jeudi 5 septembre 2019

Pendant que les champs brûlent

Le feu brûle quelque part. Au-dehors: dans l'âtre de cette maison familiale au creux du froid d'hiver qui alourdit le temps dans sa course mortelle. Au-dedans: puisque cela n'est que souvenir qui m'étreint tout au bout de l'été qui s'éteint. Ces flammes ne sont peut-être rien: sensations oubliées qui forment des images troubles. Tout vacille, comme mon identité. Tout se brouille comme les couleurs au-dessus du foyer, ondoyantes vapeurs qui coulent vers le ciel comme si la bonde de notre univers s'était logée vers le haut. Toute chute est une vertigineuse ascension.

Maints feux brûlent en moi, à différents niveaux, dans d'indéfinies dimensions; combien en reste-t-il que j'ignore encore? Je terminerai mon journal lorsque tous ces feux si lointains s'uniront dans l'instant, en formant ce bouquet de fleur unique. Lorsque s'abolira la différence, adviendra l'unité absolue, l'éternité pleine, fusion des choses et des idées. Sans différence il n'y a rien.

Mais tout en songeant cela j'ai d'innombrables feux qui brûlent au-dedans de moi, marquent la cadence de tant de paradigmes, de réalités indicibles parfois, qui s'écoulent avec le temps. Chaque foyer ardent, une temporalité singulière, un rythme.

Pendant que les champs brûlent, je suis l'horizon qui observe, l'immense foyer de tous mes incendies.

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