dimanche 8 juin 2008

22 ans et...

J'ai 22 ans, jusqu'ici, tout m'a plutôt sourit en tout cas les choses qui comptent dans la société: faire des études et les réussir, être un garçon bien élevé et qui donne une bonne image à sa famille, quelqu'un dont l'avenir est tout tracé dans la société. Je fais partie des privilégiés, ceux qui ont tout pour réussir...et pourtant je revendique mon droit à l'insurrection, mon droit à la tristesse, mon droit à refuser cette vie là. Des questions, j'en ai plein la tête, des dilemmes aussi. Des réponses, je croyais en avoir aussi mais plus j'y pense moins j'en suis sûr, et les réponses d'hier deviennent les questions d'aujourd'hui. J'ai l'impression de marcher sur un terrain qui s'effrite derrière chacun de mes pas, un abysse vient recouvrir ce que j'ai foulé. Derrière: le néant. Devant: la brume, l'incertitude, le doute, l'envie aussi de savoir, de pouvoir, de ne plus chercher mes mots, de comprendre, d'associer, mes idées avec ces signes qui forment des mots puis des phrases, qui vont imprimer un instantané du magma de mes pensées, gigantesque tourbillon d'absurdité, de crainte, de peur, de frustration.

J'ai 22 ans et je passe ma vie à chercher. Si je ne trouve pas, si je ne me trouve pas, est-ce de ma faute? ou bien est-ce la société qui m'éloigne de la vérité, de ma vérité? Je ne sais pas si tout le monde se pose les mêmes questions, je sais qu'il y en a qui se les pose et pas forcément ceux que l'on croit. Ce qui est sûr c'est que la plupart le cachent bien, qu'est-ce que vous voulez, je dois être plus fragile que les autres.

Et si le vrai courage, le sens de la vie, c'était de se donner la mort? D'aller à l'encontre de son instinct, n'est-ce pas la plus belle preuve d'humanité? combattre son instinct, l'emprise de l'esprit sur le corps, le triomphe de la raison face au désir de vie imprimé dans nos gènes. Et si les religions diabolisent le suicide parce que tout simplement c'est le couronnement de l'humanité, le plus beau geste de liberté, de vérité. Et si on était récompensé pour s'être suicidé? Qu'est-ce qu'on en sait nous, qu'est-ce qu'ils en savent eux. Nous, eux, c'est personne, on veut se croire
au dessus de tout sur cette planète, au final qu'est-ce qu'on est réellement, qu'est-ce qui nous différencie des autres formes de vie. La folie? la dépression? La conscience? non c'est le suicide il me semble, du moins je le savais, maintenant je n'en suis plus si sûr, je ne vois plus rien quand je me retourne sur mes certitudes, sur ce que j'ai construit.

J'ai 22 ans et je me reconstruit, du moins j'essaye mais je n'ai même pas encore posé les fondations. Normal, tout ce que j'avais bâti a disparu, je n'ai plus de repères, on dirait que le monde a retourné sa veste et que moi je suis resté de l'autre côté, là perdu, en train d'essayer de retrouver ma route. Ou est-ce moi qui me suis retourné de l'intérieur, me laissant sans dessus-dessous, en désordre. Je ne sais pas, au fond je ne sais rien.

Finalement qu'est ce que c'est que de savoir. C'est simplement se mettre des barrières, inventer des limites dans lesquelles les incertitudes devront s'arrêter. Dans l'infini il n'y a pas de lois, on ne peut pas trouver de logique, de modèle, mais placez une barrière, fixez des limites à votre horizon et tout devient possible, tout devient explicable. Savoir, c'est ne pas voir au-delà de ces frontières mentales, c'est ériger un mur entre soi et le reste de l'univers. Savoir, c'est refuser de voir, d'appréhender l'infini, c'est refuser d'avancer.

J'ai 22 ans et je ne sais rien, je ne possède rien. Tout ce que je crois posséder m'emprisonne, c'est moi qui suis possédé. Cela voudrait dire que posséder, c'est en fait donner à quelque chose le pouvoir de vous détenir, de vous contrôler tout ou partie, de vous tenir captif. Posséder c'est en fait troquer sa liberté pour une illusion, posséder c'est bien vouloir croire que l'on a capturé quelque chose alors même que c'est nous qui sommes au fond du filet.

Cette société est donc bien mal barrée pour parler de liberté, ici où le respect s'acquiert par la propriété, par la possession, la domination. Nous sommes donc tous des moustiques pris dans une toile d'araignée que nous avons nous même construite. Les puissants de ce monde s'en sont simplement construit une plus grande, plus solide mais ils se débattent de la même manière au milieu de leur toile, de leur parcelle d'univers.

Il faut être rien, vierge de toute certitude, de toute richesse ou possession pour comprendre ce monde j'imagine. Il faut être mort certainement. Se suicider, n'est-ce pas le plus bel aveu de notre ignorance? n'est-ce pas se débarrasser de toute prison? de tout dogme? n'est-ce pas faire preuve de la plus grande curiosité? Un jour, il faudra que j'essaye, bien sûr ça ne répondra pas à mes questions, mais ça en fera certainement évoluer l'essence. Car lorsqu'on pose une question
et qu'on cherche une réponse, n'est-ce pas pour envisager cette question sous un autre angle, la voir dans une nouvelle perspective, la faire avancer? Une question ne meurt jamais une fois posée, elle traverse le temps en changeant de forme, en grandissant sans cesse, en s'affûtant pour être de plus en plus précise, de plus en plus perçante.

J'ai donc 22 ans dans notre parcelle d'univers à nous, selon les lois que l'on a érigées, selon le système qui nous rassure. J'ai 22 ans et ces mots sont vides de sens parce qu'ils contiennent en eux l'infini, ils contiennent des questions, ils contiennent l'absurde. L'absurdité qu'est-ce que c'est sinon l'infini, car s'il y a bien une chose que l'esprit humain ne peut pas appréhender, c'est bien l'infini. L'absurde c'est ce qui n'a pas de sens, mais rien n'a de sens, il est temps de se rendre compte que l'absurde, c'est tout.

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