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mardi 13 août 2024

Phainestai

Le bruissement calme des feuilles dans le palmier et le silence de cette après-midi estivale font vibrer la nature d'une présence indéniable et ceinturante. Le reste suit presque spontanément: les vers géophages se faufilant dans le sous-sol, les taupes creusant leurs galeries clandestines sous le potager, les muridés courant entre les herbes, les buses qui scrutent attentivement le sol éclairé par les rayons presque palpables d'un soleil de plomb. Tout existe tellement qu'il est impossible à l'homme conscient de tout cela de ne pas considérer avec acuité la lacune qui lui fait lieu d'intériorité. Toute cette lumière ne fait que le traverser pour se dessiner en sensations qui s'organisent dans la perception d'un monde qui tient toute la place. Le soi n'est qu'un centre absent et fuyant vers lequel le monde centripète fait captieusement signe -- mais dans quel but?

lundi 23 août 2021

Truisme

 On aimerait bien accéder aux choses. Ne dit-on pas d'ailleurs, en matière de roman, qu'il faut laisser la description objective refléter le sentiment intérieur du personnage? Pourtant, dans chaque ligne, chaque phrase, une comparaison ou une métaphore qui semble donner âme aux pierres, aux végétaux, aux paysages entiers. Comme si tout cela, tout, devait pouvoir susciter l'empathie de l'humain, le ramener à lui et lui fournir enfin la clé de sol de ces étranges notes posées devant lui. Nous habillons le réel, sans cesse, nous dévoyons l'absolue originalité, l'inexpugnable extranéité des choses qui devraient nous laisser là, chancelants, dans l'étrangeté atone de ce qui est. Nous sommes terrifiés par le silence d'un monde qui ne serait pas fait de notre bois. Séparés de tout par un abîme infrangible, nous jetons dans le trou nos vaines pelletées de sable et nous rendons incapable de reconnaître le réel pour ce qu'il est: cette indéterminabilité à la racine de tout jugement.

Notre conscience est totalitaire, elle n'accepte rien en-dehors d'elle-même, c'est elle qui définit le monde. Ainsi deux principales conséquences possibles: soit le monde n'est que le songe exquis d'un furieux solipsisme, soit nous sommes irrémédiablement voués à vivre à côté des choses, dans l'interprétation, dans la médiation des signes qui ne renvoient jamais que vers nous-mêmes...