samedi 13 juin 2020

Visage de la nuit



Mais que se passe-t-il, le monde est en déclin. Les nuits tombent au sol comme pétales de rien. Je me souviens du futur et partout voit destins...

Il faut chanter, faire du temps la musique du voyage éphémère.

Tout me semble impossible et pourtant tout est là. Dans le moment vécu qui s'ouvre d'un regard. Dans les chaleurs d'été qui font languir les soirs. Tout n'aura-t-il été que déception? Ou tout le sera-t-il dès lors?

Chaque battement de cœur me semble un carrefour existentiel. Il faut choisir sans cesse entre vie ou bien mort. Entre cadre ou tangente. Entre une route incertaine et l'autre. Les chemins s'éparpillent, je vois les vies amies, je lis dans le flux du néant...

Cela a toujours été ainsi. Il n'y a que le regard qui change.

Qu'est-ce donc que je perçois dans le vague de ma vue, entre le sujet que je suis et l'objet qui surgit. C'est dans le vide de ce qui n'est pas visé que gît la plénitude. Et c'est alors, comme si rien de ce que j'observais n'était vraiment visé. Comme si le monde était prétexte à ces récits celés de subrepticité.

Je m'étonne, encore... Cela est bien. La vie ne cesse de m'étonner. Je suis la différence que je dois reconnaître. Je suis le devenir dans sa négation même.

Il faut chanter, que ne tombent du ciel ô jamais que des notes? Une scansion de l'aube, une harmonie de fluides. Ouvrir la fenêtre... Et peut-être entendre la voix dans l'air. Celle qui fera lever mes rêves de poussière... Celle qui fera avancer la carlingue usagée...

Fais-moi danser promesse des ombres fraîches. Fais-moi prendre instrument. Fais-moi jouer le monde. Et que maints univers jaillissent, symétries oniriques.

Ta voix se marie bien aux cordes que je pince. Et si le manteau étoilé du ciel se repliait enfin sur une robe enténébrée. Et qu'il marchait vers moi pour me prendre la main. Ou simplement pour observer dans le fond de mes yeux, la procession de l'âme.

Reprend ta robe univers, et montre ta démarche, je te reconnaîtrai. Je t'ai vu tant de fois, dans tant de soupirs expirés, dans tant de cibles j'ai visé, ta forme et ce visage imprécis pourtant si familier. Je ferme les yeux et ta robe existe. Valse son extrémité, tes jambes de fumée ne sont qu'un vent félin que je ne peux saisir. Je ne vois que ta robe d'étoiles, ta silhouette d'ambre, ta démarche de louve.

Que tes pieds foulent mon jardin. Les fruits sont mûrs, les herbes hautes. J'ai patiemment ourdi des fleurs imprononçables, inventé des couleurs pour œil de non humains... Ne vois-tu pas ce printemps reverdi qui seul en moi attend d'être à jamais ravi?

La porte est ouverte. La récolte est prête...

J'attends visage de la nuit. Que tu fondes sur moi et ramasse ma vie.


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