Vivre un peu ou vivre toujours, tous ces matins gris où nos âmes ruisselent contre les murs tel la pluie, tous ces matins bleus aussi, où le soleil éblouit en dévorant chaque recoin d'une chambre qui ouvre ses volets.
"Les gens sont morts!" crie cet enfant dans la rue. "La fin du monde est pour hier..." entonne cet illuminé. De toute façon on ne leur prête pas attention, de toute manière ils ont raison. Nous n'écoutons pas la raison, nous on écoute simplement la radio, on écoute la télé, c'est à dire notre conscience empruntée, notre vérité factice, tous ces mensonges qu'un jour quand même il faudra rendre.
Voir chaque jour la lumière se répandre à travers la même fenêtre, à l'intérieur d'un même cube, autour des mêmes personnes. On est sédentaire nous autres dorénavant et c'est bien cela qui nous a perdus. Combien de fois je me suis enfuit par cette fenêtre, celle de l'esprit, pour retrouver cette vie nomade, celle qui s'efface petit à petit, cette vie si humble qui n'est qu'une caresse sur le monde.
Vivre ces jours et vivre les autres, ne plus distinguer ni les couleurs, ni les humeurs, ni les messages. Vivre toujours au même endroit c'est un peu mourir, j'ai toujours pensé que la vie était mouvement, d'ailleurs le temps lui-même n'est qu'une définition, une modalité du mouvement.
Vivre cent ans ou un instant, vivre d'avenir ou d'un sourire.
De toute façon c'est l'alternance, cette différence qui réside entre le bleu et le gris, entre le mouvement et l'inertie, entre la joie profonde et la mélancolie, c'est cette différence qui donne toute sa saveur à la vie. Un jour petit et l'autre grand.
La vie pèse à mesure que nous la portons, il faut bouger, il faut souffler, la vie s'envole dans le mouvement de nos corps et danse au rythme de nos esprits d'hommes.
Je mélange ce gris et un peu de bleu, et je crée un ciel où être heureux.