mardi 27 septembre 2016

Archi-proté-omni?

Des fruits mûrs au-delà des frontières de ma bouche.
Rouge carmin de tes lèvres mordues, groseilles pourpres sur le bout de mes lèvres, ma chute ascensionnelle vers tes fruits défendus.

Enfin je puis goûter, de ces routes inempruntées.
Je cours, je flâne et vole; je tâte touche et presse tous les boutons de fleurs de l'existence.

Mes désirs sont des bulles qui prennent la couleur des campanules, et sous l'étrange cloche se dorent la pilule.

Des battements de coeur qui sont comme des danses, et des danses que je me prends à danser, comme une pluie d'été qui roule sur tes hanches.

Je connais des croisières sur des océans inversés, où coulent vers le ciel les quelques songes à ton sujet que je jette sur le pont, comme une poignée de galets.

Des portes au mystère aboli mais dont pourtant toujours renaît l'attrait nouveau.
Je prends des ponts au hasard, je traverse toutes les teintes de noir sans trop m'y arrêter.
Je fends tous les brouillards, s'y découpent d'innombrables silhouettes où glisse mon regard qui continue toujours. Aucune ne ressemble à la tienne.

Des jeux sérieux m'accaparent, de ceux où l'on mise avec sa vie comme s'il s'agissait d'un vulgaire vêtement que l'on mettrait en gage.
Et je gagne en perdant, de belles vahinés me jettent autour du cou des colliers de fleurs, corolles bariolées caressant mon visage.
Je mange des mets exotiques, et d'autres plus communs, j'ai l'appétit de tout, j'explore comme des contrées, tous les goûts que l'on peut rencontrer.

J'escalade toutes les montagnes, malgré mon vertige, et je regarde autour comme une statue figée.
Je me laisse embrasser par tous les vents, toutes sortes de désirs lèchent ma peau douce, je suis de tous les vices et délices.

J'ai appris à ramper, marcher, courir, glisser, voler et tout ce qui existe entre ces mouvements.
Régulièrement, il m'arrive d'arpenter des galaxies foraines et d'incruster ma nomade existence sur le dos de planètes inhabitables où je m'épanouis pourtant. Je vis sur tous les rythmes, je trace mon sillon sur des surfaces intouchables et stocke ma mémoire en des supports virtuels.

J'existe sans vraiment être, je souris dans les larmes et pleure au sein des rires.

Je me vautre allègrement, et sans cas de conscience, dans tous les paradoxes, je me laisse attraper par des mains curieuses, puis je glisse bien loin, ailleurs, vers d'autres Betelgeuse.

Ah j'oublie les chants qui tous se donnent la main pour tisser de musique des demeures vibratoires. Mes pensées sont de toutes les formes pulsatiles, elles n'obéissent à aucun devoir.

J'emprunte toutes les morales, puis je les rend à l'arbitraire, chacun est libre de croire.
Alors je crois, puis me fait apostat, mais quelque chose en moi, ne peut se lasser de croire en toi...

Je connais tous les êtres, je participe à chaque relation, ubique, je deviens tous les points, et me fais ainsi chaque vue. Du regard dégoulinant à celui qui rayonne, je ne renie nul étant, je deviens et claironne.

J'ai eu tous les enfants du monde, j'en ai aimé certains et puis détesté d'autres.
Je suis celui qui cogne et celui qui caresse, celui qui aime déchirer et celui qui console.

Je vis dans toutes les époques, des teintes primaires du néandertal au raffinement doré de la Renaissance, je prends le ton, me laisse peindre, enguirlander, embrigader, aliéner, aimer, voler, mais toujours, je m'en vais.

J'ai cousu mes poèmes les uns dans les autres afin qu'il ne fasse qu'un seul grand destin, celui d'un être littéraire, et j'aime à voir les lecteurs confondre le reflet avec l'objet reflété.

Être partout et nulle part, voilà ce qui me plaît, une ombre dans ton coeur, sur la rétine un éclat de couleur.

Je suis le marron qu'il y dans le rouge et le vert dans le jaune, j'ai mis toutes les couleurs dans la profondeur de mon bleu, et des univers en jaillissent en pagaille avec des étoiles violettes et des soleils noirs.

J'ai observé un jour la formation des vagues, j'ai pu déterminer la méthode qui les fait exister. Je suis désormais chaque vague, je puis les faire déferler en des mondes intérieurs bien réels, où viennent des surfeurs qui sur leur peau se démènent.

Je parle et tout advient, je fais et tout s'écrit, quelque part, en chaque lieu parce qu'un lieu est partout et que partout ne réside en rien.

Je suis le resquilleur de tous les trains, assis près de la fenêtre que l'on croit transparente, mais que laisse-t-elle transparaître? J'ai aimé toutes les gares sans jamais y poser mes bagages, j'ai caracolé même sur de curieux nuages, et me suis dispersé sur tous les toits du monde en de furieuses pluies.

Derrière chaque rideau, j'attends insaisissable, j'ai connu les secrets de tant d'illusionnistes, j'observe clandestin, un pieds dans toutes les coulisses.

S'il reste des faux-pas, je les ferai croyez-moi, et les autres aussi, et chaque fragment à l'intérieur de chaque fragment, je les arpenterai d'un mouvement, je serai la lueur multicolore aux transitions soudaines et douces.

Je contiens dans un livre sans mots et sans phrases aucune, toutes les fins de tous les romans écrits et à venir.

Je reviens d'un pays qui s'appelle "néant", ou "indéterminé", ou encore "le réel", et j'y retourne quand je veux, sans passeport et sans identité. De lui je ramène l'informe, cette pâte interdite, et je façonne à partir d'elle des mondes à volonté, des choses délimitées, des formes et des forces qui relient les choses.

Je suis marié à une femme pour qui je suis infidèle, elle est tantôt sucré tantôt salé, tantôt suave tantôt sauvage, elle a le goût de l'indéterminé. Jamais je ne le tromperai, mais il est aussi vrai que jamais je ne lui appartiendrai. Je suis le fidèle amoureux d'elle et de toutes les autres.

Je suis sorti victorieux de toutes les disputes, je connais bien des arguments, et l'opposition qui les annule pleinement. Je suis sceptique non par goût, mais à cause de la nécessité que j'ai d'être tout.

Autant dire que je ne suis rien car c'est le seul moyen d'être tout.

Aucun commentaire: