On me dit parfois qu'en courant après toi, je cours après une illusion, mais tous les rêves et toutes les intentions ne sont-elles pas des illusions? Ne passons-nous pas notre vie à passer à côte des choses que nous visons sans jamais les atteindre pleinement?
Les projections ne sont que les ombres de formes qui dorment en nous, alors je n'ai pas de honte à courir après un rêve de toi qui bruisse en mes cellules.
Les feuilles frémissent dehors, sous la respiration du monde, tandis que je m'endors chaque nuit dans les émanations de tes boucles brunes et sucrées.
On me dit que je m'accroche, que je me complais, mais je n'ai point de libre arbitre en ces choses, je ne choisis pas ce que je veux et encore moins ce que j'aime.
Les avis de chacun ne sont que le reflet de leur propre expérience, parfois elle peut s'accorder à la nôtre, et parfois ce n'est pas le cas, il s'agit pour vous d'un autre puzzle et quelques pièces manquantes laissent un vide béant dans l'ensemble. Mais les vides peuvent être esthétiques à leur manière...
Ne trouvez-vous pas beauté en la chute du faucon chassé? Dans le râle d'agonie du gibier? Dans le souffle silencieux des morts? Dans les traces du tourment sur les joues des gens? Dans le crissement des choses qu'on déchire? Le battement du temps qui défait les formes: celles des visages aimés, des actions accomplies et des vies vécues...
On me dit parfois tant de choses que je ne sais plus qui croire: ma pensée limitée ou bien la parcelle des autres? Et pourquoi pas ne plus rien croire, ou bien tout c'est selon...
Mais je regarde des cieux si bleus qu'ils me font pleurer tant ils me rappellent l'absence de tes yeux. Comme les bonheurs sont creux quand ils ne sont plus partagés, avec toi seulement...
Ah comme ton absence est belle dans le nombril de mon errance, elle qui me fait chanter des hirondelles dans un babil en déshérence. Regarde tous ces poèmes, tous ces vains griffonnages sur les murs d'une caverne, offrandes et hommages à une déesse qui n'en veut point.
Pourquoi continué-je à croire en toi quand il y a tant à voir dans les tréfonds du rien...