Affichage des articles dont le libellé est connaissance. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est connaissance. Afficher tous les articles

samedi 28 mars 2015

Logique et épistémologie (0.3) [ BROUILLON ]

Préambule: troisième ébauche de cette réflexion. Je fais le choix de multiplier les esquisses afin de garder trace de chaque état d'avancement de la réflexion. Je m'avance a priori vers une conception "en strates" de ce travail, partant du fondement précédent pour apporter modifications et évolutions, jusqu'à obtenir un véritable plan définitif pour la rédaction de l'essai. Je n'ai donc aucune idée du nombre d'esquisses final. Je proroge ainsi l'entreprise de rédaction puisque celle-ci me pose encore quelques problèmes significatifs de pure forme. Par ailleurs, ces esquisses ne sont qu'un plan purement subjectif et déroulent ma réflexion sans enchaînement logique explicite (bien que celui-ci existe pour moi), d'où l'obscurité potentielle de mes propos. Tout cela, je l'espère, s'éclaircira lors d'une version 1.0 qui sera vouée au partage didactique.

La logique vient du terme grec  λόγος (lógos) qui peut signifier langage, parole, discours (sur l'être?). Le langage est une réalité qui fait signe vers une autre réalité, mais elle se veut plus qu'une simple nomenclature par son aspect analytique et synthétique. L'analyse permet au langage de décomposer un objet en ses parties constitutives et la synthèse de lier entre elles, par des règles logiques (identité, différence, causalité, etc.) des entités réelles représentées par des objets (ce qui revient à dire: des objets)(à développer dans un article indépendant). L'analyse casse ce qui est cohérent et uni, au moins en apparence, alors que la synthèse agit comme une force élémentaire en liant des objets entre eux par des règles, des lois qui les maintiennent en un système unifié.



Définitions


Objet: un objet désigne toute représentation constituant une unité dans notre esprit. Par exemple une bouteille en verre est un objet, au même titre que l'est n'importe quel morceau (arbitrairement choisi) de verre de cette bouteille que l'on isole et pense en tant qu'unité. Toute pensée ou sentiment est un objet, en bref, tout ce qui peut être constitué par l'esprit comme une chose propre à être réfléchie et avec laquelle il peut interagir au sein d'un système d'observation. L'objet est une donnée de l'esprit , formant une unité abstraite. On peut aussi confondre le terme d'objet avec celui de signe puisque toute donnée consciente et présente à l'esprit est un produit des sens et consiste en une sensation qui fait signe vers une éventuelle objectité. Jamais une image ou une sensation ne peut être prise pour une chose en soi puisqu'elle est toujours une interprétation à partir de formes a priori d'une relation entre soi et le réel. Même lorsque l'objet conscient est sa propre douleur physique par exemple, la douleur ne peut être confondue avec la chose en soi et l'on peut prendre une variété indéfinie de points de vue qui formeront une relation différente, un système soi-réalité singulier et irréductible. Pour ces raisons la douleur peut-être vue par exemple comme une impulsion nerveuse, comme un mouvement moléculaire, comme un plaisir, etc.

Classe d'objet: c'est une collection d'objets regroupés ensembles sous un même concept et donc unis par une loi de constitution. La classe d'objet est un synonyme du concept.

Concept: un concept est une forme représentationnelle déterminée par une loi de constitution.

Loi de constitution: une loi de constitution est une méthode de représentation et de classification d'objets, elle est la forme sous laquelle de possibles objets peuvent être subsumés et unis selon une définition ou un schème. Par exemple la loi de constitution du concept de "définition" est: "une proposition qui analyse la compréhension d'un concept, qui affirme l'égalité logique du défini et du définissant[...]" (encyclopédie Quillet, 1977). Autrement dit il s'agit de l'expression linguistique d'un concept, chargée d'en tracer les contours. Il s'agit aussi d'une méthode de subsomption. Par exemple le concept de parité en arithmétique définit une méthode d'arraisonnement d'objets mathématiques que sont les nombres, permettant d'en vérifier la conformité ou l'inclusion dans l'espace représentationnel défini par le concept (en l'occurrence un nombre est pair s'il est divisible par 2). Ainsi la loi de constitution est similaire à une fonction informatique qui attend un certain type d'objets en entrée et donne un résultat prédéfini attestant de la réussite (validité dans le cas de la loi de constitution) de l'opération sur les données. Dans l'exemple de la parité mathématique, on attend comme objet des entiers relatifs et en sortie un entier (dans le cas de la parité attestée) ou un rationnel (non parité). Je nomme ce processus loi de constitution car il s'agit bel et bien d'une loi qui, par son application va permettre de constituer l'appartenance ou non appartenance d'un objet à une classe.

