samedi 13 juin 2015

Les chants de Maldaurore

La meilleure part du soleil est loin derrière, du présent enfuie vers le passé, et qui voit sur mon sillon l'ombre portée du tourment, de la mémoire de celui qui ne peut oublier.

C'est un long fleuve de pétales fanés que ce chant de vie qu'est le mien, où, pareil au champ de mines, resurgissent parfois des éclats sublimés de tes gestes défunts, autant de pièges où ma durée s'écoule avec l'eau de mes yeux comme un écho solidaire d'un corps éteint.

Tu disais aussi que la plus belle face de la lune est celle qui brillait par l'astre éclairée, et je te crois, oracle inentendue, car cette face c'est tout ce qui n'existe plus désormais, l'obscurité sans nom de ce qui a vécu, les choses qui font signes vers ton amour dément.

Tu parlais de cet arbre qui est celui qui nous abrite au mieux des aléas du sort; d'aucuns croient qu'il est mort, mais s'il ne tient qu'à un fil, je crois qu'il vit encore. C'est toujours le noeud indéfectible de fibres entrelacées qui pulse dans mes mouvements, lorsque d'un déni presque absolu du présent, je saisis devant moi l'image que les souvenirs me tendent. Tu es dans bien des reflets où mes désirs s'épanchent...

Tu racontais aussi l'intemporalité de cette fleur, celle-là même que produisait les lettres que tu nouais de ton encre afin de me les offrir à moi, roi maudit, comme une couronne florale que je devrai porter durant ma triste vie. Ton poème c'est cet instant de ma vie qui par son intensité m'effraie et me brûle encore aujourd'hui. Je n'ai jamais mérité d'éloges, d'amour ou de confiance, comment porter la tienne, si aveugle et sincère?

Je ne suis pas un soleil, ma tendre femme, je suis la mort programmée de tous les feux du ciel, je suis le fond sans fond d'insatiables trous noirs, je suis ce qui déforme jusqu'à la grâce des espoirs.

Je t'aime moi aussi, de mon éternité maudite et qui persiste à fuir au loin de toutes choses. Je t'aime de la longueur qui s’accroît de mon regard vers toi, de cette distance désormais bien trop grande, et qui pourtant me porte sûrement au plus près de ton coeur.

Je ne suis pas un soleil, mais un long crépuscule qui plonge sa nuit dans un appel sans espoir vers les feux de l'aurore, vers le chant de ton corps.

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