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samedi 28 septembre 2024

Dithyrambe

De l'aorgique au repos dans ton être

Tu tires cette passivité

Ainsi ta vie bouillonne

Car deux fois contenue:

Par le dessein de la nature

Et par trop d'absolus

 

La totalité de l'en-puissance

A pour signifiant vacuité

Combien de temps encore

Résistera ce corps

D'attente suspendu

Qui te voue sans espoir

À l'irréalité


Peut-être une Action valeureuse

produirait un destin

De ce germe inexpliqué

Mais si dans l'Éternel

Tu veux placer ta fin

Tout bruieras de promesse

Dans le déchirement de soi


La membrane qui clôt ta cellule

Ne te sépare pas seulement de l'extérieur

Mais tout autant de toi-même

Ainsi tu gis sans adresse

Exilé de la forme

Et de l'Illimité


À l'homme est promis l'infini

Certes

Mais seulement s'il empoigne Kairos

Et se résout dans la durée

À l'âme seule est promis le Repos

Par les temps abolis

Des hauts champs-Élysées


Figure du devenir

Ton espoir est mortel

Ton être aussi néant

Te fais tout temporel

Pour le meilleur

Et pour le pire

Tu veux l'Altérité


Animal sans instinct

Se désire minéral

Croyant par ta nature

Et néanmoins sans foi

Tu cherches le Savoir

Et ne trouve que ta loi


Mesure de la mesure

Sans critère transcendant

Ton legs est un parjure

À tous les descendants

Qui rêvent de substance

Et renient le néant


Être de l'oubli

C'est dans la vacuité

Que tu t'acharnes à fuir

Que gît ton anamnèse

Ton essence dynamique

Te voue à l'équilibre

Mais en tant qu'horizon


Ta main ne saurait pas saisir

Ce qui n'est que l'envers

De ta vaine hypostase

Une lampée d'abîme

T'étires du tourment

Jusqu'à la folle extase


Vivre, encore, toujours

Entre les deux Néants

Ivre du vide enclôt dans chaque chose

Et si la mort n'était qu'une inversion

Qui de l'Illimité

Sait déssiner les âmes...

mardi 12 mars 2024

Deux minutes et vingt secondes

Tout le divers des choses peut-il entrer dans un enclos de durée? Oui désormais j'en suis sûr, tout le passé, tout l'avenir, peuvent résonner dans cette note qui coule de ton violon comme une sève figeant en son ambre l'histoire totale du monde. Toute la perfection de la souffrance et de la joie s'unissant malgré eux de violence consommée en la durée de cette blanche -- quoi de mieux qu'une blanche pour subsumer tout le spectre chromatique des qualités de l'être... Que je puisse désormais porter sur moi en tout instant, comme un talisman apotropaïque, l'anthologie de ces arpèges, et conjurer ainsi l'éthiops hors-d'âge de mon sang; je veux porter contre ma peau la ténèbre du monde et contenir de mon regard le flot en feu d'effroi: pour vivre un peu, juste un peu plus longtemps préservé d'asphyxie.

Mon âme oxydée porte en elle l'empreinte du temps qui s'active à construire le présent, cela suffit je crois -- cela suffit n'est-ce pas? Piotr ourdit pour moi des valses où abolir mes sentiments, que tout l'immonde déluge de mon tourment se déverse en deux minutes et vingt secondes enlacées de l'archer virtuose d'un génie de toujours -- on peut avoir mille ans à sept comme à vingt ans... L'âme trop vieille en des corps trop jeunes disjoint les cellules, pèse trop lourd sur les interactions du noyau, exerce une pression démentielle et par sa densité fait imploser l'humain pour former une étoile -- qui s'effondre en elle-même, éclairant le cosmos.

Deux minutes et vingt secondes, ma vie ne vaut pas plus; Au-delà nul délai: qu'elle griffe de lumière la nuit sombre et sincère, apportant sa poudreuse dissolution au difficile problème de la conscience.

lundi 11 mars 2024

Aphorisme du zéro et de l'infini

"Moi, qui n'ai jamais rien fait dans ce monde,

Moi, qui n'ai jamais su vouloir ni savoir,

Moi, qui ai toujours été l'absence de ma volonté"

Alvaro de Campos

vendredi 16 juillet 2021

Pessoa: le vide et l'infini

 "Les disciples de Nietzsche sont innombrables dans le monde entier, il y en a même qui ont lu l'œuvre du maître. La plupart n'acceptent de Nietzsche que ce qui est déjà en eux, ce qui, d'ailleurs, arrive avec tous les disciples de tous les philosophes. La minorité [erreur de traduction? Faut-il comprendre majorité?] n'a pas compris Nietzsche, c'est celle-là qui suit fidèlement sa doctrine. La seule grande affirmation de Nietzsche est que la joie est plus profonde que la douleur, que la joie requiert une profonde, profonde éternité. Comme toutes les pensées culminantes et fécondes des grands maîtres, cela ne signifie rien du tout. C'est la raison pour laquelle elle agit si profondément dans les esprits: on ne peut mettre absolument tout que dans le vide total."

Fernando Pessoa, morceau de lettre incomplète, sans destinataire ni date.

vendredi 16 août 2019

La toile du vide

C'est le récit d'une quête au but ignoré. Tous ces signes vers l'Ailleurs, ces mots sur l'air du temps ne forment jamais qu'une toile du vide. Ces sons n'apportent aucune sécurité.

Mais si le vide est la seule forme de totalité réalisée, pourquoi n'en pas être heureux... Être heureux d'être tout, d'être vide à en crever parce que grouillent en soi tous les possibles non reniés. Dans l'absence de choix sont tous les choix possibles - indéfinité des infinis.

Mais cette absence est un leurre, une idée de la raison. J'ai agi. J'ai pris une forme, des formes, et le monde s'amuse avec ces ombres, dans des récits tant comiques que tragiques.

Il faut abolir le choix. Est-il un seul phénomène en ce monde qui résulte d'un choix?