Forme représentationnelle:  correspond à la structure formelle d'un objet ou d'une classe d'objet, il en est la condition de possibilité, il est le fondement sur lequel ils sont instanciés. Si la notion reste abstraite, c'est parce que son concept l'est: la forme représentationnelle est la zone d'existence de toutes les représentations. On a vu avec Kant comment l'espace et le temps étaient les deux formes essentielles et transcendantales de la sensibilité, la forme représentationnelle détermine précisément un morceau d'espace-temps (les deux étant des formes rendant possible la représentation d'objets). On peut faire un parallèle informatique pour illustrer cela: la forme représentationnelle est comparable à la zone mémoire allouée à une variable venant d'être déclarée dans un programme informatique, mémoire qui fait préexister la variable de manière indéterminée, c'est à dire avant qu'on la détermine par une valeur. La forme représentationnelle est donc cette zone, cette forme pure d'espace-temps, que l'on pré-alloue (en nous car il est impossible de préjuger d'une existence réelle de l'espace et du temps pour le moment) à l'objet ou à la classe d'objets que l'on va y instancier. Autrement dit, et pour schématiser, il s'agit d'un espace que l'on réserve, dans notre esprit, à la représentation d'une chose ou d'un concept, censé référer à un phénomène du sens externe ou interne (au sens kantien), et ultimement à une chose en soi. Il faut préciser toutefois qu'à aucun moment une forme représentationnelle n'est pure et indéterminée (ces deux propriétés demeurant des concepts-horizons) et lorsqu'on dit d'une telle forme qu'elle est encore indéterminée, il faut là encore penser à la variable informatique qui contient de toute façon et a priori une valeur (nulle ou autre) avant d'être déterminée précisément par l'acte de définition. Ainsi penser le temps et l'espace indéterminés, c'est déjà avoir en tête un objet déterminé (comme un mouvement dans une zone spatiale ou l'écoulement d'une substance, ou bien seulement le mot lui-même, etc.).

Signifié: Forme représentationnelle déterminée par une valeur, c'est à dire la représentation d'un objet ou d'une classe d'objet ou d'un concept, indexée par une loi de constitution (ou définition).

Le signifié n'est pas le référent, donc il n'est pas l'image que l'on associe au concept. Il définit la forme représentationnelle propre à constituer une série d'images adéquates. Il est donc un calque négatif, sans contenu, mais il constitue en cela la possibilité d'un contenu et donc de l'image, de l'objet. Le signifié est donc un type de variable défini par la loi de constitution de l'objet ou de la classe et qui, par des déterminations plus ou moins précises, va permettre à une image ou une valeur d'être instanciée, c'est à dire représentée.

En l'occurrence, pour l'être humain, la détermination consiste en une image synesthésique (en ce sens qu'elle peut ne pas être exclusivement visuelle, bien que cela semble être quasiment tout le temps le cas) constituée à partir des sensations. J'insiste sur ce caractère concret du signifié, voire matériel ou du moins sensible, puisque même lorsque nous pensons des concepts abstraits tels que l'infini par exemple, une sensation et un sentiment sont associés, ce sont précisément eux, l'image sensible du concept, qui sont le vécu psychophysique de celui-ci et donc son signifié (au sens où l'individu parlant interprète). Il est assez remarquable à cet égard que lorsqu'on lit par exemple une langue dont on ne connaît pas l'alphabet, aucune image acoustique ne vient accompagner la lecture d'un mot (bien que nous ayons tendance à plaquer de toute façon un son sur le mot lu en acceptant d'être dans l'erreur) et le sens reste absent, la mémoire ayant même tendance à oublier très rapidement la lecture de cet objet non identifié ne sachant qu'en faire. Il suffit qu'un non mathématicien lise des équations mathématiques complexes pour expérimenter cela, il sera incapable de reformuler les équations même faussement puisqu'il aura perdu trace (n'ayant nulle image) de certains caractères lus. Il semble donc prudent d'affirmer que tout énoncé ne suscitant aucune image demeure perdu et comme non avenu.



