lundi 6 mai 2013

La corde

On a lancé la corde à ma place, ce n'étaient pas des mains, ce n'était pas humain
C'était un tout indicible qui a saisi ma vie, a jeté sur tes lèvres mon destin

Un masque, plus loin, beaucoup plus loin, à mille éternités de là
S'est terni tout d'un coup, au son puissant du glas

Ce n'était pas grand chose, tout juste quelques ratures sur un vieux manuscrit
Deux histoires parallèles qui se confondent, la dualité qui recouvre l'esprit

J'étais pourtant perdu, enclavé dans l'immense abîme
D'un refus obstiné, d'un monde ayant perdu ses rimes

Je n'ai plus aucun droit, je veux dès aujourd'hui n'exister que pour toi
Que les aurores foulent chaque matin le rêve dont j'étais le roi

Moi j'ai abandonné ma personne, je l'ai laissée pour toi
Je rôde désormais sur les bords de ton coeur, où s'est portée ma foi

Il y avait des vies avant, et toutes avaient pour ciel un désespoir funeste
J'y emmitouflais mon âme, comme on jetterait sur soi une vulgaire veste

Un sillon parmi le vide, la trace de mes pas sur le manteau du temps
Je ne rencontrais plus personne, je vivais sur un monde vierge d'habitants

Capuche sur la tête, sur les chemins célestes, et vacuité au coeur
J'allais droit au néant où chaque sentiment est un affluent de la peur

Et ce vertige sans aplomb, un vertige du milieu, d'un infini sans directions
L'angoisse qu'on ne sème jamais, qui bâtit sa maison sur le terreau de nos fictions

La vérité n'existait plus que comme une lueur lointaine
Dans les battements de coeur d'existences foraines

Je les ai chéri plus que le monde issu de mes mensonges
Jusqu'à ce que mon trou noir à coups d'indétermination les ronge

J'étais un fragment d'humain, une part de coeur, quelques cellules encore
Déclinant, refusant la vie et bien trop impuissant pour accepter la mort

Il n'y avait plus rien dans mon univers
Rien que les murs nus d'un doute solitaire

Navigateur de l'immobile, du non-être, j'ai voulu annuler l'existence
On m'a retourné une fin de non recevoir, les dieux m'ont jugé sans prestance

Mais j'ai jeté la corde à ta place, ce n'était pas le doute, ce n'était pas la crainte
C'était mon second choix, peut-être ma plus belle étreinte

Un masque, tout près de moi, collé à mon visage
S'est brisé en silence dans un heureux présage

C'était la liberté, ma vie retrouvée, le bonheur qui se grave dans l'ivoire des os
Je savais qui j'étais, je t'avais là tout près, pour me faire exister bien au-delà des mots

Aucun commentaire: