mardi 17 août 2021

Grammaturgie

Ces jours-ci je ne suis plus terre, silice producteur qui fait jaillir de lui d'infimes canopées juchées sur les épaules d'un réseau racinaire immense. Je suis un jardinier. J'arpente mes forêts, sombres ou claires, mes prairies, mes haies, je taille de-ci de-là, j'étête, oriente, compose des bouquets avec les fleurs qui poussaient en désordre; en bref j'habille le réel d'un peu d'humanité.

C'est comme s'il m'était impossible de jouer ces deux rôles en même temps, de me faire jardinier tout en demeurant alme biotope. L'élan d'écrire est presque totalement tari par les nécessités de la grammaturgie (artisanat laborieux et patient) qui m'emmène promener dans les allées de ces jardins entropiques et leur esthétique dévastation. Je vis l'hiver de ma région créatrice; je consolide et entretiens l'entrelacs de mes rimes qui abrite cette part de moi qui ne saurait exister dans le monde tel qu'il est, et surtout tel qu'on l'a fait.

J'ai bien une maison, une terre, une origine, mais nulle patrie, aucun pays et encore moins de nation. Acosmique, si tant est que la grammaire poétique ne puisse être un cosmos que l'on porte en soi autant qu'il le fait.

Ô combien la poésie est une terre d'asile pour tous les philosophes non dogmatiques.

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