Raisonnement


Hypothèse: Les mots ou signes linguistiques délimitent des espaces représentationnels que sont les signifiés. C'est à dire qu'ils sont des pointeurs vers un espace représentationnel déterminé par une valeur qui peut varier au cours du temps et dont le contenu n'est jamais défini que négativement ([ À développer ]: un signifié est un contours, son essence n'est jamais donné probablement car son essence n'est qu'une forme spatio-temporel).

Par conséquent le langage est une sorte de théorie des ensembles (fait écho à Hobbes) sans laquelle les mots définissent des espaces représentationnels qui s'incluent ou s'excluent les uns les autres. Le mot semble délimiter ou circonscrire un espace représentationnel afférant à une classe d'objets. En ce sens, le mot "être", compris comme un substantif, semble subsumer sous lui la totalité des objets concevables, il est donc l'ensemble de tous les ensembles (même lorsqu'on parle de non-être, si une quelconque représentation est déterminée alors on ne pense jamais que de l'être. D'ailleurs un  non-être absolu est impensable car il est un concept sans forme, il n'est que le non dicible que le discours détruit).

Comme le définit Saussure, le mot ou le signe linguistique semble être une entité à double face, chacune des faces habitant un plan ontologique différent: le signifiant est une forme physique ou matérielle (reposant donc sur un objectivité et, in fine, sur une objectité. [ À développer: l'objectité n'est que l'être en soi, support énergétique de toute chose, cf texte sur l'objectité] et le signifié est une valeur dans l'espace représentationnel. Cette distinction est primordiale puisqu'elle confère au langage la propriété fondamentale de pouvoir convoyer les représentations singulières des individus sur la base de formes matérielles objectives finies et pouvant subsumer en classes des séries infinies de représentation selon une loi de constitution.

Corollaire: Ainsi la logique est elle aussi pareille à une théorie des ensembles puisqu'elle est un méta-ensemble: un discours sur le discours. Donc ses signes définissent des ensembles dont les signifiés sont les lois de vérité du langage. Autrement dit, la logique définit des concepts sous lesquels sont subsumées les règles d'usage du langage lorsqu'on l'utilise pour raisonner, c'est à dire pour calculer, inférer, déduire, etc. En cela la logique est une règle ou une méthode de découverte d'inclusion ou d'exclusion entre des signifiés dont le rapport qui les unit n'est pas contenu analytiquement dans l'un des deux. La logique est donc la théorie des ensembles qui permet les jugements synthétiques a priori dont parle Kant.

La logique est un jeu de signes de signes. C'est pour cela qu'on a été amené à dire (Wittgenstein, tractatus) qu'elle est tautologique: elle dit ce qu'il est loisible de dire de l'être si l'on veut respecter ce critère d'évidence qui semble intrinsèque à l'homme et à son expérience ([ À développer ]quelle est l'origine de la logique?). Le signe étant un support (signifiant) de la représentation (signifié), il faut, pour que le langage puisse être compris, que les signifiants eux-mêmes puissent être pensés dans l'espace représentationnel afin de leur conférer une loi de construction immanente et implicite (implicite dans le cas où ils ne sont pas pris comme objets de pensée mais comme supports). Il n'y a véritablement de langage que lorsque ces règles sémantiques sont fixées et que le langage (dans sa dimension signifiant) est pensé comme objet conceptuel, c'est à dire que les signifiants sont conçus en tant que signifiés, afin de devenir des objets et non plus des supports objectifs. (distinction grammaire-logique: l'un pour le sens, l'autre pour la vérité?) ([ À revoir ] Cette scission signifiant-signifié est-elle claire? Le signe est à la fois signifiant et signifié, les deux étant indissolublement liés donc le paragraphe ci-dessus n'est pas clair: à revoir).

Question: éclaircit-elle pour autant les choses et le discours lui-même?

Hypothèse: elle ordonne le langage qui permet d'ordonner les choses (il les subsume dans des ensembles). Autrement dit elle permet de comprendre la manière dont le langage s'articule aux choses, aux objets. En effet, le langage est contraint, pour ne pas être vide, de se soumettre à des règles par lesquelles il s'applique aux objets, ce sont précisément ces règles que la logique énonce (en tout cas en ce qui concerne le raisonnement judicatoire - comprenant le raisonnement apodictique et dialectique).

Question: ne fait-on que penser des grandeurs (les ensembles étant assimilables à des grandeurs, représentables par des ronds d'une étendue déterminée sur une surface plane)? Lorsque je pense une qualité (comme la couleur verte par exemple), comment en rendre compte sous la forme d'une grandeur, d'un ensemble?

Hypothèse: car toute qualité s'insère (dans le langage) dans une collection de qualités, celle-ci formant un ensemble ordonnable en sous-ensembles (ce qui constitue précisément la définition d'un universel ou d'un concept). C'est en ce sens que l'on peut parler de grandeur, bien que le terme forme semble plus approprié.

En fait, chaque forme est remplie par une ou des qualité(s), qui sont des sensations ou impressions vécues.

Question: si ce sont des grandeurs alors elles sont mesurables et comparables entre elles? Ainsi il serait possible de comparer la forme "couleur" à la forme "justice"?

Hypothèse: Non: deux concepts ne sont comparables entre eux, en terme de grandeur, que s'ils subsument les mêmes unités. Par exemple le concept de couleur primaire subsume des couleurs, tout comme celui de couleurs secondaires. Puisqu'ils subsument le même type d'unité (des couleurs), il est possible de calculer le nombre d'unités que renferme l'un et l'autre et de faire une comparaison. Cependant, si deux concepts ne subsument pas le même type d'unité (comme la justice et la couleur), alors ils ne sont absolument pas comparables en terme de grandeurs, le terme de grandeur semble même plutôt déplacé dans un tel cas.

Ainsi, les ensembles, moins que des grandeurs, devraient être appelés formes car un ensemble n'est mesurable que par le nombre d'unités qu'il renferme. Or si l'on s'arrêtait là, cela supposerait que chaque ensemble est mesurables en terme d'unités qu'il contient et que l'on peut comparer deux ensembles en proportion du nombre d'unités qu'ils renferment ce qui impliquerait une équivalence des valeurs de chaque unités dans les différents ensembles. Ce n'est pas le cas. Une unité n'a pas de valeur étalon universelle, on ne peut comparer un centimètre avec un décibel par exemple.

Par conséquent, l'idée de grandeur pour qualifier les ensembles peut être trompeuse parce que chaque ensemble est unique et ne peut être comparé à un autre. Ainsi on dira désormais d'un ensemble qu'il est une forme de formes.

Corollaire: Nous avons définit, au sein de la forme couleur, une couleur définie (par exemple le rouge), comme une unité. Le terme unité suppose l'indivisibilité ce qui ferait du concept de couleur non une forme de forme mais une forme ou un ensemble d'unités, et cela contredirait la démonstration précédente. C'est donc que le terme unité pour qualifier ce qui est subsumé sous un concept n'est pas approprié ou du moins l'est seulement dans un certain contexte. Ainsi, nous dirons qu'une unité est fixée par l'abstraction dans laquelle on pense. Donc l'unité est un attribut que l'on fixe "arbitrairement" sur le niveau d'élément que l'on considère le plus bas d'un ensemble.

Par conséquent, les unités peuvent, dans une autre abstraction, devenir des ensembles.





Un ensemble est potentiellement une unité et une unité potentiellement un ensemble excepté pour l'ensemble de tous les ensembles et l'unité de toutes les unités (à supposer que de telles choses existent réellement, auquel cas elles sont limités par autre choses, etc.; par conséquent ces concepts ne peuvent qu'être des limites de la raison, des horizons virtuels).

L'idée d'unité n'est donc qu'un concept dépendant du niveau d'abstraction dans lequel il est pensé (comme le montre la figure ci-dessus)  et il sert à marquer qu'un type de forme déterminée est le plus bas degré que l'on pense au sein d'un concept, constituant ainsi ce qu'on peut nommer unité.

