dimanche 1 mars 2015

Les fragments des confins

Encore une nuit passée sous les projecteurs du silence,
Ivre danse ensablée sans un projet d'existence
Au petit matin j'entends l'écho de fossoyeurs lointains
Ils creusent sans relâche sous le lit de ma tombe
Ramassent sous mes cadavres des étoiles à la pelle

Depuis le temps que je les observe dans leur demeure céleste
Avec mes yeux d'enfant perdu qui sent au loin la proximité qui lui manque
Je savais bien au fond, depuis que je vous regarde fasciné
qu'un jour je vous retrouverai: faubourgs si proches où je suis né

Il est de ces matins trop gris pareils à une vie de marin
Qui font de chaque chose l'écho d'un langage forain
Et chaque terre aperçue n'est plus qu'un rivage incertain
Où tous les ponts traversés s'éteignent en souvenirs lointains

Être présent n'est jamais qu'une manière d'être absent
Me dis-je en regardant le vide
Tandis que pleuvent sur ma tête tant d'étoiles calcinées

Un pas en succédant à un autre
Une main qui se lève
Un objet qu'on ramasse
Un regard bref au reflet sur la glace
Voilà la vie dans ses gestes futiles
C'est là tout ce que ma sombre sève
Aura su faire murir de fruits

Et j'entends les coups de pelle
Le crissement laiteux des étoiles ramassées
Je sens leur feux qui m'appelle
La spirale de mes bras, les secondes amassées

Je sens le souffle, le vent stellaire des confins
Tout le ciel entassé qui se meut dans ma main
Mon sang qui étouffe, solaire et sans fin
Le sel du passé qui repose à demain

Nous sommes robots de chair aux maîtres minéraux
Issus d'une mélodie claire aux chanteurs sidéraux
Celle-là même que dit le ruban de mes mots
Céleste prosodie qui soumet mon tempo

Les heures se suivent comme un chapelet d'actions
Et vivre est un programme en cours d'exécution
Sur l'écran de l'espace apparaissent des phénomènes
Où la conscience incarne une vague ombre humaine

J'ai toujours été un passager curieux
Quelqu'un d'un peu léger au plaisir très sérieux

Toutes ces étoiles au creux de la terre
Vomies sur ma tête et chacun de ses frères
Nous ne nous sommes touchés qu'une fois
C'était tout à la fin, en un futur d'autrefois

Mon véhicule-matin qui m'emmène à l'ennui
A une énorme fenêtre par laquelle je m'enfuis
J'ai regardé dehors plus que de raison
Il n'y a pas un jour où je ne fus saison

Une matinée grise où s'écoule l'écho de la veille
Comme la nausée heureuse d'une horrible merveille
C'est cela que le présent: une déportation sans fin
Où je recherche dans le vent les fragments des confins

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