dimanche 28 avril 2019

La maladie



Il y avait le malheur. Relatif certes, mais le malheur quand même et fût-il éphémère. On brûle en un éclair les instants engloutis, on souffre pour longtemps du rythme déconstruit.

Il y avait le malheur et puis la chair meurtrie. Il y avait ta guitare et ta voix engourdie. Il y avait enfin ces notes comme les pétales d'un chant de roses. Le malheur, pour un temps, perdait la comparaison, palissait comme un corps desséché.

Tu te souviens le malheur allongé devant ta porte, en sac d'habits mouillés et débris de fierté?
Tu étais le charmeur qui ramassait les fragments et faisait se lever le pantin de douleur.

Il y avait le sol, jamais assez bas, toujours trop haut, trop en vue. Il y avait la lumière  pour chasser les abîmes et faire se sentir seul celui à l'intérieur.

Il y avait la honte mêlée à la détresse, comme une mauvaise marée que ton calme et ta paix doucement épongeaient.

La honte s'écoulait de moi, et tous les sentiments que tu prenais sans le vouloir, sans effort et sans geste.

Il y avait donc le malheur et ce moment du temps et puis ce lieu du monde à tes côtés. Le malheur était à la porte, à la lisière du coeur pour une durée indéterminée malgré tout définie.

La porte s'est rouverte, je suis sorti dehors où il m'a retrouvé.

Le malheur c'était moi, j'aurais voulu ne plus tant exister; ou suffisamment pas assez pour ressentir ma terrible nature, cette horrible rature.

J'aurais aimé laisser la place à tous les gens comme toi, quitter le corps du monde comme une maladie par la beauté chassée.