N.B.:  une forme n'est pas une grandeur car le rapport de subsomption n'est pas défini par une surface ou une étendue:
  • L'inclusion est spatiale et donc étendue.
  • La subsomption est conceptuelle.
Question: quel lien entretiennent donc les formes avec le réel?

Hypothèse: les formes sont l'interprétation du réel dans le système de la conscience, elles sont des valeurs (comparables à des notes de musique) dans la mélodie de la conscience. Il semble que les formes soient une méthode de représentation du réel, elles définissent des patrons ou modèles porteurs de propriétés générales selon lesquelles les représentations singulières peuvent être interprétées. La forme peut être vue comme un concept qui est la synthèse d'autres concepts, permettant la division des sensations, leur analyse en différentes classes générales correspondant aux structures cognitives de la conscience ([ À développer ]ces structures sont-elles dynamiques et acquises ou bien figées et innées?). La forme est avant tout une méthode de division en unités. La conscience est une constructrice, une bâtisseuse, elle ne perçoit du monde et de l'objectité que ce qu'elle peut en recréer selon ses formes a priori (temps, espace, ?). Ainsi, l'objectité est un matériau, une cause par laquelle la conscience conçoit un monde et les formes dont elle se sert sont pareilles à des briques voire à des matières qui lui permettent de représenter un monde selon des principes connus et reposant in fine sur sa propre nature. Ainsi, la forme est pareille à la note, au concept générique de note en tant qu'il définit par exemple une noire. N'importe quel fréquence peut être subsumée sous le concept de noire, mais le concept est là qui distingue et définit, qui place dans un système et organise la sensation dans un ensemble constitué de règles.

N.B: Les formes ne sont pas totalement arbitraires car la conscience a une certaine manière objective (au sens kantien donc propre à l'espèce humaine) d'interpréter, de lire le réel; elle est donc soumise à une certaine loi naturelle. Par exemple, il n'est pas en mon pouvoir de ne pas voir en couleurs. Il semble donc bien exister une base psycho-physique correspondant au formes de la sensibilité kantiennes, en ce qui concerne les catégories il faudra déterminer si ces dernières sont acquises ou innées (ou bien les deux).

On pourrait donc parler de prolepses propres, dans une certaine mesure, à l'espèce humaine (couleurs, sons, toucher, formes visuelles, saveurs, etc.).

Question: qu'apporte le langage à cette base naturelle? En effet, l'homme perçoit des couleurs et ce quand bien même il n'aurait pas de mot pour le concept?

Hypothèse: Certes, mais le langage ajoute à ces formes,  les formes de formes, la subsistance de formes virtuelles, indépendantes de l'expérience et échappant à l’évanescence grâce au mot et à son support physique qui réduit la série d'une famille de sensation en une étiquette, en un signe facile à conserver en mémoire. On peut comparer cela à la création d'un monde, ou plutôt d'un sur-monde ou d'une légende (méta-monde? Les bases de la métaphysique ne sont-elles que les bases de notre conscience et de notre rapport au monde?).

Question: pour quoi faire? Pourquoi avons-nous besoin de cette carte que l'on surimpose aux sensations?

Hypothèse: ces formes de formes sont nécessaires pour alléger le travail de l'esprit et naissent effectivement en partie pour des raisons pratiques de survie. L'homme sans ce sur-monde qui simplifie, regroupe en ensembles synthétiques le nombre infini des singularités, serait plongé dans une hébétude perpétuelle, pareille à cet étonnement philosophique propre à la recherche spéculative; or la survie n'a pas ce luxe.

Ensuite, c'est pour répondre à ce besoin de totalité et d'unité qu'est la raison. La raison crée des séries ordonnées par une loi d'unification, ainsi elle subsume le pluriel dans le singulier jusqu'à créer cet ensemble de tous les ensembles qu'est la conscience.

La subsomption permet à la raison de manipuler des formes très abstraites (c'est à dire contenant de nombreuses formes) qu'il est possible (même nécessaire à certains moments) de développer analytiquement.

Question: Donc tout est analytique? La connaissance n'est jamais synthétique (réfutation de Kant)?

Hypothèse: il semble, a priori, que la connaissance puisse être synthétique. Une connaissance ne devient analytique qu'une fois que les formes liées synthétiquement sont subsumées sous une nouvelle forme (définie par une loi). Il faut donc la naissance du nouveau concept qui va lier deux autres concepts auparavant étrangers l'un à l'autre pour que la connaissance devienne analytique.

