lundi 19 mars 2012

La foule en silence

Il serait séant de bercer de silence le lit des nouveaux nés afin qu'ils n'entrent pas d'emblée dans le pandémonium des hommes. Nous devrions apprendre tôt à reconnaître le murmure et l'ériger en norme. Ainsi arrêterions-nous peut-être de couvrir incessamment le silence que nous celons en nous. L'enfant n'aurait pas à crier pour se faire entendre, que son bruit se fraye un chemin jusqu'à la conscience assaillie des parents affairés. Comme chaque son alors résonnerait à l'intérieur de nous... Nous distinguerions bien mieux le principe de l'harmonie et apprendrions-nous enfin à regarder nos pensées naître de la vérité du monde.

Je vois d'ici des foules silencieuses se lever pour abreuver de leur source l'humain qui s'ouvre à elles. La reconnaissance par le silence serait plus éclatante qu'aucun geste vain. Les regards convoieraient à eux seuls autant de discours muets que n'en contiennent les bibliothèques des mormons. Chaque être serait lié par cette musique intérieure que le silence porte bien mieux qu'aucun air d'opéra.

Les bébés ne pleureraient plus alors, heurtés eux-mêmes par le vacarme de leurs cris, quelques mots suffiraient à apaiser en eux la douleur d'être en vie. On distinguerait aisément les âmes en peine, ceux qui souffrent et desquels sourde une plainte émanant à la fois du corps et de l'esprit. Ceux-là n'auraient plus à s'égosiller dans un concours de vacarme, ils seraient entendus. Le monde en silence tournerait son air vers leur âme craintive, ils percevraient enfin cette absolue vérité de tout ce qui n'a pas de sens, ce qui ne requiert aucun souffle pour être porté.

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