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mercredi 5 janvier 2022

Sur mes croyances mortes

 J'ai du en ravaler, des borborygmes de ce petit sous-genre que je m'escrime à cultiver jusqu'à l'ennui du monde. Combien de cris résonnent dans ma gorge et pressent sur ma pomme -- d'Adam -- le poids de pleurs enfouis?

Petit sous-genre ô poésie... Écriture des gens qui n'ont le temps d'écrire. Écrit d'amusement, de passe-temps qu'on tue, étrangle dans le nœud coulant des lettres. Insensé passe-temps...

Me suis-je trop acharné? À voir dans tes si basses cimes, un horizon glorieux: une chose par moi créée et digne d'intérêt...

Chaque jour, pourtant, le monde est là pour détromper, cette si noble aspiration, qui gonfle un égo pneumatique rêvant de s'envoler. Serait-ce pour s'accrocher au ciel? Comme les "stars" de cinéma qu'on scrute avidement?

Que la société puisse faire de l'enfant mal aimé, un ornement décent et assez engagé pour qu'on se résigne à le garder au cou. À défaut de l'aimer beaucoup...

Petit passe-temps, ô rêve infatué...

Que je comprends maintenant pourquoi la musique des soirs ne sait plus me lever. Je reste dans mon lit hanté par les fantômes d'informes poésies.

Égo tissé d'illusion, ne partons plus suivre le vent. Restons ici, sur la cendre soyeuse de mes croyances mortes.

mercredi 1 juillet 2020

Circulez



Je suis déjà bien par-delà ma vie.
Pas une leçon, pas un plaisir qui ne soit encore à venir.
Je n'ai rien à apprendre désormais...

Peut-être est-ce là l'accomplissement? Peut-être est-ce là la vraie vertu? J'ai parachevé mon propre néant, lui ai donné la forme définie d'un destin nauséeux. Un long chapelet de gestes insensés, de contradictions, l'histoire de désirs antagoniques.

Mon âme tourbillonnaire se souvient, ressasse encore et toujours les mêmes mélodies. C'est que le bougre est obsessionnel, jusqu'à ce point de non retour où l'âme se creuse un peu trop loin, déchire l'étoffe de sa peau, crève la profondeur jusqu'à la singularité maladive. J'ai plongé dans l'abîme et reste coincé dans l'envers des choses. Pas un plaisir qui ne soit spéculaire, infrangible et indéfiniment lointain, sous le blindage translucide de cette différence idiote.

Le pauvre ringard qui garde son amour inepte en soi, pétrifié dans un rêve qui ne peut procéder que parce que tout le reste est en sommeil... Risible.

Les souvenirs se figent dans l'ambre de l'espoir, et font de beaux bijoux à arborer sur soi. L'honneur délabré qui refuse de mourir. Risible.

Minable dormeur par lâcheté, à quel référent peuvent renvoyer tes signes? Les cheveux sont coupés, chaque liane est détachée, il n'y a plus un chemin pour remonter le temps. Mais tu conserves encore, en quelque endroit immense de ta mémoire, la possibilité de cette île engloutie... Risible.

Peut-être est-ce cela la vraie puissance? Se refuser soi-même au monde, et ne pas croire en lui. Risible.

C'est fini? Oui mais... Peut-être... Néanmoins... Quel que soit... Risible.

Je suis bien au-delà de moi. N'aurais-je été qu'une seule seconde?

Peut-on mourir encore et encore et encore? Comme je le fais avec toi... Comme si l'on pouvait convoler de deuil en deuil, chuter un à un d'étages qu'on ne soupçonnaient pas. Risible.

Les belles paroles, les beaux discours, de renoncement, de désespoir surmonté, de détachement suprême, et pour quoi? Finir toujours dans la roue, courant comme un hamster écervelé, amnésie renouvelée de négation couvée. J'enfante des futurs morts-nés. Risible.

Suis-je au-delà de moi-même, suis-je au-delà de l'amas cellulaire incurable? Y a-t-il une seule chose de louable qui soit un jour sortie de moi? Risible.

Les textes apposés sur les plaies, le bruit sur le silence trop vrai, le mensonge sur la solitude. Risible.

Combien de choses désobligeantes et vraies doit révéler cette attitude. Infantile comme face aux premières frustrations, terreur du rejet pourtant si naturel des autres. Risible.

Je suis par-delà le risible. Je me suis pris les pieds dans la vérité nue et sans atours. Dans la boucle renouvelée de mes phantasmes, dans l'infinie fragilité de cette aspiration à la puissance. Nul. Zéro. Négatif jusque dans la définition que je donne du monde. Terrorisé par cet amour abjecte de la liberté. Risible.

Comme un qui croit encore à l'absolu. Comme un qui se croit digne d'exception. Comme un qui veut être encore plus que l'être. Risible.

