samedi 10 avril 2010

Le combat

Le combat, c'est quelque chose que les gens veulent comprendre.
Pourquoi tu fais ça? Qu'est-ce que tu en retires? N'est-ce pas complètement régressif?

Bien sûr il existe un côté animal dans le combat mais c'est aussi une sublimation de cette animalité, la victoire de l'Homme sur son instinct, sur ses peurs, sur l'animal qui est en lui. Une victoire ou plutôt une alliance.

Dans le combat il y a d'abord ces moments de tensions où l'on ne perçoit plus que l'échéance, le moment où tout va se jouer, où la violence va exploser. On se demande si on sera à la hauteur, si on ne laissera pas sa petite entité s'effriter face à l'autre, l'univers nous engloutir et faire que l'on n'existe plus. On a peur dans ces moments là. Une peur brève et intense qui vient du fond mais qui ne dure pas. Ca c'est les semaines, les jours qui précèdent l'affrontement.

On se laisse aussi galvaniser par des images que l'on observe, des symboles que l'on s'approprie et l'on se sent grandir, une aura de puissance émane de nous, on sent le corps et tous les muscles prêt à exploser, on se sent prêt...

Ces deux états d'esprit se passent le relai, lentement on se prépare, dans la tête, à aller provoquer cette violence qui fait tant peur.

Etre un homme je crois, c'est entre autre être libre d'être à tout moment, ne pas laisser autrui vous écraser.

Lorsqu'on entre dans la salle où se déroulera le combat, on voit les gens qui sont là en spectateurs, eux qui viennent nous voir nous, combattre un autre homme. Et c'est la crainte de ne pas être à la hauteur, la crainte de sa propre réaction face à l'adversité, l'angoisse de ne pas être bon, photogénique, propre, efficace.

Ensuite il faut s' échauffer un peu et là monte un sentiment de puissance, de rage. Plus rien ne peut arrêter ce qui a été enclenché, l'envie d'en finir se fait plus intense, on brûle de monter sur le ring, d'échanger les premiers coups, et de libérer cette force que l'on sent dormir en soi.

C'est le moment, les juges appellent mon nom, je monte sur le ring et salue le public, les juges. Je suis chez moi! Ce ring est à moi! On a plus aucune peur alors, il faut simplement contenir ce déchainement qui se fraie un chemin à travers nous, le contenir quelques secondes de plus, jusqu'au moment où la cloche va retentir.

L'adversaire monte à présent sur le ring, on se regarde, on se toise, on se présente. Maintenant.

Je me sens vivre alors j'avance directement sur l'adversaire et place les premiers coups, violents mais pas trop, il faut jauger l'autre, sentir directement la douleur qu'il peut vous infliger. Je ramasse mes premières frappes et sais à présent que je vais gagner le combat. Si les premiers coups ne m'ébranlent pas, tout est fini.

Là où d'aucuns ne voient que barbarie, je vois au contraire l'Homme qui vient au monde, la conscience et la volonté qui prennent le pas sur l'instinct de survie. Combattre c'est être plus fort que l'instinct animal. Combattre ce n'est pas détruire l'autre, l'autre n'existe pas dans un combat, il n'est qu'une image de soi. On lutte contre sa propre peur et l'adversaire n'est que le moyen d'y parvenir, de matérialiser cette peur.

Le combat, c'est deux hommes qui le deviennent réellement, qui affirment leur humanité par un acte de violence, un acte extrême qui les unit pour un temps, qui les rend complices.

Le combat c'est tout ce qu'il y a de beau en l'homme: l'abnégation, le courage, la détermination, le partage, l'amour.

Seul l'humain peut faire d'une telle chose un art aussi sublime, sublime lorsqu'enfin, on sait lire ce langage que notre monde moderne, petit à petit, tend à effacer...

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Il est vrai qu'il n'est rien de plus beau qu'un combat, et ce dans tous les sens du terme.

Encore une fois félicitation !!

L'âme en chantier a dit…

Encore une fois merci.

C'est toujours très très agréable de s'apercevoir que quelqu'un vous lit et régulièrement qui plus est.

Anonyme a dit…

:) Je lis l'expérience dans ton texte. Ai je raté un train ?

Beau texte (à l'image des autres), je n'ai pas vécu ce que tu écris mais le ressens à travers tes mots. Chaque instant de la vie est un combat, le même combat que tu décris, celui qui fait de nous des hommes.

A.