Le langage (tout langage) est une manière de traverser le réel, d'en lisser les contours, d'en extrapoler des modèles, autant de lois qui ne sont que des cartes grossières et approximatives d'un territoire à la profondeur insondable (pour paraphraser quelque peu Korzybski).
Le langage est à la base de la connaissance puisqu'il délimite, quadrille, généralise. Il est appropriation du réel par l'humain. L'homme vit alors à l'intérieur de ce langage qu'il a surimposé au réel: toute connaissance conscientisée ne peut exister hors du langage, or l'homme est un être de savoir, de "capital culturel", donc un être de langage. Ce dernier est donc ce qui lui permet à la fois d'arraisonner la nature, de l'instrumentaliser (de s'en rendre "maître et possesseur" dirait Descartes), mais c'est aussi ce qui l'en éloigne, l'en coupe, l'en détache. Le langage est le symbole de la finitude humaine, de son confinement inhérent dans un univers absolu. Il devient alors pour l'homme une sorte de 4ème dimension cloisonnante, au même titre que le temps et l'espace. Il vit à l'intérieur de celles-ci, or absolu et vérité résident précisément dans leur abolition radicale.