Affichage des articles dont le libellé est hétéronomie. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est hétéronomie. Afficher tous les articles

dimanche 23 avril 2023

Aphorismes anti-scientistes

La vérité est cette recherche d'un autre que soi à qui se soumettre.

La vérité est, par essence, pure hétéronomie.

dimanche 21 janvier 2018

Hétéronomie du divertissement, autonomie de l'art

Le divertissement nous arrache à nous-même quand l'art nous y plonge.

L'industrie culturelle est dominée par le divertissement, on y voit ainsi des livres insipides recevoir de multiples prix littéraires,  des films sans épaisseur réaliser les plus gros nombres d'entrées. Les gens sont assommés par le travail et n'ont la plupart du temps pas l'envie de sonder les replis de leur âme. Or seul le divertissement peut offrir un repos, l'art au contraire requiert de l'énergie, il demande un véritable travail que nos sociétés d'esclaves ont rendu intolérable à nos moments de loisirs.

Les oeuvres de divertissement offrent, tout comme celles de l'art, une morale, mais de manière si évidente et sans subtilité que, là encore, elle ne se conquiert pas de haute lutte mais elle s'impose de façon univoque et vulgaire, presque racoleuse. Les gens s'habituent à ces fragments de "sagesse" qu'on dépose directement dans leur bec, ils deviennent de moins en moins enclins à réaliser les efforts d'intelligence que requièrent les morales celées dans l'oeuvre d'art. Cette dernière ne livre jamais complètement explicitement sa sagesse, mais elle se donne à nous comme une énigme qui requiert patience intelligence et créativité. Mieux, elle ne se donne pas comme telle, mais elle apparaît de manière suffisamment diffuse à travers l'ensemble de l'oeuvre pour qu'elle demande au spectateur de la créer par lui-même, à partir des éléments qu'il agencera selon son expérience, son idiosyncrasie et son désir d'approfondissement.

Il me semble que tout message qui veut voyager sous les atours de l'art doit apprendre les subtilités de la dissolution et du travestissement, il gagne à confier son unité entre les mains du spectateur dont la conscience est la seule unité réelle de l'oeuvre achevée. En d'autres termes ce qui fait la valeur d'une oeuvre à mes yeux c'est qu'elle nous amène à vivre une suite d'expériences qui ont été pensées par l'auteur comme étant propitiatoire à l'élaboration, par le spectateur lui-même, d'une idée (appelons la morale au sens large) qui devient alors lui-même auteur. L'art est un accélérateur d'expériences à travers lequel le récepteur doit éprouver sa propre puissance créatrice.

Qui écoute ses parents? Qui fait sien les interdits qu'on lui impose sans rechigner, leur obéit sans jamais penser à les défier, à en vérifier la véritable légitimité par l'expérience? Peut-être que des parents rêvent de ce genre d'enfants, mais l'art doit au contraire tirer le spectateur vers l'autonomie. Une leçon qui n'a pas été constituée par vous-même, à travers une expérience qui a produit l'induction nécessaire d'une certaine conclusion, ne sera jamais acquise véritablement. Elle n'aura eu pour mérite que de créer un tabou, un trou noir que l'on ne fait qu'éviter et dont l'effectivité repose sur la croyance elle-même fondée sur l'obéissance et la soumission à un discours d'autorité. Ce n'est pas, me semble-t-il, un monde auquel on peut aspirer, ni en tant que parent ni, plus largement, en tant qu'humain.

Ce qui a du prix à nos yeux c'est ce que nous avons dû surmonter, ce que nous avons conquis et c'est précisément un tel défi que doit constituer à mes yeux l'oeuvre d'art. Pourquoi diable les fables de La Fontaine ont un poids plus grand que si nous en extrayons la morale en une formule lapidaire que l'on jetterait au spectateur, si ce n'est précisément parce qu'elle telle formule serait dépourvu de valeur, resterait lettre morte, désincarnée.

Nous n'apprenons jamais rien que nos propres leçons.