En fait, il semble que l'association des formes entre elles soit synthétique, elle est une tentative de création d'un système régi par des lois définissant les rapports des formes entre elles. Ce système se construit à la fois a priori, dans une tentative d'anticiper l'expérience, et a posteriori, dans une perpétuelle correction et vérification de l'effectivité du modèle conçu.

Ainsi la dimension analytique n'est que le résultat de la synthèse, une fois cette dernière réalisée ([ À développer ] pas si simple, Kant montre bien que le chiffre 12 n'est pas compris dans l'addition de 7 et 5 mais que la somme des angles d'un triangle est compris analytiquement dans le concept de trois droites sécantes )

Question: comment les jugements synthétiques a priori sont-ils possibles?

Hypothèse: voir Kant :-)

Mais la solution kantienne suppose que par les catégories et les formes de la sensibilité, nous avons en nous la loi de constitution de toutes les formes, c'est à dire la forme de toutes les formes.

La loi de constitution est l'imagination, seule capable de lier sensibilité et catégorie en simulant l'expérience (c'est l'exemple de la géométrie où l'esprit construit les figures par application des catégories dans les formes de la sensibilité et découvre ainsi a priori des synthèses de formes).

Encore faut-il avoir identifié quelles formes a priori sont réellement effectives, c'est à dire correspondent à l'expérience (ou rendent possible l'expérience pour paraphraser Kant). Et là, visiblement, les catégories kantiennes semblent un fondement solide...

Question: la logique tétravalente modifie-t-elle les catégories?

Hypothèse: il semble que oui.

Notons tout de même que les catégories n'obéissent pas à une logique bivalente mais trivalente. Prenons l'exemple de la table des catégories correspondant à la quantité.

Chez Kant la quantité se décompose en trois catégories:
  • Unité
  • Pluralité
  • Totalité (réunion des deux autres -> équivaut au OUI et NON logique)

    En logique tétravalente nous aurions l'ajout d'une quatrième catégorie:
    • Unité (équivaut à OUI)
    • Pluralité (équivaut à NON)
    • Totalité (correspond à la synthèse des deux précédentes -> OUI et NON)
    • Altérité (correspond à la négation des trois catégories précédentes -> NI OUI NI NON; notez que l'emploi du nom 'altérité' pour qualifier cette catégorie n'engage que moi, mais il reflète bien la spécificité de cette valeur possible en logique tétravalente: ici nous n'avons affaire qu'à des quantités, et pourtant, la dernière catégorie est intitulée 'altérité', propriété plus qualitative que quantitative, ce qui souligne bien le caractère étranger de cette dernière valeur)
    Question: cette catégorie qui est l'opposé de la totalité (= union de la pluralité et de l'unité), c'est à dire ni unité, ni pluralité, existe-t-elle? En a-t-on besoin?

    Est-ce que [oui et non] est équivalent à [ni oui ni non]?

    Hypothèse: non: les deux ensembles ne sont pas équivalents.

    Ni oui ni non suppose l'existence d'une autre objectivité qui serait toutefois prise en compte (conçue négativement) par notre objectivité et grâce à la tétravalence.

    Par conséquent la logique tétravalente permet de penser un autre monde (négativement). Elle peut s'apparenter à la formalisation du noumène kantien: il s'agit d'une limite, une frontière qui permet de penser notre totalité (objectivité) comme n'étant pas la totalité réelle, mais intégrant tout de même cet au-delà impensable au sein du système langagier.

    mardi 16 septembre 2014

    Redéfinir la connaissance

    Peut-être un jour deviendrais-je totalement fou, et cette antique croyance en la connaissance n'y sera pas pour rien.

    Connaître une chose, c'est d'abord n'être pas cette chose (on ne connait de soi que l'autre, l'observable), et c'est en observer les innombrables effets directs ou indirects (les effets sur notre corps sont plus directs que ceux observés sur un objet servant de sonde par exemple) sur nous.

