vendredi 10 octobre 2014

La voix du philosophe

Toujours et encore je lutte quant à la façon d'écrire la philosophie. J'opterais spontanément pour la clarté rationnelle, celle qui sait mettre en relief les évidences, chaque étape du raisonnement pour bâtir peu à peu chaque maille de la chaîne discursive. Mais alors plus de sentiments: la philosophie s'offre comme un monde aseptisé, un monde pour ainsi dire purement formel dans lequel nul ne peut vivre et qui ne s'apparenterait qu'à un exercice fastidieux. Pourtant, même la plus abstraite philosophie se vit, elle est toujours présente dans le système de la conscience, mêlant son harmonique à la symphonie du présent.

Toutefois cela ne doit pas me hâter d'opter pour une écriture plus poétique, apte à mettre en scène les sentiments et la manière dont les idées sont vécues. Cette méthode altère bien souvent la clarté du raisonnement, elle force la main au lecteur, lui impose non seulement un cheminement rationnel, mais en plus lui dicte ce que cette excursion doit lui faire ressentir. Imaginez écouter une musique où figureraient à chaque mesure des indications concernant l'émotion à ressentir...

Je suis dans une impasse, mais à force de tourner en rond, de taper sur les murs, de creuser en tous sens, je finirai par sortir à l'air libre, je finirai par accorder ma voix philosophique à ma symphonie personnelle: le juste équilibre entre la froide réalité des éléments de la raison, et le sublime que ces partitions une fois interprétées peuvent produire. Pour l'instant, je pense qu'il vaut encore mieux faire de la philosophie comme on écrirait un théorème mathématique: laissons autrui vérifier le calcul et laissons le libre de ses sentiments vis à vis de l'expérience vécue.

Je sens tourner en moi un imposant système de rouages, imperceptiblement, sourdement: la mécanique de l'inconscient se déroule avec sa temporalité élastique. Quelque chose se tend, s'étire toujours plus, jusqu'au moment où émergera l'évidence à la conscience: le fruit de toute cette souterraine activité. Pour cela je demeure frustré, mais confiant.

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