus
Où je me tachais si souvent

Péninsule de vie
Partant de tes prairies
S'étire sur aujourd'hui

Le sel sur mes lèvres
Comme une offrande portée par la mer
Où le ciel se reflète

Sa légende lumineuse
À la grammaire astrale
Font l'âme voyageuse

Satellite intersidérale
Dérouté de l'orbite
Atome esseulé dans la nuit anthracite

Parfum de Thuyas
Du futur? Un chouïa
Mektoub et dans les mains d'Allah

Laisser jeunesse aller
Le destin attendra
C'est le présent qu'il nous faut modeler