lundi 9 mai 2016

Un élevage industriel

C'est le capitalisme, le capitalisme de merde qui fait de nous des merdes qu'on recycle dans des machines à fabriquer de l'énergie indéterminée, du mouvement pour produire des richesses inutiles, des surplus aberrants, des montagnes de trésors inentamables pour des petits trous du cul sans cervelle qui n'ont pas su contempler une seule seconde l'abîme. L'abîme se regarde toujours seul, et ces gens là souffrent trop pour avoir cette force. Dans l'abîme c'est soi-même que l'on voit. Ce n'est pas toujours évident de se rendre compte que l'abîme ne renvoie pas d'écho, aucun reflet autre qu'un trou noir insondable, un puits sans fond d'où tout peut émerger, à chaque instant.

C'est le capitalisme le responsable, le capitalisme qui repose sur le désir des cons à posséder toujours plus dans une fuite éternelle où naufrage le monde avec eux.

Qu'auront été nos vies? Chaque jour fatigués de travailler des heures pour un produit intangible, tout juste quelques chiffres sur des comptes virtuels que des programmes informatiques ajoutent et font surgir du néant. Chaque jour à guetter la débauche pour aller s'oublier avec les autres, ne surtout pas rester seul. Et les fins de semaine à détruire la laisse qui nous tient en se rongeant soi-même le bras avec nos propres dents avides de croquer le temps.

Le temps qu'on ajoute, comme on entasse des billets, des possibles inutilisés, du néant imprimé qui provoque des rêves insensés qui concentrent l'illusion (comme tous les possibles) que dans l'ailleurs, dans l'autre qui n'est pas, se trouve un avenir meilleur.

C'est le capitalisme qui fait de nous ces fourmis apeurées. Et que sera le bilan de nos vies? L'illusion pour certains d'avoir "instruit" des humains? Sans voir qu'on n'aura fait que présenter le petit morceau de chocolat qui vient après la fin du repas indigeste qui vous assure une longue et interminable digestion, une langueur de toute la vie pour se faire baiser en silence, sans trop protester; ou alors en protestant à Auchan, les week-ends avec sa famille de merde, avant de rentrer commander une pizza et regarder les infos ou bien Ruquier à la télé, tous nos potes médiatiques avec qui on se sent tellement proches sans pourtant les connaître. Qu'est-ce que vous en avez à foutre de leur avis, de leurs jugements intempestifs, de leurs pensées tronquées, calibrées pour le seul format médiatique?

Qui arrive à sortir du système? Qui croit pouvoir le transformer réellement? Tous, de celui qui croit oeuvrer pour le bien, comme pour celui qui rêve de croquer la plus grosse part du butin, tous ne sont que des lubrifiants pratiques et interchangeables pour le beau rouage de cet étau.

Pour ceux qui passent à côté, ils n'auront fait que passer, rien n'aura changé, ils n'auront été qu'une histoire racontée et aussitôt oubliée, qu'un petit folklore d'un pays oublié, les personnages d'une utopie romanesque.

Qu'est-ce qu'il y a de pire qu'un abattoir? Un élevage industriel, parce que la mort recommence à chaque début de journée.

Une caresse sur le flanc et tout est reparti. Papa boit son whisky, tout va bien, tout va bien: regarde l'alternance des jours et des saisons, regarde, tu vois bien que tu as tort, la vie n'est pas une interminable ligne droite où le temps de chacun est canalisée à des fins délétères, il y a nos cinq petites semaines de vacances par an, les voyages, les souvenirs sur les photos, et les prochains jours fériés.

Aller, lève-toi, prends ton métro, tu verras, un café et tout repart, une bonne blague de cul avec les collègue, deux trois gonzesses à poil qu'on a élevé pour la branlette et tout va pour le mieux, le monde est beau, un bon délire. Mais qu'est-ce qu'on fait au juste aujourd'hui? On s'en fout remarque, personne ne sait vraiment, on est là, on a un boulot avec un petit salaire pour acheter les choses qui sont fabriquées, quelque part, pour qu'on les achète...

Mais qu'est-ce qui restera à la fin, des étoiles dans le ciel, des présences bienveillantes, du plaisir immédiat d'être au monde lorsque l'on prend conscience que rien ne vaut la peine... Vanité et poursuite du vent, qu'est-ce qu'il reste aujourd'hui de ces paroles.

Sur nos petites tombes poussent quelques mauvaises herbes, sur nos paquets de temps écoulés, s'acharne la nature imperturbable, immédiate et sans projet. On aurait pu être comme elle, simplement là.

Qu'est-ce qu'il y a de pire qu'un abattoir? Un élevage industriel, parce que tout recommence à chaque début de journée.

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