mercredi 20 novembre 2019

Un monde vivable



Aujourd'hui je me suis demandé si tu existais pour d'autres autrement que comme une présence dans la mémoire.

Puis j'ai vécu ce que vivent les gens, je crois, j'ai bavardé et mangé, j'ai pensé à partir de la surface du monde qui m'affectait. Jusqu'à cet instant où, allongé sur le matelas froid posé contre le sol, l'âme emplie de musique, j'observe le plafond. Tout le long de l'arête que forme l'angle où les deux plans inclinés du toit se rejoignent court une fissure, et je ne peux m'empêcher d'y voir un symbole de ma vie déchirée. Mais de quelle partie de celle-ci s'agit-il...? Le présent déchire sans cesse en deux le ruban des vies: passé, futur. Tous les destins portent ces cicatrices.

Il y aura pour toujours avant toi, et après toi, la déchirure formant comme un sommet avant la pente descendante qui mène au sol. À quoi ressemble-t-il pour toi cet après? As-tu parfois aussi peur que moi?

J'écris pour éloigner les ombres, comme comptine que se conte l'enfant pour se rassurer, comme une logorrhée nocturne chargée de combler le vide obscur. Me viennent alors des choses que je ne devrais pas dire, qu'on ne devrait pas dire et qu'on garde pour soi pour ne pas avoir honte. À vrai dire on ne sait pas trop si elles sont le fruit éphémère de l'instant, le cri dans la chute, ou une vérité plus ancrée... Quoi qu'il en soit on se tait pour ne pas souiller l'autre de sautes d'humeur et de mots d'où naissent effroi comme espoir.

De l'autre coté de la fissure, sur la pente descendante.

Au fond de la détresse, je m'aperçois avec une infinie douleur qu'il n'y a bien que toi, seulement toi, que cherchent à  harponner mes cris qui ne trouvent qu'une chambre vide aux échos du passé.

Saisis-tu le tragi-comique de la situation? Il n'y a que toi, au fond de mes cauchemars, au bout de mes espoirs...

I'm a highschool lover, and you're my favourite flavor.

Yet my hands are shaking...

À l'intérieur de moi, toujours et encore plus:

                                                                        le gouffre.

Et tu ne sens rien... À jamais (?) dans la nuit my playground love.

Et que resterait-il de mes jours sans mes lettres aux morts adressées? La plupart de ces textes sont des lettres à un souvenir auquel je suis probablement le seul encore à croire, à fleurir de ma durée. Car sous les pierres tombales ne reposent que les fantasmes...

De toute façon mon temps ne sert à rien... Je n'ai véritablement rien d'autre à offrir. Dans la vie, je n'ai inspiré personne, pas même toi.

Et tant mieux. Car moins ce monde me ressemblera et plus il deviendra vivable.

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