    La connaissance est donc chose bornée dans la relation d'un connaissant à un connu. Cependant elle est aussi illimitée en ce sens qu'elle est la possibilité de changer indéfiniment de point de vue sur la chose. Toutefois ce changement de référent n'est que virtuel puisque tout homme ne connaît que son vécu propre, quand bien même il intégrerait à celui-ci le récit du vécu d'un autre homme ou objet. Quand je parle de récit d'un objet, j'entends par exemple la traque d'une particule encore non observée à l'aide de ses effets supposées sur d'autres particules observables. Ainsi, lorsque nous augmentons nos points de vue, nous ne faisons en fait que mettre des lunettes devant nos yeux, pour chaque point de vue, une paire de lunette différente.

    Ainsi connaître est une utopie, la résolution impossible d'un paradoxe: la nécessité d'une relation bornée et duale, couplée à la volonté de posséder simultanément tous les termes de cette relation à un objet. Non seulement il est impossible à un être de posséder réellement un autre point de vue que le sien (d'être un autre point de vue), mais dans cette quête a priori impossible, vient s'ajouter l'impossibilité de réunir en une synthèse parfaite tous les points de vue. Pire, dans l'éventualité d'un univers infini (infiniment grand comme infiniment petit), l'accumulation d'un grand nombre de points de vue par rapport à un plus petit ne peut nullement représenter un progrès de la connaissance car rapporté à l'infini, aucune quantité ne peut être plus ou moins grande qu'une autre. On peut illustrer ce fait ainsi: nul n'est plus proche de l'horizon qu'un autre. Il n'y a qu'en plaçant une fin supposée, une limite implicite, que nous pouvons croire en un progrès; or cette fin implicite, c'est nous même: la structure a priori de notre être. Même lorsque nous envisageons l'infini, nous le faisons du point de vue de l'unité de notre conscience, feignant ainsi de pouvoir comprendre en une idée finie ce que peut être un infini sans borne.

    dimanche 4 mai 2014

    Méthode et gnoséologie [ ESQUISSE ] [ INTRO ]

    Une des plus belles démarches philosophiques fut à mon sens le doute cartésien dans sa manière radicale de vouloir fonder une nouvelle base de la connaissance, affranchie du poids des croyances passées, cristallisées en dogmes pesant que tout penseur se voyait contraint de porter sur son dos, sans trop savoir qu'en faire. La méditation cartésienne, dans sa méthode, me semble représenter un des points de départ de la philosophie. La négation de tout ce qui a été cru jusqu'à présent et la découverte évidente et pure d'une première vérité sont une tentative louable et nécessaire. Peut-être, d'autres méthodes existent, qui consistent à partir des idées reçues ou des hypothèses émises, afin de les analyser en leurs principes élémentaires. Cette opération répétée sur maints sujets permettrait, je pense, de parvenir à un échantillon de principes qu'il s'agit d'interroger comme fondement de la connaissance humaine.  Il me semble aussi important de marier les deux méthodes, la première afin de comprendre les premières données immédiates de la conscience, et la seconde afin de mettre au jour les axiomes de tous nos concepts et de tous nos jugements.

    Lorsque je réfléchis au chemin de Descartes, et que je tente, pour moi-même, d'appliquer cette méthode, je reste invariablement bloqué sur la première évidence: je suis. Ou plutôt: je pense, je suis. La liaison des deux prédicats me semble importante puisqu'elle m'apparaît révéler quelque chose de primordial sur l'évidence qu'est l'être. L'être est l'unique jugement, la seule connaissance fondamentale que l'homme peut atteindre immédiatement (c'est à dire sans concepts intermédiaires). Cette vérité est analytique et me semble contenir toutes les autres: de l'être, tous les prédicats peuvent êtres tirés, tous lui appartiennent et sont compris en lui. Pour cette raison, Descartes peut lier de manière évidente "je pense" et "je suis", car je pense est une modalité de l'être, la pensée est un concept inclus dans celui d'être. Seulement, l'être est ici un concept quasiment vide, il est le mot que l'on place sur l'expérience du vécu réflexif. En ce sens, être ne veut rien dire, mais il accompagne le vécu. On n'a donc rien appris par le langage en disant, lorsqu'on est conscient de vivre, "je suis". Être est l'indétermination totale, être représente le possible, il est le prédicat qui contient en puissance tous les autres. Dire "je suis" revient à dire "tout" ou "rien", ce n'est que la condition de possibilité de tout discours, tout comme "être" est la condition de possibilité de toutes choses.

