dimanche 15 novembre 2009

La vie active

"Au moins, j'suis dans la vie active, j'sers à quelque chose..." disait Mohammed, comme tant d'autres. Comment a-t-on pu mettre une idée pareille dans la tête des gens. La réification est aboutie au point que l'on se juge comme des objets. Même les objets inutiles sont considérés pourtant, alors pourquoi...?

On devrait leur dire tous les jours à ces gens qui se lèvent la nuit pour aller bosser toute la journée comme des chiens pour gagner des sous qui ne seront pas à eux au final, pour gagner la dignité qu'ils croient avoir perdu, et que le travail va leur rendre parait-il, que leur vie est une oeuvre d'art.

L'honneur perdu, c'est tout ce que je vois scintiller dans les larmes de cette femme attendant 12 heures par jour sur les parkings que les automobilistes viennent régler leur note.

Et ce petit patron qui se permet d'ordonner à cette pompiste, fière d'offrir sa vie pour ses enfants, de proposer systématiquement le lavage des vitres, et de lui dire qu'elle a été embauchée pour ça. Il fait nuit quand elle commence à travailler et il fait nuit quand elle finit, mais il fait jour dans son coeur à elle et c'est son soleil qui éclaire la vie de ses gosses et non pas le scintillement poisseux de vos sous!

Et vous leur faites croire qu'ils servent à quoi s'il vous plaît pour qu'ils continuent à nettoyer votre merde, pour qu'ils la bouffent aussi de désespoir! utiles à la société? Mais encore? Utiles dans quel sens, utiles parce qu'ils ramènent de l'argent tels des fourmis inlassables? Et dés qu'une conscience a le temps de naître malgré vos horaires infernaux, vous donnez un coup de pied dans la fourmilière et vous regardez amusés la débâcle funeste qui se déroule loin de vos yeux. Prenez garde qu'un jour les insectes que vous prenez pour esclave ne regardent pas vers le haut, et qu'ils vous voient là, dans vos appartements immenses, affalés sur vos canapés, pétris d'orgueil et remplis comme des barriques. Vous foulez le même sol que nous, n'oubliez jamais ça.

Vous n'avez plus rien d'humain, vous êtes d'une autre espèce dorénavant et la nature ne vous le pardonnera jamais. Gobergez-vous bien pendant qu'il en est encore temps, un jour vous vous vomirez.

Comme s'il fallait être utile pour mériter de vivre quand chaque vie est une danse folle, une oeuvre d'art en perpétuelle représentation, un cri d'amour jeté là au hasard, qui se pose sur les gens.

Chaque mouvement de la vie quotidienne, chaque mot, chaque regard est indispensable à l'univers car nous le constituons. À vous, les fourmis, les petites mains de l'amour, les hommes, je voudrais vous dire ceci. Lorsque vous prenez vos enfants dans vos bras, vous valez mieux que tous les millionnaires de la galaxie. Chacun de vos sourires fait se réveiller l'amour. Et vos larmes, oui vos larmes qui viennent frapper la pavé, tout comme vos pieds fatigués, ce sont autant de blessures infligées à l'harmonie.

Vous êtes beaux en tous points, avec ou sans travail, la vie bien menée est rémunérée par le bonheur un point c'est tout. Il n'y a rien à chercher ailleurs.

"Quand on ne travaille pas on pense beaucoup" disait encore Mohammed. Ah oui, c'est vrai ça... et on ne vous a pas appris à l'école à dompter cette pensée, à l'affronter, à la connaître, et à vous reconnaître en elle. Cette pensée qui vous effraie, c'est votre identité la plus profonde, c'est votre conscience d'humain qui vous murmure inlassablement du fond de sa prison que vous vous perdez petit à petit. C'est un crime que l'éducation ne prépare pas à ça. C'est une folie que le travail étouffe cette flamme qui ne demande qu'à réchauffer votre âme.

Cette pensée, c'est l'embryon de la révolte à venir, c'est un phare vers vous-mêmes. On vous ment perpétuellement, même avec tout l'or du monde et le travail le plus prestigieux qui soit vous ne serez pas heureux tant que vous ne vous connaîtrez pas. Vos pensées sont des fleurs qui ont besoin d'être entretenues, sinon c'est tout votre jardin intérieur qui se meurt. C'est ce qu'il y a de plus mystique en l'homme, de plus sacré, de plus fou. C'est une musique.

Envoyez paître vos patrons, crachez leur votre dégoût à la face et partez, partez! La liberté sommeille au fond de vos tripes, il faut la prendre sans demander, de toute façon elle est toujours d'accord, elle est à l'homme. Marchez libres, goûtez ce sentiment exquis, rien ne vous retient, ensemble on peut inventer la vie, et nous ne nous laisserons jamais tomber. Partez, réunissez-vous, cultivez un bout de terrain, discutez ensemble, hébergez-vous les uns les autres, apprenez à vivre sans eux, vous n'avez rien à envier, tout est à vous, vous êtes tout!

Nous apprendrons ensemble à changer les règles, d'ailleurs des règles, il n'y en aura pas, nous vivrons avec des valeurs, selon l'éthique et c'est tout! Les règles c'est bon pour les enfants, et l'enfance ça ne dure qu'un temps. Nous recréerons l'éducation, tout passe par là, c'est là que les valeurs doivent se transmettre, c'est là que l'on apprend à être un homme. La politique? Laissez-tomber, pari insensé que de vouloir imposer à des milliards d'êtres humains un modèle unique, figé. Vivez selon votre éthique, soyez un modèle pour les gens qui vous entourent, et les gens vous écouteront, les gens vous suivront même. Laissez-leur le temps, sachez être, n'attendez rien des autres, n'imposez pas, soyez et vous agirez immanquablement sur votre coin du monde, faites-moi confiance. Il suffit d'un homme pour animer les consciences car nous sommes tous d'une même réalité, d'un même système que nous tentons de comprendre jour après jour. Et voilà, c'est pas plus dur que ça, vous verrez, on arrête tout: le profit, les jugements, les lois, la standardisation, la réification.

Les choses n'ont de valeur que celle qu'on leur accorde...

1 commentaire:

Gérard a dit…

un révolutionnaire poète ou un poète révolutionnaire, la seconde proposition je pense plutôt.Bravo mon fils mais ne sois pas frusté ni haineux , ça fait du mal.maman