mardi 13 mars 2012

Arracher

Un cri du coeur qui voudrait intimer au corps l'ordre de s'immobiliser le temps des responsabilités, jusqu'à ce que plus rien ne compte de ce que l'on peut faire, là où tous les espoirs sont vaincus, toutes les attentes déçues. Il faut s'arracher à cette indolence de la contemplation qui voudrait phagocyter la vie en son entièreté. C'est une certaine violence renouvelée pour moi, toujours la même coutumière sensation indéfinissable. Depuis que l'argent a remplacé la nature et que c'est désormais lui qu'il faut récolter pour survivre, depuis ce moment précis, le monde était devenu hostile à mon égard. Je rêve de société primitive où l'on doit tout faire soi-même: construire sa propre maison et cueillir ses propres fruits. L'acte vulgaire d'aller amasser son argent est mon bien nommé tripalium. S'arracher pour le non-sens, s'arracher pour cette régularité monotone qui grignote petit à petit l'intervalle restant entre l'homme et la machine. Dans ce gigantesque et infernal système de l'esclavage total, où chacun est l'esclave de l'autre, où chacun est dépendant de l'autre pour sa survie, je brise ma volonté, écrasé par le rouage dont je suis le lubrifiant remplaçable. Notre société du travail est une société d'anonymes, une société de gestes et de fonctions, elle n'est pas une société d'hommes. Je ne suis et ne serai jamais moi dans ce monde car je suis un intermédiaire, un processus et mon identité reste à jamais indifférente à tous.

Revenir en arrière? aller de l'avant pour d'autres. C'est un plaisir de réguler sa propre survie en fonction de ses besoins, d'être responsable de soi-même et d'agir en vue d'un résultat concret dont le sens n'est pas à créer ultérieurement. S'arracher dans ces cas là? Non s'élever et rendre la survie agréable parce qu'elle s'entretient directement par nos mains, sous nos yeux, dans le sentiment du devoir accompli. Je veux choisir mon propre mode de sauvegarde, n'être soumis qu'aux rythmes de la nature et non ceux du capital, je veux que l'humain soit la mesure du temps et non plus la production et le profit qui en découle. Ne pouvons-nous vivre en tant qu'hommes et accepter ainsi ce qui aux yeux de tous les puissants constitue la honte suprême: que nous sommes des êtres mesurés par la quantité car impliqués dans un écosystème lui-même mesuré. Pourquoi la démesure de l'homme s'incarne-t-elle toujours dans cette quantité qui n'est qu'une manière de détruire le temps et l'espace, au lieu de l'incroyable profondeur de la qualité d'une vie que seules nos consciences éduquées nous permettent de discerner. La profondeur d'un instant et d'un geste contre tous les wolrd trade center du monde.

Un jour, il faudra bien de ce jardin d'Eden, arracher les mauvaises herbes.

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