    Enchaîner ensuite sur le fait que je suis une substance pensante est un pas de géant, un pas trop grand pour permettre à celui qui prononce ce jugement de voir précisément la distance qu'il parcourt. Dire "je pense" est encore user d'un prédicat non doté de sens: penser n'est ici qu'un mot qui accompagne un vécu, celui de la conscience et de sa mélodie, et plus particulièrement telle qu'elle est vécue par l'intermédiaire du langage. Si j'emploie le terme "mélodie", c'est parce qu'il me permet de souligner le caractère temporelle ainsi que l'unité de la conscience: celle-ci est comme une mélodie qui concentre en un moment présent une certaine durée écoulée et passée: c'est la synthèse kantienne ou aperception. Alors il semble que le "je pense" inclut d'autres concepts: celui de temps, celui de mémoire, et leur synthèse en la musicalité (si tant est qu'on puisse réduire la musicalité à une synthèse de ces deux concepts). Déjà, le tableau se complexifie, qu'est le temps et comment ce concept est-il né du simple constat du vécu? Où peut-on aller après l'affirmation du "je suis", sans même parler de ce mystérieux sujet "je"?

    La complexité de l'entreprise rend le résultat hasardeux et il semble de plus en plus difficile d'atteindre à un résultat à partir de cette méthode. Refonder le savoir à partir de l'expérience pure revient à vouloir partir de l'être pour remonter au connaître: on ne constate tout au plus qu'une sorte de correspondance entre les deux dimensions, la connaissance tente de décomposer l'unité de l'expérience, d'en écrire la partition à l'aide de signes. Mais la question demeure toujours: quel critère nous permet de savoir que ce que nous disons de l'être lui correspond bien? D'ailleurs, la connaissance prise comme modalité de l'être peut-elle seulement prétendre à expliquer l'être dans sa totalité? Impossible nous dit la logique, la partie n'englobe pas le tout. Ainsi je pose une limite à cette méthode: elle ne nous permet tout au plus de remonter qu'à cette première vérité de l'être que révèle l'expérience, et reste utile ponctuellement lorsqu'il s'agit de s'affranchir du poids d'un savoir devenu trop encombrant. Le doute hyperbolique ne mène à rien d'autre qu'à l'expérience muette qu'est le retentissement de l'être, connaître est un fait de langage et ne peut s'envisager qu'à partir de connaissances dont le fondement ultime repose en la croyance: c'est le socle des axiomes qui maintient le logos et lui permet d'exister.

    Pour ces raisons, j'ai tendance à juger plus "réaliste" la seconde méthode, qui consiste non à vouloir faire la genèse du savoir à partir d'un esprit gros de préjugés, bâti sur un langage lourd de concepts implicites, mais plutôt à partir de notre édifice gnoséologique afin d'en étudier les éléments et articulations en architecte, afin de comprendre (analytiquement) ce que contiennent les formes de certains jugements, de certaines connaissances et de remonter à leurs conditions de possibilités. C'est à partir de ces conditions de possibilité, déduites et peu à peu exhumées, qu'il faudra interroger la validité et la valeur de nos savoirs et de leurs fondements. Quelque chose me laisse accroire que tout ce que nous appelons savoir spéculatif n'est qu'un reflet de nos processus cognitifs (et je crois que nous avons notamment hérité cela de la critique kantienne) en prise avec l'altérité de la réalité. Mais je ne peux préjuger de ce qu'une telle démarche révèlera quant à la nature de la connaissance et surtout du lien que celle-ci a pour velléité de créer avec la dimension ontique. Au fond connaître ne dis probablement rien de l'être, ce n'est peut-être qu'un mode d'être bien particulier, et tous nos critères ne tirent peut-être leur valeur qu'au regard de notre expérience, subjective et personnelle d'abord, collective et humaine ensuite; peut-être est-ce là tout ce qu'il y a à savoir. La science, dans sa tentative de synthétiser toutes les expériences possibles de l'être dans un discours et de les rendre accessibles à un être particulier qu'est l'homme est-elle une entreprise utopique et par essence irréalisable, ou bien un processus en cours? Voilà le genre de questions que la démarche que j'engage entend bien poser et examiner.