Comme une métaphysique bien ficelée refermée sur elle-même et pour cela défunte. Comme une ontologie qui use et trop abuse d'universalité puérile et se rassure ainsi d'un Réel apprivoisé. Risible.

Pour toujours risible.

J'avance le cœur léger, je n'ai rien à défendre qu'une poignée de vents futiles dans mes murailles acérées. Aurais-je déjà accompli mon œuvre ici? Celle d'un destin surnuméraire, inadapté, à jamais d'ailleurs et qui déteint à l'eau du temps pour demeurer exsangue et sans saveur.

Le destin des poètes maudits. Risible.

Un chemin de raté trop têtu... Mais peut-être avancé-je au-dessus du vide, sans m'en apercevoir encore vraiment, comme les personnages de dessins animés qui bientôt sentiront la chute. J'ai fait ce que j'avais à faire. C'est à dire j'ai bien tout défait, les draps de ma naissance qui feront bien office de sale linceul. Les liens que la vie s'acharnait à tresser entre moi et le monde. Entre moi et l'amour.

Je n'ai pas d'amour pour moi. Je n'en mérite aucun.

Le tribut dérisoire en quoi consistent ces poèmes ne constitueront rien dans mon parcours. Ils seront effacés comme de vilains brouillons qu'ils sont. Et toute mon existence servira de contre-exemple à des vies à venir. Voyez la belle ornière dans laquelle il ne faut pas tomber! Risible.

Mais, même cela je risque de l'avoir raté. Car qui relatera la pauvre existence anonyme d'un pur produit du vingt et unième siècle qui frénétiquement écrivait des poèmes pour se soigner de vivre... Risible.

Mérite-t-elle encore le nom de vie, cette route consistant à ne plus rien choisir, cette route à rebours d'elle-même et qui voulait trouver repos dans l'origine... Risible.

Si un dieu paternel, réalisant la honte que je constitue dans son œuvre, me prêtait une gomme capable d'effacer le train cosmique des causes de mon existence, ainsi que ses effets absurdes, je jetterais un œil dégoûté sur tout ça et n'hésiterais pas une seconde à frotter énergiquement l'écheveau contrefait de tout cet étalage de chair et de souffrance à vif, incapable de suffisamment de honte pour se draper de peau jusqu'au cou, et pour que rien de tout ceci n'affleure à la surface des choses.

Que tout reste celé dans le grand labyrinthe. Ma maison était hantée depuis le jour de ma naissance, il n'y avait pas de place ici pour la sublime vie.


Source musicale:

mardi 31 octobre 2017

La rupture impossible



Arc-bouté dans ma coquille
Caché dans quelque conque
Au creux d'une écoutille
Tel un héros de pacotille

Je t'ai trouvé mon bel amour
C'était donc toi depuis toujours

Dans quelque vacuité cosmique
D'où s'écoulent les choses
Accolé au réel
Calé dans claire prose
J'écoute éclore les roses

Je t'ai connu dans la musique
Je t'ai rencontré dans un disque

Accoudé au comptoir
Acouphène des vies
Je t'ai connu claquée
Par des cordes frappées
J'ai découvert ton corps
Qui fut toujours d'accords
Je quêtais les toniques
Tu étais acoustique
J'étais tout électrique

Je t'ai dévoré dans ces pages
Où s'encre ton visage

Quoi que raconte ton histoire
Quelles que soient tes déboires
Immanquablement je craquais
Pour ces croquis collés
Aux coins de mes cahiers
Je me claquemurais
Pour toi me craquelais
En mille éclats d'écrits
Transcrivant le vécu
D'un coeur par toi vaincu
Comme un pays conquis
Ne valant qu'un écu
Mais que tu acceptais
Dans tes tragiques cris

Je t'observais yeux clos
Tes couleurs m'ont enclos

L'amour est un tric-trac
Où le temps est compté
Tic-tac le temps est écoulé
Ton esquif est coulé
Qu'est-ce que tu croyais
Qu'un orchestre criard
Pourrait bien t'octroyer
Qu'enfin j'acquiescerai
À tes cinquantes requêtes
Quel macaque tu fais
Un sacré cataclysme
Tout juste un ectoplasme
T'ai-je bien fréquenté

Tu as gagné mon désamour
C'était écrit depuis toujours

Je m'en tamponne le coquillard
Je t'aime il est trop tard
Fais de moi ta breloque
Pendu à ton long cou
J'accepte tous tes coups
J'y ferai ma bicoque
Qu'importe si je claque
Je t'aurai mise en cloque
Moi le clinquant macaque
Couleur d'une autre époque
Cancrelat qu'on matraque
De toi je suis amok
C'est le récit classique
Un cas d'école tragique
Mais nulle tectonique
Descellera mes pas
Je suis le pesant soc
Planté là dans le roc
De ton rock écorché
Le vieux plouc encorné
Par ton ocarina


Je t'ai voulu doux cauchemar
J'ai tout vendu pour un dollar
Quelque beauté à nu
Et bienvenue le dol de l'art...