lundi 22 septembre 2014

Coeur brûlé

Vaisseau spatio-temporel à la carlingue usée, mille fois j'ai pris feu et me suis éteint dans les interstices galactiques, dans les océans entropiques où la volonté se calme pour un temps. C'est un cœur en fusion que le mien et qui parfois m'embrase et fait de moi cette comète furieuse qui laisse traîner sur son passage les débris de son être, le brésillement d'un échaffaudage branlant qui porte la promesse d'un édifice que l'on ne saurait voir.

Cette volonté qui bat comme un cœur, si fort, et qui s'affole pour me laisser exsangue, essouflé, sans oxygène à recycler, sans rien d'autre que la substance d'un "moi" épuisé et vacant. C'est dans les rares extinctions de sa velléité que je respire parfois, traversant le bonheur comme un paysage éternel qui pourtant possède une superficie délimitée. Je hume le bonheur comme si la seconde d'après n'existait pas mais la seconde d'après finit toujours par me rattraper.

Par ce brasier qui s'en va filant dans les étoiles, certains fragments de la vie se voient parfois attirés, intrigués par cet espèce d'empressement à la brutalité monotone qui voit ce navire du temps se fuir jusqu'aux limites de celui-ci. Rien de bon ne peut sortir d'un tel rapprochement, le vaisseau brûle de l'intérieur et brûle ce qui, à l'extérieur, se penche un peu trop vers l'abîme en folie. Combien d'Icare se sont vus chuter lourdement vers leur astre originaire?

La course est douloureuse, elle est souffrance et négation, jusqu'à ces acmés qui sont bien pires que la mort, où tout semble s'arrêter, tout semble vouloir imploser sous une force centripète insoutenable qui plonge sa pulsation mortelle vers l'infiniment petit, là où le minuscule particulaire devient un vaste illimité.

Mais il y a ces rares parenthèses où le navire suspend son cours et se laisse porter par l'inertie d'une contemplation apaisée. C'est un monde que ces instants. Défilé de photons, étoiles en fusion dont le coeur double se déchire, silence des supernovae dont le son assourdissant parviendra des milliers d'années plus tard, tournis statique des espaces infinis, ballet silencieux aux danseurs diaprés. Et le bonheur de se savoir une part du mystère, une partie du Tout qui nous saisit soudain: un point nodal d'exécution de lois cosmiques, sans la moindre responsabilité face au désastre qu'il est, infiniment libre par la nécessité.

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